POLITIQUE BUDGÉTAIRE DU GOUVERNEMENT COUILLARD

Une économie et des services publics fragilisés

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«La politique budgétaire du gouvernement Couillard a fragilisé l’économie du Québec et réduit la quantité, la qualité et l’accessibilité des services publics»

La plupart des intervenants dans le débat sur la stratégie financière du gouvernement Couillard conviennent que son budget doit chercher à concilier trois grandes responsabilités. La première consiste à aider à maintenir l’économie le plus près possible de son potentiel sans attiser l’inflation. La deuxième, à offrir des services publics de qualité correspondant aux besoins exprimés par les citoyens, tout en respectant leur capacité de payer. La troisième, à assurer la viabilité financière à long terme du gouvernement en contrôlant le poids de sa dette dans l’économie (son ratio dette-PIB).

Certains intervenants de bonne foi jugent que la stratégie budgétaire adoptée jusqu’ici par le gouvernement est tout à fait conforme à ces objectifs. Ils sont d’avis que l’économie du Québec fonctionne actuellement à plein régime ; que la stratégie budgétaire du gouvernement depuis avril 2014 n’a pas ralenti la croissance économique ; et que les restrictions budgétaires n’ont réduit ni la quantité, ni la qualité, ni l’accessibilité des services publics.

Ils en déduisent que le gouvernement a raison de profiter de la bonne tenue de l’économie pour afficher des surplus budgétaires croissants et réduire le ratio dette-PIB de plus de 10 % d’ici cinq ans, comme le ministre des Finances Carlos Leitão en a manifesté l’intention dans son budget de mars dernier.

Loin du plein emploi


Malheureusement, leurs trois hypothèses sont mal fondées. Car, premièrement, si l’économie du Québec fonctionnait à pleine capacité, les salaires et les prix auraient tendance à s’accélérer. Or ce n’est pas du tout le cas au Québec : depuis deux ans, les salaires augmentent à un rythme stable et l’inflation est en baisse. Il n’y a pas de preuve plus claire que l’économie du Québec fonctionne actuellement en deçà de son potentiel non inflationniste.

Deuxièmement, il est passablement téméraire de croire, au contraire des résultats unanimes de la recherche économique contemporaine, que retirer 4,7 milliards de dollars du circuit économique en hausse d’impôts et en compressions de dépenses, comme le gouvernement du Québec l’a fait en 2014 et en 2015, n’a pas eu d’effet négatif sur la croissance économique depuis deux ans. La consommation des ménages a marqué le pas et l’investissement des entreprises a dégringolé. En juin 2014, le ministre Leitão prévoyait que le PIB du Québec atteindrait 406 milliards de dollars en 2016 ; or, selon toute vraisemblance, il ne dépassera pas 389 milliards — 17 milliards de moins !

Une observation semblable s’applique à l’emploi : M. Leitão anticipait la création de 110 000 emplois en trois ans ; nous serons chanceux d’en récolter 50 000. Bien sûr, la conjoncture internationale et le vieillissement démographique n’ont pas aidé. Mais les restrictions budgétaires ont nettement empiré la situation. Et pendant ce temps, en 2014 et 2015, la croissance économique et la création d’emploi s’accéléraient en Ontario.

Nous n’hésitons pas un instant à répéter ce que nous avons soutenu dans Le Devoir du 13 juillet dernier (Tout ça pour ça ?) : il aurait été préférable de réduire l’ampleur des hausses d’impôts et des compressions budgétaires appliquées depuis 2014. L’élimination du déficit budgétaire à court terme et la réduction du ratio dette/PIB à long terme auraient dû être étalées de façon plus progressive dans le temps. On aurait même pu envisager de remettre à un peu plus tard, si nécessaire, l’atteinte de la cible de 45 % pour le ratio dette/PIB, que le libellé actuel de la Loi sur la réduction de la dette fixe à mars 2026.

Services publics détériorés


Troisièmement, nier que les services publics ont pâti des compressions budgétaires des deux dernières années est une position qui nous apparaît franchement insoutenable. En 2015-2016, les dépenses de programmes n’ont augmenté que de 0,4 % par rapport à 2014-2015. Les compressions ont été marquées par la précipitation et un autoritarisme outrancier. La précipitation a notamment reçu l’appui d’élus opportunistes, impatients de se procurer une marge de manoeuvre financière afin de pouvoir réduire les impôts et accélérer les dépenses tout juste avant l’élection de 2018.

Pour aller vite, il a fallu agir par décrets au sommet, de façon aveugle et indifférenciée, en laissant la main haute aux cabinets de ministres. N’aurait-il pas été préférable de tenir davantage compte de l’expérience des hauts fonctionnaires et des employés sur le terrain, de prendre plus de temps pour dialoguer avec les divers groupes d’intervenants et de donner aux gens le temps de se préparer et de s’adapter aux changements envisagés ? En agissant aussi rapidement, n’est-il pas normal que la méfiance et la résistance se soient répandues, créant du découragement chez plusieurs de nos meilleurs enseignants, infirmières et fonctionnaires ? Ne fallait-il pas s’attendre à ce que les services aux citoyens en souffrent ?
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