Un long plan de match avant la souveraineté

Les "miracles" de Ste-Anne-de-Beaupré




Denis Lessard - (Beaupré) Le Parti québécois ne s'engage pas à tenir un référendum sur la souveraineté dans un délai précis. La proposition principale rendue publique samedi après-midi propose que la souveraineté soit réalisée «à la suite d'une consultation par référendum tenu au moment jugé approprié par le gouvernement».
Sans préciser comment il répondrait à un refus d'Ottawa, le PQ s'engage à «rompre l'attentisme» avec une panoplie de revendications pour récupérer plus de pouvoir auprès du fédéral. Le texte de la «proposition principale» sera soumis aux associations de comtés qui en débattront jusqu'au congrès d'avril 2011.Ainsi le PQ élu «utilisera tous les moyens à sa disposition pour mettre fin aux ingérences du gouvernement fédéral dans les domaines de l'éducation, de la culture, de programmes sociaux de la santé et de toute autre compétence exclusive du Québec», lit-on dans le document.
Curiseusement, les militants péquistes réunis hier pour le dévoilement de cette plateforme n'ont eu accès au texte de la proposition qu'après une longue présentation, enthousiaste, du président de la commission politique du PQ, Daniel Turp, et du président du parti, Jonathan Valois. Informé du libellé, l'ex-syndicaliste Marc Laviolette, président de l'association de Jacques Cartier, ne cachait pas sa déception. «C'est en dessous de ce qu'avait laissé entrevoir Mme Marois au dernier conseil national. À ce compte, le Bloc Québécois parait bien plus déterminé dans sa démarche souverainiste», dira-t-il.
Dans son texte, passablement vague, le PQ propose «d'assumer pleinement tous les pouvoirs» et de «repousser à sa limite le carcan constitutionnel canadien». On promet, sans préciser, qu'on utilisera «tous les moyens politiques et juridiques» nécessaires, tel le recours à la clause dérogatoire et l'adoption de modifications constitutionnelles. En éducation, on propose d'imposer la loi 101 au collégial - les francophons et les allophones ne pourraient aller au CÉGEP en anglais. On réduira les subventions aux écoles privées qui refusent d'intégrer des élèves en difficulté d'apprentissage et on coupera les vivres à celles dont l'enseignement s'appuie avant tout sur la religion.
Mais un éventuel gouvernement péquiste aura clairement une très longue liste de revendications à faire au gouvernement fédéral avant d'enclencher le processus devant mener à la souveraineté. Ce constat venait donner plus de poids aux déclarations de Jacques Parizeau, publiées samedi par The Globe and Mail. Pour lui trop de souverainistes souhaitent d'abord prendre le pouvoir, proposent un agenda de «bon gouvernement» plutôt que de préparer la souveraineté du Québec.
En matinée, Pauline Marois, devant les 300 délégués de la «conférence des présidents» des circonscriptions a dressé une longue liste d'engagements que prendra un éventuel gouvernement péquiste, des objectifs qui dans un premier temps supposent des échanges avec le gouvernement fédéral.
«Notre vision sera dans chacun de nos gestes. Notre option, elle, sera dans chacune de nos politiques. Notre idée du Québec sera partout... Avant, pendant et après l'élection, nous sommes des souverainistes. Le Québec peut et doit agir en toute liberté», a-t-elle soutenu. «Gouverner le Québec en souverainiste, cela veut dire qu'on n'acceptera pas béatement des intrusions fédérales dans nos pouvoirs, qu'on va repousser à la limite le carcan constitutionnel canadien. On occupera tout l'espace possible, pour assurer notre développement.»
Élu, le PQ compte «exiger de nouveaux pouvoirs» en matière de langue, culture, immigration, développement économique. Mme Marois promet de prendre «tous les moyens politiques et juridiques pour atteindre ces objectifs.»
La proposition principale n'indiquera pas de date pour la tenue d'un référendum sur la souveraineté. Samedi, les députés ne pouvaient même préciser si le prochain référendum porterait sur la souveraineté ou sur des revendications sectorielles auprès d'Ottawa.
Une entrevue de Jacques Parizeau accordée au Globe and Mail a soulevé bien des commentaires sur le parquet. Pour l'ancien premier ministre, le PQ devrait s'employer davantage à préparer la souveraineté, proposer son projet avant les prochaines élections. Selon lui, trop de souverainistes sont obsédés par leur désir de proposer d'abord un «bon gouvernement» aux électeurs.
«Si vous voulez que des gens adhèrent à une sorte d'idéal, certains diraient un rêve, vous devez définir l'objectif et les moyens de s'y rendre (...) Vous ne pouvez pas remplacer des idées claires. Et actuellement, je présume que pas mal de choses doivent être clarifiées» a soutenu M. Parizeau. Au Parti québécois, certains ont une idée claire de leur objectif et veulent le préparer et d'autres, «seraient heureux de prendre le pouvoir et, à ce moment, regarder les possibilités. Ce sont toujours des souverainistes mais d'abord et avant tout, ils veulent proposer un bon gouvernement», constate M. Parizeau, à la veille du dépôt du plan de match péquiste pour les prochaines élections.
Pour Pierre Curzi et Bernard Drainville, députés de Borduas et Marie Victorin, le plan de match de Mme Marois est tout à fait compatible avec le souhait de l'ancien chef. Arrivé au bout de la liste des revendications du PQ, «ce sera en fait la souveraineté», résume Curzi.
«Le discours de Mme Marois est clair. La souveraineté imprègne toutes nos pensées, toutes nos revendications. La maquette du Québec souverain se fait, elle se construit actuellement», dira Curzi.
L'ex-syndicaliste Marc Laviolette, président de l'association dans Jacques Cartier, est toutefois d'accord avec M. Parizeau et croit qu'il n'y a pas assez d'efforts consacrés au projet souverainiste.
Dans son discours Mme Marois a souligné que, sous le PQ, le Québec sera «vert et bleu», voudra atteindre l'indépendance énergétique, investira dans l'économie verte. «Nous pourrons aller plus loin, plus vite, beaucoup plus en profondeur quand nous aurons tous les moyens d'un pays souverain. Mais nous agirons cependant sans attendre, à nos yeux c'est aussi un moyen de devenir plus libres», a-t-elle dit. Transport collectif et énergies renouvelables seront au «centre des activités d'un gouvernement souverainiste.»
Un gouvernement péquiste reverrait le mandat de la Caisse de dépôt. Aussi le Québec se dotera d'une politique de l'entrepreneurship, protègera les forêts et le secteur agricole. Le PQ fera la promotion de la création de la richesse, «un objectif incontournable». Le PQ «n'est pas dogmatique en matière d'économie. Si les moyens collectifs sont utiles, on va les prendre. Si ça passe par l'initiative individuelle, on va la soutenir», promet-elle.
Un gouvernement péquiste voudra «rendre à notre langue et notre culture la place qui leur revient». Le PQ mettra en place une constitution québécoise, une charte de la laicité et renforcera l'enseignement de l'histoire. Mme Marois promet une remise à jour de la loi 101 et l'éradication des «écoles passerelles».
«Le gouvernement libéral tourne le dos aux Québecois en s'en remettant à une constitution qu'on a jamais acceptée» lance-t-elle.


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