Résolument unitaire

Réflexions sur l'unité nécessaire

Nous avons le temps de changer d'idée d'ici 2018

Tribune libre

Je mets ici mes réflexions de quelques mois par écrit pour ouvrir et maintenir le débat jusqu'à une échéance qui ne devrait pas être si lointaine.

J'ai assisté à plusieurs rencontres convoquées par des gens se reconnaissant comme membres du Parti Québécois (PQ) au nom de la convergence appellée par Pierre Karl Péladeau. Soit pour les élections du Bloc, soit par des rencontres au nom de la société civile.

J'y ai toujours été relativement bien accueilli. Heureusement même. Personne ne m'a jamais invectivé pour mon discours unitaire, comme j'en ai l'expérience publique par certains adhérants de Québec solidaire (QS) qui ne voient plus dans les membres du Parti Québécois que de terribles monstres politiques, lesquels seraient abusés par une petite clique d'opportunistes verreux. Cela m'attriste vraiment d'entendre ça, surtout quand cela vient de gens que j'estime en même temps.

Deux résolutions de congrès de QS verrouillent actuellement la possibilité d'établir d'éventuelles alliances possibles entre QS et la PQ : elles affirment toutes deux la volonté de QS de ne pas s'unir à des partis néolibéraux. C'est limitatif pour le projet indépendantiste, restrictif, et à la limite sectaire, mais je suis capable de vivre avec ça.
Mais la vraie question revient donc à l'évaluation à faire de la nature du PQ. Est-il un vraiment parti néolibral, comme le prétendent plusieurs, notamment au sein de QS ?

Pour bien répondre à cette question, encore faudrait-il d'abord s'entendre sur les termes. Il faut aussi remettre les choses dans leur contexte.

Même le terme de " néolibéralisme " a une histoire : une des sources du néolibéralisme actuel tire son origine d'une époque, soit autour de 1948, aux États-Unis, avec des universitaires comme Hayek, prix Nobel d'économie, qui, outrés devant les futurs acquis qui avaient commencé à apparaître des suites des grandes luttes des années 30, doublées aux thèses d'un certain économiste nommé Keynes, voulaient revenir au capitalisme pur et dur.

Pendant ce temps, la sociale démocratie s'affirmait comme une des conséquences d'un socialisme concurrent, et déjà en place en URSS, et qui lui intimait de montrer les preuves que le système économique et politique qu'elle voulait défendre pouvait fonctionner dans une compétion relativement pacifique avec le capitalisme, si on exclut les luttes anticoloniales.

Les deux systèmes, capitaliste et socialiste, se conditionnaient mutuellement. Même au coeur de la Guerre Froide, les sociaux démocrates, misant sur les fruits de ce conflit, s'attachaient à une difficile tâche politique pour que les systèmes évoluent, influencés l'un par l'autre.

Pour Hayek, les pressions sur le capitalisme remontaient à la révolution des conseils, en 1917 en Russie, et s'annonçaient toujours désastreuses pour ce système car les droits élargis pour les travailleurs et les nations, codifiés dans la Charte de l'ONU, menaçaient non seulement les profits, mais aussi sur le long terme, les institutions politiques elles-mêmes en faveur du capitalisme. Même si ce n'était pas le socialisme doctrinaire, il était inacceptable pour les patrons d'endosser les conquêtes ouvrières d'après guerre.

Les thèses du néolibéralisme gagnèrent en influence devant les inconséquences de la sociale démocratie, s'annonçant en faveur de la justice sociale, mais qui en même mettait déjà des limites à la conquête ultime du pouvoir politique par les salariés eux-mêmes.

Misant sur les déceptions engendrées par une sociale démocratie trop molle, la droite reprit le combat avec Reagan et Thatcher, pour un pouvoir stabilisé au service du capital. Sous prétexte d'enrichir les subalternes, en dégraissant l'État, et pour réduire les impôts qui seraient ainsi mieux répartis entre tous. Tout cela était en même temps un mythe ensorceleur ! Car l'État, comme instrument de pouvoir, ne fut jamais réduit, mais utilisé à d'autres fins pour enrichir les riches et appauvrir davantage les salariés, cette classe moyenne dont on voulait charmer les aspirations au progrès de société.

Quand ce n'était pas carrément pour faire l'apologie de la guerre et de la répression comme facteur de développement économique. De là l'appui à Pinochet, ce triste pantin militaire, arrivé au pouvoir par le répression du socialisme chilien.
Devant l'expérience du reflux de partis d'influence et de pouvoir de la sociale démocratie, plusieurs, parmi ceux qui s'y reconnaissaient, engagèrent le débat pour en renouveller le discours et les politiques à appliquer après des périodes ascétiques de gouvernements de droite. C'est à mon sens ce qui est en cause ici.

Au Québec, la recette sociale démocrate du PQ s'épuisait et une sociale démocratie de gauche, plus pressée que le pouvoir ne serve les progrès de société, créa Québec solidaire. Les communistes québécois devaient contribuer en travaillant à l'unité depuis l'UFP jusqu'au ralliement d'Option citoyenne. Une expérience d'engagement à l'unité qui devait se répercuter, même chez les plus sectaires, par des promesses de travail en commun pour sortir la gauche de la marginalité. Cette expérience ne serait pas négligeable si on la mettait plus sérieusement au service d'un Québec libre.

Plusieurs membres du PQ reconnaissent que leur parti est une alliance «gauche-centre-droite». Ils en sentent la fragilité, mais les plus habiles à porter le projet indépendantiste ne démordent pas non plus de leur orientation sociale démocrate. Même s'ils se questionnent eux aussi, ces sociaux démocrates ne veulent pas lâcher le morceau, comme on dit. Ils ont même un journal qu'ils veulent au service de l'indépendance et des ouvriers, l'aut'journal.

Pour ceux qui s'inquiètent des futures tergiversations du PQ, il leur faudra reconnaître l'éternelle ambiguité de la social démocratie qui oscille facilement, sous la pression populaire, entre une société à caractère capitaliste ou une autre plus socialiste. S'allier au PQ ne signifie en rien renoncer à un QS partisan, vigoureux et audacieux. C'est au contraire à ces seules conditions que le PQ peut pencher d'un côté et de l'autre grâce au travail de masse chez QS.

La fermeté des nouvelles convictions sur la gauche de QS a forcé le débat sur ce que doit être la sociale démocratie, participant ainsi aux discussions mondiales sur les orientations de ce courant politique. L'aspect originale de la sociale démocratie au Québec est qu'elle s'implique au sein d'une nation à qui on refuse la constitution d'un État neuf contre les embûches d'un État fédéral canadien figé qui le lui refuse. Ce n'est donc pas sans paradoxe qu'elle doive s'ouvrir à des alliances au-delà de sa famille politique. Et faire preuve d'initiative en ce sens.

Même de l'intérieur du PQ, on reconnaît, au moins en partie, la contribution de QS à ces débats vigoureux sur les enjeux de société pour un Québec indépendant. Si certains au PQ désavouent les alliances électorales, ils ne sont pas sans attribuer à l'unité une fonction qui les raprocheraient eux-mêmes d'une victoire.

J'en viens à mon point principal. La sociale démocratie est-elle présente au PQ ? Est-elle en mesure d'infléchir ses politiques vers un projet indépendantiste plus progressiste ? Ne serait-elle pas rassurée par le type de sociale démocratie qui s'affirme à QS ?

Si QS ne peut s'unir lors d'élections aux néolibéralistes , c'est à dire avec le Parti Libéral du Québec ou avec la Coalition Avenir Québec, n'est-il pas envisageable qu'il le fasse avec ceux et celles à qui sont de fait plus propches d'eux, avec l'objectif de renforcer le camp des indépendantistes, et pour influencer encore plus le PQ sur sa gauche tout en travaillant à consolider du même coup son orientation indépendantiste?

Notre proposition reste celle de ne présenter qu'un seul député indépendantiste par comté en 2018 répartis selon une proportionnelle étabile à partir des votes obtenus en 2014. Elle est clairement expliquée sur notre site (www.pcq.qc.ca).

C'est le fruit de ma réflexion depuis quelques mois et à la suite de visites d'exploration dans des activités publiques du mouvement indépendantiste. Je ne suis pas naïf au point de la voir reprendre rapidement d'ici 2018. Surtout à QS. Mais je les exprime dans l'esprit d'unité de nos forces que les communistes ont appris à défendre au cours d'une histoire tourmentée dans leurs rapports avec la sociale démocratie. Est-il cependant si naïf de se donner des objectifs élevés et de se battre fort pour les voir se réaliser ?

Notre parti demeure transparent dans sa démarche. Nous restons en même temps convaincus de la pérennité de Québec solidaire . Même chose en ce qui concerne la nécessité de stopper le rouleau compresseur du néolibéralisme de même que de l'importance du combat pour l'indépendance du Québec. Ceux qui rejètent toute éventuelle alliance, indépendament des conditions qui pourraient s'y rattacher, soit disant pour des raisons de principes, réjetent en même temps une possibilité de multipler les candidatures gagnantes de QS au cours du processus électoral de 2018.

Nos contradicteurs refusent de participer à l'élection d'une majorité de députés indépendantistes au nom de principes sclérosés qui ont mené d'autres, avant eux, notamment le mouvement ML des années 70, vers une situation de cul de sac politique. Serions-nous à ce point aveuglés par certains dogmes au point d'être prêts à répéter encore et encore les mêmes erreurs du passé ?

J'ose espérer que non. Et voilà aussi pourquoi nous proposons les lignes d'actions qui sont les nôtres.

C'est ce qui pourrait en même temps nous rapprocher de cette si urgente indépendance qui nous sortirait du bourbier canadien. Ses institutions politiques nous enfoncent dans une situation qui vise à nous marginaliser comme peuple.


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5 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    20 décembre 2015


    QS n'est pas un parti social-démocrate, c'est un système socialiste qu'il voudrait instaurer au Québec. Allez lire son programme sur son site. On ne sait si on doit en rire ou en pleurer. QS n'est pas de gauche mais à gauche de la gauche. La seule chose à espérer c'est que les 50% de ses membres qui sont indépendantistes se réveillent et se rallient au nom de l'indépendance sans conditions.
    M. Ratté, vous avez bien décrit ce qu'est réellement QS.

  • Archives de Vigile Répondre

    20 décembre 2015

    Ce que les québécois doivent décider est; d'être monoritaire dans un pays anglophone ou majoritaire dans un pays francophone.
    "Lorsque tu fais quelque chose, sache que tu auras contre toi, ceux qui voudraient faire la même chose, ceux qui voulaient le contraire, et l'immense majorité de ceux qui ne voulaient rien faire. • Confucius"

  • Guy Roy Répondre

    20 décembre 2015

    C'est comme ça que le débat commence : démêler l'information de la désinformation sur les uns et les autres.
    Débusquer le sectarisme et le combattre :
    QS n'a appuyé aucun des partis fédéralistes.
    50 % de fédéralistes, ce n'est pas la majorité à ce que je sache. De toute façon, ces chiffres sont contestables. L'arrivée d'un NPD-Québec posera plus sérieusement le partage des votes sur la gauche. C'est un défi pour QS.
    Pouvez-vous sérieusement m'affirmer qu'il n'y pas de racisme au Québec ? Même Vigile est tombé dans le panneau avec sa diffusion, temporaire reconnaissons-le, d'un film sur les réfugiés européens comme des vandales envahissant l'Occident en affrontant la police.
    Même au PQ, il y a des gens qui se méfient de PKP.
    Est-ce que le PQ n'a pas ses propres contradictions ? Reverrons-nous le «bon gouvernement» qui oublie l'indépendance ... son article 1.
    Les chicanes individuelles pour diffamation ne sont pas du ressort des partis. Personne ne comprend la discipline de parti de la même manière.
    Élevons le débat au niveau politique et tenons compte des faits : à l'Assemblée Nationale, le PQ et QS collaborent déjà sur certaines questions.
    Et puis, qu'est-ce les luttes sectaires ont produit ? Nous sommes devant un devoir envers le peuple québécois. Qu'on ne le comprenne pas, ne le fait pas disparaître.
    Pour unir la gauche, nous avons été confrontés à votre type d'attitude les uns envers les autres. Les trotskistes parlaient encore de nous comme des «mao-stal»
    Nous y sommes arrivés. Pourquoi pas l'unité des indépendantistes ? Nous, communistes, le proposons et y travaillons. Nous aurons ainsi assumé nos responsabilités à partir de ce que notre histoire en dit. Nous préparons même tout un congrès sur le thème des alliances au printemps.
    Suivez-nous sur la Toile : www.pqc.qc.ca

  • Robert J. Lachance Répondre

    20 décembre 2015

    Le Québec ne manque pas de compétence en politique internationale et économique; vite de même, à vous lire.
    La révolution russe en 1917 a réussi parce qu’à l’intérieur de trois semaines, des personnes compétentes étaient au bon moment au bon endroit. Je n’ai pas vécu, j’ai lu, c’est aux archives, dans mon grenier ou garage, je ne lis pas sur ce à tous les jours mais ça concerne le profond. Je retrouverais le nom de l’auteur, que ce soit ou pas Jacques Attali.
    Ma première question naïve est où en sommes-nous maintenant des luttes anticolonialistes des années avant 1970 ? Ma réponse est nous n’en sommes plus là, que diable. Nous en sommes au Nord-Sud. Nous en étions je dirais, du bord d’elles, celui des suites de l’Empire sur lequel le soleil ne se couchait jamais, ou ne se levait jamais, je ne me rappelle plus, jusqu’en 1982. Et encore… J'en crois Robert Dutil, La charte de l'Atlantique, La Juste Inégalité, 1995.
    Ça se nomme britannique, et le mot britannique qui fait du bien à certains majoritaires et mal à d’autres minoritaires, et l’inverse, fait parti de l’expression incontournable ou pas « Amérique du Nord britannique. Est-ce que l’Écosse, nation compagne de fortune ou d’infortune, veut encore de ça ? Et à quel escient ?

  • Archives de Vigile Répondre

    20 décembre 2015

    Mr.ROY : Vous nous parlez bien de Québec Solidaire qui a appuyé de toutes ses forces Thomas Mulcair ( pro-pipeline et Anti loi 101 ) aux dernières élections fédérales !!!
    _
    de QS qui ne compte pas moins de 50% de fédéralistes bien cordés dans ses rangs.,
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    de QS ,alter-mondialiste , Anti Identitaire Québécois qui traite les Québecois de Xénophobes et d Islamophobes.,
    de QS qui ne veut pas s assoir aux côtés de Pierre Karl Péladeau ., et qui ne travaille sans relâche qu à abattre le Parti Québecois !!!!
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    de QS féministe pro-voile., Il me semble bien que nos supposés AMIS et partizans de... l INDÉPENDANCE conditionnelle ., n en soient plus à une contradiction près...
    de QS , qui dessinait de Croix-Gammés sur les pancartes électorales du Parti Québécois et dont certains portes-paroles trainent en COUR de JUSTICE un des seul site INDÉPENDANTISTE du Québec ( VIGILE ) et deux EX- Candidates INDÉPENDANTISTES du Parti Québécois
    _ Dites -moi Mr. ROY , nous parlons bien des mêmes !!!