Sommet de la Francophonie: Legault pourrait choisir de ne pas y aller

55d8527509424a06c8289ba77fa269f8

Legault voit le Québec comme une compagnie, non comme un État national

S’il est élu premier ministre le 1er octobre, François Legault pourrait choisir de bouder le prochain Sommet de la Francophonie, qui se tiendra dans les jours suivants à Erevan, en Arménie.


En entrevue à La Presse canadienne cette semaine, le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ) a dit qu’il évaluerait cette question seulement lorsqu’il sera élu, le cas échéant. D’ici là, il refusera de dire s’il dirigera ou non la délégation québécoise présente en Arménie les 11 et 12 octobre.


Le Sommet de la Francophonie est organisé par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), le seul forum international où le Québec a un statut de gouvernement participant, ce qui lui fournit une tribune exceptionnelle à l’étranger, où sa parole a la même valeur que celle de la France, du Canada ou des autres pays membres. L’OIF compte 84 États et gouvernements membres et observateurs.


Prudent et circonspect, ne cherchant pas à s’étendre sur le sujet, M. Legault dit préférer laisser toutes les options ouvertes, de crainte de paraître «prétentieux» et d’avoir l’air de tenir la victoire pour acquis.


«Je ne veux pas commencer à avoir l’air prétentieux, en vous disant que oui j’irai ou non en Arménie, au mois d’octobre», a-t-il répondu, lorsqu’il a été invité à révéler ses intentions.


Compte tenu du calendrier, ce sera une des toutes premières décisions qu’il devra prendre, s’il est porté au pouvoir, et cela constituera son premier test du rôle qu’il entend jouer sur la scène internationale.


Chose certaine, le choix éventuel de M. Legault de laisser sa chaise vide à Erevan pourrait certainement entraîner un malaise sur le plan des relations diplomatiques entre le Québec et l’étranger.


C’est du moins ce que croit le premier ministre Philippe Couillard, qui n’hésite pas à parler de réel «faux pas» diplomatique, si M. Legault allait en ce sens.


Selon lui, il est tout simplement impensable que le Québec ne soit pas présent au Sommet de la Francophonie, même dans l’éventualité où M. Legault ne serait toujours pas assermenté comme premier ministre.


«Le premier ministre du Québec, qu’il soit en poste ou désigné, doit y être», a tranché le premier ministre Couillard en entrevue à La Presse canadienne cette semaine, estomaqué d’apprendre que le scénario d’une abstention était même évoqué dans le camp caquiste.


«La présence du premier ministre du Québec au Sommet de la Francophonie est essentielle. C’est la seule organisation internationale dont nous sommes membres de plein droit. On n’est pas membres de la délégation canadienne à l’OIF. On a notre propre représentation. C’est la seule! La seule organisation internationale dans laquelle on a ce statut!» a-t-il fait remarquer.


Selon M. Couillard, l’hésitation de son rival «montre peut-être la nature de l’importance qu’il attache aux relations internationales» dans un gouvernement caquiste.


Sur le plan logistique, on imagine aisément les fonctionnaires du ministère des Relations internationales et les sherpas s’arracher les cheveux dans les prochaines semaines, ayant le mandat d’organiser la participation du Québec à l’événement, sans savoir, à quelques jours d’avis, si le premier ministre sera présent ou non à Erevan.


Le chef péquiste et ancien ministre des Relations internationales, Jean-François Lisée, se dit lui aussi «très inquiet» à l’idée de voir le premier ministre du Québec s’absenter du Sommet de la Francophonie.


«Évidemment, il faut se rendre là», a-t-il commenté jeudi, en entrevue téléphonique, rappelant que le Québec était «un des quatre principaux joueurs» de l’organisation.


«C’est une responsabilité d’être présent», d’autant plus qu’une absence reviendrait à renoncer à des rencontres bilatérales avec des leaders de la planète, dont le président de la France.


S’il s’abstient, M. Legault enverra un signal comme quoi «l’international, c’est pas si important que ça», selon M. Lisée.


Appuyer ou pas Michaëlle Jean?


Pour le Québec, renchérit M. Couillard, catégorique, le Sommet de la Francophonie est «un rendez-vous incontournable», point.


Cela est d’autant plus vrai cette fois-ci que des décisions importantes seront prises à Erevan, a-t-il fait valoir. Les membres de l’OIF doivent notamment décider à cette occasion s’ils vont renouveler le mandat confié à la québécoise Michaëlle Jean à la tête de l’organisme.


Le premier mandat de la secrétaire générale de l’OIF n’a pas été de tout repos, ponctué de reportages alléguant une série de dépenses associées à un train de vie princier, dont 500 000 $ pour rénover ses appartements de Paris. L’ex-gouverneure générale du Canada s’est toujours défendue en disant que ces dépenses avaient été approuvées par Ottawa.


Quoi qu’il en soit, le Canada et le Québec ont donné publiquement leur appui à Mme Jean, qui souhaite obtenir un second mandat. Le premier ministre Couillard a exprimé un bémol, en lui demandant de faire preuve de plus de rigueur et de transparence dans la gestion des fonds publics.


Sa réélection est cependant loin d’être acquise, la France et l’Union africaine ayant plutôt choisi de mousser la candidature de la chef de la diplomatie rwandaise, Louise Mushikiwabo.


Quant à lui, M. Legault, tout en affirmant que la Francophonie «c’est important» pour lui, on ignore toujours sa position sur le sort à réserver à Mme Jean. Il refuse de se prononcer à savoir si oui ou non il lui donnerait son appui.


> La suite sur Le Soleil.