Tout le monde en parle, une émission périmée

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« Les fidèles de Radio-Cana­da méritent mieux que ces deux heures de « plogues » et d’échanges complaisants [...] »

Les produits en conserve portent tous une date de péremption. Quand ils sont « passés date », selon l’expression populaire, ils ne sont pas toxiques, mais ils sont généralement sans saveur. C’est ce qui arrive à Tout le monde en parle, l’émission en conserve que Radio-Canada présente depuis 14 ans.


Le fait qu’elle soit enregistrée le jeudi soir et diffusée trois jours plus tard a souvent été préjudiciable à Tout le monde en parle, mais ce n’est pas la raison pour laquelle l’émission n’a plus sa place. Pas le dimanche soir, en tous cas, quand l’écoute de la télé est au sommet. Les fidèles de Radio-Cana­da méritent mieux que ces deux heures de « plogues » et d’échanges complaisants qu’on aurait intérêt à reléguer à ARTV si l’on tient mordicus à conserver le concept.


Durant quelques années, l’émission fut très controversée. Elle fut aussi une pomme de discorde entre la direction de l’information et celle des variétés. Tout le monde en parle suivait à la lettre le concept de Thierry Ardisson – ce qu’on fait encore – et, comme en France, on ne dédaignait pas les coups de gueule et les sujets risqués.


LEPAGE NE FAISAIT PAS DE CADEAU


Crâneur et pontifiant, Lepage trônait à la barre, multipliant les répliques mordantes et parfois grossières. Il prenait plaisir à désarçonner ses invités, même à les humilier. J’en sais quelque chose ayant été moi-même l’une de ses victimes. N’empêche que ce comportement osé, importé de Rock et belles oreilles, était nouveau pour un animateur québécois. Il valut tout de suite à Tout le monde en parle des cotes d’écoute que n’avait pas connues Radio-Canada depuis longtemps.


Avec le temps, l’émission s’est assagie, car le réservoir d’invités est restreint dans un marché comme le nôtre. Ceux qui avaient été échaudés ne voulaient pas revenir. Ils avaient aussi fait fuir plusieurs invités potentiels qui ne voulaient pas se faire éreinter à leur tour. On a tellement tempéré le climat que plus personne ne refuse l’invitation de participer. Certains en sont même à leur dixième apparition. Lepage et Turcotte sont devenus des robots, le premier lisant des questions hautement prévisibles, toujours formulées de la même manière, et l’autre distribuant des cartes au contenu souvent éculé.


UNE ÉMISSION DE « PLOGUES »


Le roi et son fou sont des faire-valoir pour les invités ayant quelque chose à « ploguer ». L’émission de dimanche dernier en est un parfait exemple. Sylvain Cossette a plogué sa tournée, Guillaume Lambert son film et Stéphane Rousseau son talk-show à V. Michèle Ouimet, elle, a répété ce qu’elle avait écrit dans La Presse après deux semaines passées en Arabie saoudite et Nicole Léger comme Alexandre Cloutier ont dit ce qu’ils avaient répété dans tous les médias depuis le lundi précédent. Heureusement qu’il y a eu Emma, la bédéiste française.


Ceux qui sont excédés par la mécanique usée de Tout le monde en parle devraient jeter un œil sur La magie des stars à TVA. Il ne reste que deux épisodes à cette divertissante minisérie animée par Guy Jodoin, peut-être avec un peu trop des tics qu’il a développés au Tricheur. Les téléspectateurs lassés peuvent aussi se régaler à TV5 avec la très vivante émission de Laurent Ruquier, On n’est pas couché.


TÉLÉPENSÉE DU JOUR


En 1990, Marc Bergevin a déclaré à Michel Beaudry qu’il n’avait pas assez de talent pour faire partie du Canadien de Montréal. Voilà un homme visionnaire !