Analyse des événements du 10 mai 2018 et de leurs implications

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Le Golan visé par la Syrie

Des combats de missiles et de leur intensité


Ce qui s’est passé dans le ciel syrien et celui du Golan occupé constitue une nouvelle étape à plus d’un titre.


En premier lieu, il y a une décision syrienne irrévocable qui est appliquée et qui consiste à contrer toute agression, quelle que soit son envergure, et à riposter, non plus uniquement dans le ciel syrien, pour que l’action défensive devienne également offensive. C’est sur ce point précis que se situent le changement dans le comportement et le cœur-même de la nature des nouvelles procédures d’engagement tracées par la Syrie et ses alliés pour signifier à Israël qu’elle n’a plus l’initiative opérationnelle et qu’elle n’est plus maîtresse des théâtres des opérations qu’elle imposait. Israël peut commencer son agression dans les lieux qu’elle choisit mais ne peut plus mesurer l’étendue de la contre-offensive qu’elle aura à subir.


En second lieu, dans ce cadre, Israël s’attendait à ce que la riposte soit confinée dans l’espace qu’elle créait et de la manière qu’elle déterminait, comme par exemple l’attaque d’une batterie de défense ou d’un tir d’artillerie qui supposaient une riposte sur la source du feu. Aujourd’hui, Israël a été surprise par le scénario qu’elle n’envisageait pas. C’est vrai qu’elle a lancé des missiles dans le territoire syrien et qui ont été interceptés efficacement par les défenses syriennes qui lui ont infligé un revers cinglant, mais les choses ne se sont pas arrêtées là ; elles se sont développées de telle sorte que la Syrie et ses alliés ont pris le contrôle de l’initiative, transformant la contre-offensive défensive en action planifiée et stratégique. C’est la substance de la nouveauté dans les événements qui se sont déroulés, avec les missiles syriens qui se sont abattus sur des sites militaires israéliens dans le Golan occupé. Cette action planifiée et stratégique sera étudiée par l’ensemble du camp des agresseurs auquel appartient Israël. Nous pouvons alors affirmer qu’il s’agit là d’un développement certain dans les équations de dissuasion qui étaient en vigueur et d’un changement dans les règles de confrontation qui prévalaient. A partir de ce matin, nous sommes dans un nouveau théâtre d’opération stratégique avec ses nouvelles règles dictées par l’axe de la Résistance.


Des changements des données


Ces changements ne sont pas récents mais cumulatifs et ont commencé à se dessiner à partir de l’instant où la riposte à une agression a eu lieu. Nous savons pertinemment bien que la Syrie a été victime d’une guerre mondiale contre elle qui l’a obligé à mener une guerre défensive, avec des combats très durs sur des fronts multiples sur tout son territoire. C’était ce qui caractérisait le paysage syrien au début et durant les dernières années. Aujourd’hui, les zones occupées par les terroristes, outils et chair à canon des agresseurs, se rétrécissent de manière à ne plus former que 12% à 15% de l’ensemble des territoires qu’ils contrôlaient ; c’est un élément important dans les changements qui s’opèrent.


Le second point à relever est le dévoilement de l’incapacité terroriste à annihiler la Syrie. C’est désormais la Syrie et ses alliés qui ont la maîtrise sur l’outil terroriste, en plus de leur supériorité sur le terrain, et qui privent leurs ennemis d’exploiter les actes criminels des terroristes pour abattre l’état syrien. C’est également une évolution d’importance ; le terrorisme, sur le plan stratégique, n’est plus une force capable d’influencer ou de faire basculer les données.


Le troisième changement a trait aux capacités militaires syriennes ; les agresseurs qui ont ciblé les capacités militaires propres à la Syrie et qui ont tenté de la priver de l’armement des alliés constatent, après plus de 7 ans de guerre, une réalité qu’ils se refusent encore à admettre publiquement : que la Syrie développe davantage ses capacités et qu’elle est aujourd’hui mieux dotée qu’elle ne l’était avant l’agression, chose que les assaillants ne pouvaient imaginer, pensant que ces capacités allaient être entamées jusqu’à la chute du pays. C’est le contraire qui est advenu sur le terrain opérationnel.


Quant au quatrième changement, il concerne l’état lui-même et sa position internationale ; le camp des agresseurs croyait, qu’avec ses opérations folkloriques, théâtrales et belliqueuses, il pouvait délégitimer le gouvernement et le régime et isoler l’état ou l’assiéger jusqu’à sa chute et ainsi l’exclure de la communauté internationale. Après 7 ans de confrontation, il s’avère que la Syrie a renforcé sa position sur la carte politique internationale et consolidé sa stature dans les relations internationales. Il suffit de voir la délégation syrienne hier au forum international du tourisme tenu à Charm Echeikh pour constater le degré de réussite et de succès réalisés par la Syrie, malgré leurs plans d’isolation.


Par conséquent, tous ces changements à caractère opérationnel, militaire, géographique, politique, international, ont favorisé l’apparition d’un nouvel environnement créé selon de nouvelles lignes radicalement différentes des anciennes, et ont présenté à la Syrie l’opportunité et l’espace d’agir sur le plan militaire, en ne se contentant plus de l’action défensive à caractère tactique et de positionnement, mais en effectuant un saut qualitatif vers l’action planifiée à caractère stratégique de nature à apporter les bouleversements escomptés.


De la guerre et de la cohésion des alliés


Sur cette question et comme nous avions évoqué les changements opérés par la Syrie, il est également impératif d’aborder celui dans l’optique de l’ennemi israélien que nous constatons dans son comportement et ses agissements. Ce changement est de nature stratégique militaire complexe dont la substance est l’incapacité absolue d’Israël à avoir l’audace d’engager seule un conflit. Toute guerre voulue par Israël et pour laquelle elle ne peut rassembler d’autres forces régionales et internationales est condamnée à l’échec. Israël veut le soutien régional de l’Arabie Saoudite et des Emirats du Golfe et le soutien international des Etats-Unis. Et si elle ne peut réunir ces deux éléments, elle s’abstient totalement d’engager une guerre.


L’Arabie Saoudite, dans son infinie stupidité dont elle fait profession, veut la guerre. Quant aux Etats-Unis, il y a deux courants qui prévalent et qui sont actuellement en lutte. Le premier est mené par John Bolton qui cherche le conflit en faisant valoir que les difficultés d’Israël et des USA au Moyen-Orient ne seront aplanies qu’à travers une guerre totale et destructrice contre l’axe de la Résistance, en finalisant la guerre en Syrie puis en s’engageant en Iran et finissant par le Liban. C’est le plan stratégique de ce courant. Le second courant est mené par James Mattis qui déconseille l’option militaire qui nuirait aux intérêts américains et favoriserait l’expansion de l’axe de la Résistance qui a acquis de l’expérience en Syrie. Mattis préconise l’exercice des pressions politiques et économiques plus efficaces, selon lui, tout en agitant le spectre de la guerre contre la Syrie et l’Iran. Nous voyons que l’administration américaine a adopté une politique médiane alliant les deux recommandations en se désengageant de l’accord nucléaire. Ce retrait est accompagné de menaces de guerre, mais sans s’y engager, et de sanctions économiques.


Mais cette posture de compromis n’est pas pour apaiser Israël, raison pour laquelle elle a provoqué la Syrie, en ce moment précis, pour essayer d’attirer les Etats-Unis vers la guerre. Nous avons vu la réaction américaine, après que les missiles se soient abattus sur le Golan occupé, qui affirme avoir eu raison de se retirer de l’accord nucléaire, preuve en est ces missiles iraniens qui agressent Israël.


Dans la vue d’ensemble, nous prétendons qu’Israël cherche à provoquer une guerre mais doit être assistée, l’Arabie Saoudite veut une guerre mais elle est trop faible pour la faire, et les Etats-Unis sont divisés en deux clans et ne veulent pas de guerre. Les trois éléments n’étant pas réunis, Israël est actuellement dans l’incapacité d’aller en guerre malgré tout le bruit qu’elle en fait et cette guerre est donc inenvisageable dans les conditions actuelles.


Des nouvelles procédures d’engagement militaire


Ces procédures peuvent être spécifiées en quatre points :



  • Les capacités défensives syriennes : toute attaque israélienne sera annihilée par un système de défense qui la rendrait stérile,

  • La riposte : à toute attaque israélienne, la riposte est inéluctable, renforçant ainsi les moyens de dissuasion,

  • L’espace : pour toute attaque israélienne en profondeur du territoire syrien, la riposte sera une contre-attaque en profondeur du territoire israélien. Cette équation a été imposée et démontrée ce jour,

  • La cohésion : tout l’axe de la Résistance est homogène, solidaire, uni et prêt pour une guerre totale si celle-ci est inévitable, sur des fronts multiples et sans entrave aucune.


Ces quatre règles qui déterminent le temps, le lieu, la méthode et les moyens, constituent le nouveau système des procédures d’engagement.