Une fête qui manque d’âme

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Sortir la fête nationale des jupes du gouvernement

Qu’est-ce qu’il faut pour faire une fête nationale ? Pas grand-chose en fait. Une nation, ça, ça paraît être un prérequis essentiel et heureusement, nous en avons une. Il faut aussi une date et nous avons de la chance parce que nous ne sommes pas une nation qui bâtirait sa fête autour d’une grande victoire militaire, ce n’est pas notre genre. Comme en plus nous n’en avons pas vraiment dans notre histoire, ce serait compliqué de nous en fabriquer une. La date qui nous convient, c’est celle du solstice d’été qui marque la fin de notre misère hivernale. Nous y sommes.

Nous avons aussi besoin de musique, de danse et de chansons. Heureusement, nous n’en manquons pas. Même que des fois, on peut penser qu’il y en a un peu trop. Les bons citoyens venus fêter, plantés debout devant une scène, les pieds parfois enfoncés dans la boue, finissent par se demander ce qu’ils sont venus faire là. La Fête nationale a fini par y trouver son confort. On répète la recette chaque année. À travers le tintamarre, on finit par présenter «un patriote» qui viendra livrer un message sur les origines de ce peuple qui piétine devant lui ou sur les espoirs d’un avenir lumineux dont on vante l’arrivée prochaine. Et puis ça y est. La fête est finie et on remballe jusqu’à l’année prochaine.

Qu’est-ce qu’il manque donc à cette fête pour qu’elle ait tout son sens ? En quoi est-elle différente de tous les spectacles en plein air qui se suivent à la queue leu leu pendant tout l’été à travers le Québec ? N’aurions-nous pas intérêt à nous renouveler au moins un peu chaque année ?

Je crois sincèrement que ce qui manque le plus à notre Fête nationale ce n’est pas tellement l’argent. On dit que d’année en année, bien sûr, tout coûte plus cher. Mais je ne crois pas me tromper en disant que beaucoup parmi les musiciens, les chanteurs et les animateurs accepteraient des cachets symboliques si on leur demandait de se dépasser, de donner au public ce qu’ils font de mieux, de donner à ce moment précieux ce qui lui manque le plus depuis des années : une âme.

On aura beau se tortiller dans tous les sens, s’agiter sur des musiques tonitruantes, hurler les paroles de chansons à la mode, esquisser quelques pas de danse, rien n’y fera. Si l’âme n’a pas voulu se joindre à la fête, ça finira par être triste. Une fête nationale sans âme ne peut pas vivre. Même si elle avait beaucoup d’argent.

C’est simple à comprendre. Une fête sans âme, ça devient n’importe quoi. Parfois un défoulement personnel ou collectif, parfois une partouze qui sert d’exutoire à plein de gens qui ne savent plus ce qui les attend. Ça devient hélas rarement un moment de grâce où tout le vécu prend son véritable sens et où l’avenir se dessine à grands traits qui donnent de la confiance en ce que nous sommes.

Personnellement, j’aime mieux cette dernière version. Si à la fin de la fête, chaque individu pouvait se sentir grandi, ne serait-ce que d’un petit centimètre, chacun et chacune ayant réalisé que le sort de la nation est dans les mains de chacun d’entre nous, que nous sommes maîtres de notre destin personnel et collectif, nous serions en pleine possession de tous nos moyens.

La Fête nationale doit servir à nous unir et à nous faire sentir que nous appartenons à un tout dont nous portons une partie des responsabilités. Ce message, qu’il soit véhiculé par la musique, les chansons ou les danses, a pour objectif de nous aider à retrouver nos repères, à faire notre propre bilan et à nous remettre en marche pour un avenir dont nous savons qu’il nous appartient.

Il n’est pas souhaitable que le financement de notre fête nationale nous vienne du gouvernement en place, quel qu’il soit. C’est exposer la fête à devenir un outil gouvernemental qu’il faut craindre comme la peste. La fête devrait trouver comment financer l’événement autrement. Il y a une certaine urgence. La fête nous appartient. C’est à nous de trouver la solution. Il faudra toujours en contrôler les dépenses et nous assurer qu’aucune, je dis bien aucune corruption ne puisse ternir ce joyau.

La Fête nationale n’est pas juste un party de plus. C’est beaucoup plus que ça. C’est un lien invisible mais combien puissant entre les citoyens et citoyennes du Québec, un lien qui invite les nouveaux arrivants à comprendre d’où nous venons et où nous allons. L’invitation à nous joindre et à bâtir la maison avec nous est sincère.

Je vous souhaite une bonne Fête nationale. J’espère que le climat sera clément et que partout à travers le Québec on vous entendra chanter : Gens du pays, c’est votre tour…


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