Un des enjeux qui soulève des débats importants est bien celui de la place du pétrole au Québec. J’ai toujours été un partisan contre notre dépendance au pétrole, mais cela ne veut pas dire toutefois que nous devions nous opposer a priori à l’exploitation de cette ressource sur notre territoire. Le Québec profiterait largement de l'exploitation des gisements de pétrole contenus dans les sols de l'île d'Anticosti, de la Gaspésie et de l'estuaire du Saint-Laurent.
En 2006, Hydro-Québec a revu son plan d’investissement dans l’exploration du pétrole et après avoir dépensé environ 8 millions de dollars dans la recherche et l’exploration, ne voyait pas d’avenir dans le créneau des hydrocarbures au Québec et ne voulait plus investir davantage d’argent des contribuables dans ce domaine. Les pétrolières comme Pétrolia n’ont pas abandonné la recherche et la prospection.
Au début de 2008, la division Pétrole-Gaz d’Hydro-Québec a cédé ses droits sur 35 permis (6381 km2) qu'elle détenait sur l'île d'Anticosti à l'entreprise Pétrolia dont les principaux actionnaires provenaient de Suisse. Depuis Pétrolia s’est associée à la compagnie Corridor Ressources, une entreprise qui projette exploiter le gisement pétrolier extra-côtier d’Old Harry. Thierry Vandal, président et chef de la direction d'Hydro-Québec a donné comme raison principale que le plan d’investissement d’Hydro-Québec pour 2006-2010 s’orientait vers les énergies renouvelables éoliennes et l’hydroélectriques. Et Pétrolia en a profité pour recruter deux anciens employés d'Hydro-Québec, Erick Adam et Bernard Granger. Ces deux experts géophysiciens ont fourni à l’entreprise plus de 20 ans d’expertise dans l’exploration d’hydrocarbures. À ce moment là rien de probant n’était encore sorti du sous-sol québécois.
Voilà qu’en avril 2012, voyant le vent tourné, Investissement Québec décida de conclure avec l’entreprise Pétrolia une entente d’une valeur de 10 millions de dollars. Ce qui n’aurait pas été possible en 2006 que le gouvernement engage autant d’argent des contribuables dans une ressource inconnue et risquée. À cette époque on ne voulait pas d’exploitation de pétrole au Québec. Cette somme a permis à Pétrolia de réaliser trois forages conventionnels, c’est-à-dire sans fracturation, dans deux projets Bourque 1 et 2, près de Murdochville et un autre à Haldimand sur le territoire de la municipalité de Gaspé.
Si on raisonne sur l’imbroglio de Gaspé
Pourquoi y a-t-il eu cette montée aux barricades contre le projet de Pétrolia? Parce qu'il y a eu, au Québec, une mauvaise expérience avec les gaz de schiste. C'est la toile de fond. Dans le cas de Gaspé, le forage du puits Haldimand 4 cause problème étant donné la proximité des maisons de certains citoyens. Ce forage pourrait contaminer leurs sources d’eau potable. Cela a suscité des inquiétudes compréhensibles. Tout cet imbroglio entre la compagnie Pétrolia aurait commencé il y a un an et demi avec le maire François Roussy, selon les affirmations de son président André Proulx, dans une entrevue diffusée dimanche le 27 janvier 2013 à la radio FM-98,5 de Montréal. Le maire de Gaspé aurait réclamé des redevances pour sa municipalité si on contaminait leurs eaux potables, alors que les redevances sont directement négociées et versées au gouvernement. Deuxièmement la municipalité aurait voulu avoir des garanties de Pétrolia et du ministère des Ressources naturelles que leurs eaux potables ne seraient pas touchées. Devant leur incapacité à fournir ces garanties, en décembre 2012, la municipalité de Gaspé a adopté un règlement qui a pour effet d’empêcher Pétrolia de forer Haldimand n° 4. Aujourd’hui, 31 janvier 2013, le maire François Roussy à la radio FM-98,5 demande au gouvernement de légiférer et de réglementer l’exploration et l’exploitation des puits de pétrole afin que tous les intervenants sachent en quoi s’en tenir. Il n’est pas contre l’exploitation du pétrole sur son territoire, mais quelle se fasse selon les règles de l’art, respectueuse de la population, de l’environnement et de l’eau potable. Pour le moment Pétrolia remet à plus tard le forage d’Haldimand 4. Le dossier est dans les mains de la ministre des Ressources naturelles Martine Ouellet qui veut une loi sur les mines avant celle des hydrocarbures. La saga va se prolonger encore quelques temps.
Si on raisonne sur les nouvelles énergies
D’autres diront que le Québec doit être écologique et dire un non catégorique aux hydrocarbures (pétrole, gaz, charbon) et développer de nouvelles énergies propres et renouvelables comme l’éolienne, l’hydrolienne, la géothermie, la biomasse, le solaire, etc. Pourquoi le Québec, un producteur de trains, d’autobus, de wagons de métro et d’électricité ne se libère-t-il de l’automobile et du pétrole? Pourquoi 82% de nos investissements en transport vont au secteur routier, alors que seulement 18% vont aux transports collectifs? Pourquoi le gouvernement n’étudie pas la faisabilité du projet de transport monorail électrique de TensQuébec permettant de relier toutes les grandes villes du Québec, à un coût moindre?
Cependant il faut être réaliste. Que le Québec se lance dans les hydrocarbures ou dans les nouvelles énergies, il lui faudra sortir le chéquier. Au départ tous ces grands développements vont se faire à coût de subventions et de prêts (la plus part du temps obscurs et secrets) aux grandes entreprises privées de l’énergie. Il est illusoire de croire que les nouvelles énergies vont coûter moins cher que le pétrole et le gaz.
Si on raisonne sur la nécessité du pétrole
Nous ne pouvons pas nous passer du pétrole pour le moment et nous devons l’importer, et il nous coûte environ entre 10 à 11 milliards de dollars annuellement. Ce n'est pas demain la veille que nous pourrons nous passer de pétrole. Présentement nos industries ne peuvent pas se passer des plastiques et du caoutchouc. Nous avons trois solutions face au pétrole : le faire venir de l’Ouest canadien, de l’importer de l’Afrique ou de l’exploiter chez nous. Quand on découvre que des nappes de pétrole dorment dans notre sous-sol et que cela représente une fortune, pourquoi ne pas investir une partie de nos taxes et impôts dans ce créneau maintenant et une autre partie dans les énergies renouvelables, à l’heure où nous nous débarrassons du nucléaire.
La création de nouveaux systèmes de production et de nouvelles infrastructures vont exiger un flux d’énergie incroyable. Et cette énorme quantité d’énergie devra être abondante et bon marché. Dans le contexte économique actuel, la crise du crédit n’arrange pas les choses. Dans les meilleurs délais, nous devons, ici au Québec, effectuer une transition énergétique vers les énergies renouvelables, sans abandonner le pétrole pour le moment. Une grande question demeure : toutes ces nouvelles énergies auront-elles le flux énergétique nécessaire pour répondre à la demande grandissante des grandes industries et des villes?
Vivement un Pétro-Québec rentable.
Dans les années qui viennent, le Québec doit investir à plus de 50% dans nos entreprises pétrolières et ne pas laisser les Suisses et les autres investisseurs étrangers nous damer le pion. Les trois entreprises prêtes à développer ce créneau pétrolier et qui détiennent des permis en Gaspésie et sur l’île d’Anticosti sont Pétrolia, Junex et Corridor Ressources. Selon la Coalition cela représenterait des investissements de l’ordre de 70 millions de dollars. L’autre aspect important et qui urge, suite à la sage de Gaspé, est une loi sur la clarté de la prospection et de l’exploitation des hydrocarbures afin d’éviter que se retrouvent devant les tribunaux des conflits inutiles. Et une dernière observation est le cas d’Old Harry dans l’estuaire du Saint-Laurent où un litige persiste avec Terre-Neuve. Le gouvernement fédéral aura sans doute à se prononcer pour fixer la frontière entre les deux provinces s’il n’y a pas d’entente négociée de bonne foi entre le Québec et Terre-Neuve. Si tout baigne dans l’huile comme on dit, Pétro-Québec pourrait devenir un de nos fleurons économiques. Marius MORIN
LES ENJEUX DU PÉTROLE AU QUÉBEC
Vivement un Pétro-Québec rentable
Pétro-Québec pourrait devenir un de nos fleurons économiques.
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4 commentaires
Archives de Vigile Répondre
3 février 2013Pourquoi renégocier les permis si on nationalisait et on reprenait les droits d'exploitation?
Renégocier signifie leur laisser les permis, mais à un autre prix, non?
Vous parlez donc d'un genre de PPP, nous on payerait les frais et eux empocheraient les profits?
Il ne s'agit donc pas d'une nationalisation?
Archives de Vigile Répondre
3 février 2013@r.Tremblay
Oui, je parle de Pétro-Québec comme entreprise d'État. Je pense que le gouvernement doit renégocier tous ces contrats et permis émis à des entreprises privées. Merci pour votre remarque judicieuse.
Archives de Vigile Répondre
3 février 2013Bonjour monsieur Morin,
Vous dites : '' Vivement un Pétro-Québec ''
Mais pour le moment, il s'agit de Vivement un Pétro-Pétrolia...
Par Pétro-Québec, voulez-vous signifier une nationalisation de l'exploitation du pétrole au Québec et un rachat de tout les permis de Pétrolia, Junex et autres ?
Pierre Cloutier Répondre
2 février 2013Très bonne idée. Envoyez-la au PQMarois et vous allez être sûr qu'elle ne se réalisera pas.
Pierre Cloutier