Services publics à la carte

Chronique de Pierre Gouin

Les recteurs des universités québécoises connaissent bien les problèmes de financement des universités et ils ont raison de se battre pour obtenir un financement adéquat. Toutes les études démontrent que la formation universitaire représente un investissement rentable pour l’individu et pour la société. Cependant, l’opinion des recteurs ne devrait pas avoir plus de poids que celle de simples citoyens lorsqu’il s’agit de décider d’où devrait venir le financement. La proposition des recteurs ramènerait les frais de scolarité, en termes réels, au niveau de ce qu’ils étaient lorsque j’étais à l’université, dans les années soixantes. Je suis passé à travers, mais à l’époque je trouvais ça injuste de vivre dans la misère pendant quatre ans pour me préparer à prendre ma place dans la société et je n’ai pas changé d’idée. Je voyais les amis de mon âge qui travaillaient et menaient une vie normale et ce n’était pas un incitatif à continuer. Les statistiques montrent que l’investissement est rentable mais quand vous entrez à l’université il y a une grande incertitude quant à votre réussite et quant à vos revenus futurs. L’incertitude existe aussi pour les étudiants qui s’inscrivent en médecine ou dans des disciplines semblables et des frais de scolarité nettement supérieurs vont sûrement décourager des jeunes qui auraient toutes les capacités de devenir de bons médecins ou de bons professionnels. Les jeunes qui voient le diplôme de médecine d’abord comme un investissement financier ne feront pas nécessairement les meilleurs médecins.
Les recteurs ne proposent pas le désengament complet de l’État mais leur démarche s’inscrit dans cette idéologie à la mode. Le principe même de faire payer les services publics par ceux qui les utilisent au moment où ils les utilisent mènerait à des situations ridicules et à un système très lourd et très coûteux à administrer. Les parents qui ont des enfants à l’école ou à la garderie paient pour l’éducation et la garderie, les gens paient seulement s’ils sont malades et quand ils sont malades, ils paient la police quand ils sont victimes de crime, les entrepreneurs qui reçoivent des subventions paient… oups!
Il existe un système simple et qui a fait ses preuves pour financer les dépenses publiques, c’est la taxation progressive. Les taux de taxation sont plus élevés pour les gens qui ont des revenus plus élevés, que se soit à cause de leur diplôme universitaire, leur succès en affaires ou pour toute autre raison. Les gens qui réussissent le doivent en partie, particulièrement au Québec, à la communauté dans laquelle ils ont grandi, ou qui les a acceuillis, et aux services publics disponibles à la communauté. Je pense qu’il y a un peu de marge de manœuvre du côté de la taxation des plus hauts revenus.


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