DÉBAT SUR LA CHARTE

Rupture au PLQ

Incapable d’accepter la position libérale sur les signes religieux, Fatima Houda-Pepin se fait montrer la porte du caucus

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Que ça va mal, que ça va mal ! Hi, hi, hi...

Expulsion aux yeux de la principale intéressée, départ selon Philippe Couillard : Fatima Houda-Pepin, après avoir porté pendant vingt ans les couleurs du Parti libéral du Québec, n’est plus une élue du caucus des libéraux. Elle siégera désormais comme indépendante.
Après une réunion du caucus qui a duré plus de quatre heures lundi, Fatima Houda-Pepin est sortie la première pour annoncer qu’elle avait été « exclue » de l’équipe libérale. Pour la députée de La Pinière, la seule élue musulmane de l’Assemblée nationale, la neutralité religieuse de l’État doit « s’incarner minimalement » dans les agents de l’État dotés de pouvoirs de coercition, comme les juges, les procureurs, les policiers et les agents correctionnels. Ils ne devraient pas porter de signes religieux ostensibles.

« La nouvelle, c’est qu’on a une position à laquelle on s’est tous ralliés, sauf Mme Houda-Pepin », a déclaré Philippe Couillard d’entrée de jeu. Cette position en matière de laïcité, décrite dans un rapport d’un comité présidé par le député de Fabre, Gilles Ouimet, ne sera connue que mardi, a-t-il précisé en début de soirée après avoir promis son dévoilement la journée même. La notion de neutralité religieuse de l’État, défendue par les libéraux, fera une distinction « entre les institutions et les individus ».

Pour Fatima Houda-Pepin, qui a souligné qu’elle luttait contre l’intégrisme depuis trente ans, refuser d’interdire le port de signes religieux, « c’est une porte ouverte à beaucoup de dérives ».

« La ligne de parti, c’est en train d’évoluer dans tous les Parlements de type britannique comme le nôtre », a-t-elle fait valoir sans succès. « Malheureusement, le Parti libéral de M. Couillard ne me permettait pas d’avoir une liberté d’action. » Fatima Houda-Pepin s’est cependant dite sereine. « J’ai défendu mes convictions et, cela, je ne le regretterai jamais. »

Pour illustrer l’unité de ses troupes, Philippe Couillard s’est présenté avec l’ensemble de ses députés. Devant cet aréopage, le chef libéral a rejeté du revers de la main toute allusion à une crise de son leadership. « C’est un [député] sur cinquante. Si j’avais le même pourcentage [d’appuis] au Québec, je serais plus qu’heureux », a-t-il dit.

Mauvais pour le PLQ

Ce départ n’aide pas le parti, a reconnu le chef libéral du bout des lèvres. Mais ce qui nuisait au parti avant tout, « c’est le flottement, c’est l’impression d’une direction qui n’existe pas, qu’il n’y a pas de ralliement, de consensus. Ce n’est pas le cas, c’est terminé ».

Philippe Couillard ne se laisse pas émouvoir par le dernier sondage Léger Marketing qui montre qu’une majorité croissante de Québécois est favorable à l’interdiction pour les employés de l’État de porter des signes religieux. Sur la question des droits et libertés et la question des minorités, « la pire chose qu’une démocratie peut faire, c’est se laisser guider par les sondages », a-t-il affirmé.

Le chef libéral a permis un vote libre sur le projet de loi 52 concernant les soins de fin de vie, « une question personnelle, de nos vies très intimes et physiques ». Mais pour le projet de loi 60 sur la charte de la laïcité, la ligne de parti s’impose parce que sont les « valeurs libérales » qui sont en jeu.

Au moment de s’adresser aux médias avant la réunion du caucus, le chef libéral ne savait rien des intentions de Fatima Houda-Pepin, ni même si elle se présenterait au caucus, malgré les nombreux appels que son entourage avait faits pour la joindre et auxquels la députée n’a pas répondu. Finalement, la députée a rejoint le caucus alors que s’amorçait la réunion.

Philippe Couillard a énergiquement condamné le gouvernement Marois qui, en proposant d’interdire aux employés de l’État de porter des signes religieux ostensibles, fait un « geste démagogique », accusant le Parti québécois de « créer artificiellement une crise sociale ».

« On met sur la table sciemment, et c’est doublement irresponsable de leur part, un projet qui est illégal selon les lois du Québec, par les lois d’Ottawa, d’ailleurs », a-t-il renchéri.

« Mon sentiment, c’est que les gens sont inquiets et qu’ils sont confus », a affirmé Philippe Couillard. « Dans une ambiance comme ça, où la confusion est volontairement semée par un gouvernement, je comprends les citoyens d’être inquiets. »

« Je comprends ce que les Québécois voient et craignent. Et je le partage aussi », a-t-il pourtant souligné. Lui qui a passé cinq ans en Arabie saoudite se dit « familier avec ces questions, bien sûr, de la crainte des gens [devant] l’intégrisme, également qu’on est toujours, nous, en train de faire des concessions et que ces concessions ne viennent jamais de l’autre côté. »

Philippe Couillard est convaincu que le PQ fera de la charte sur la laïcité un enjeu électoral. « Voulons-nous vivre dans une société qui se replie sur elle-même en retirant des droits ou voulons-nous vivre dans une société ouverte ou inclusive ? » a lancé le chef libéral, tout en soulignant que, selon lui, les préoccupations de la population portent sur autre chose : l’économie, l’exode des jeunes, les soins de santé, les finances publiques ou encore la réputation du Québec à l’étranger.


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