En grande entrevue au journal Le Devoir, le chef d’Option nationale, Jean-Martin Aussant, soutient qu’il ne réintégrera le PQ que si ce parti promet sans aucune ambiguïté un référendum sur la souveraineté. Cette position n’est tout simplement pas raisonnable. Car que faire si nous sommes profondément convaincus qu’un nouveau référendum se solderait encore une fois par une défaite pour les souverainistes ? Doit-on tenir un référendum pour le perdre ? Aussant devrait pourtant savoir que chaque défaite référendaire entraine une régression politique considérable du Québec. Et selon toute probabilité, un référendum serait perdant. Et il ne suffira pas d’un peu (ou même de beaucoup) de pédagogie souverainiste pour ramener les Québécois à la question nationale. Il faudrait, il faudra, plutôt, un programme qui réactive les «fondamentaux» de la question nationale.
De ce point de vue, ne faudrait-il pas mieux définir un programme de gouvernement nationaliste moins «idéal» et plus réaliste, dont la première mission serait d’entreprendre la difficile tâche de réparation nationale de la société québécoise ? Paradoxalement, un programme nationaliste «minimal» ne serait-il pas plus ambitieux qu’une gouvernance strictement encadrée par la stratégie référendaire ? Car lorsque le PQ est obsédé par un hypothétique agenda référendaire, il se contente de gouverner dans une perspective «gestionnaire», pour éviter de froisser les clientèles électorales. Ou alors, il gouverne à gauche, en oubliant que le nationalisme est appelé à transcender l’axe gauche-droite.
Pour le PQ, j’imagine plutôt un autre programme sur les enjeux liés à la question nationale, dont l’objectif serait surtout de revaloriser l’identité québécoise. S’il ne peut ni ne doit s’engager à tenir de référendum, il doit proposer :
1) un renforcement des politiques nécessaires à la défense de la langue française qui pourrait passer par une nouvelle loi 101 (fin des écoles passerelles, cégep français, francisation de l’administration publique, etc.).
2) une refonte du modèle d’intégration des nouveaux arrivants, passant par le congédiement de l’inter/multiculturalisme à la québécoise et la revalorisation du modèle de la culture de convergence, centré sur l’intégration des nouveaux arrivants à la majorité historique francophone.
3) un réajustement des seuils d’immigration en fonction de nos réelles capacités d’intégration.
4) une refonte généralisée du système d’éducation qui permettra notamment la remise de l’avant de l’enseignement de l’histoire (alors qu’elle est en ce moment diminuée et dénaturée par l’esprit de la réforme scolaire et l’idéologie multiculturaliste) et plus globalement, la transmission de la culture québécoise et des humanités.
5) La mise en place d’une charte de la laïcité respectueuse du patrimoine historique et culturel québécois.
6) La revalorisation d’un certaine nationalisme économique centré sur la redéfinition de la mission de la Caisse de dépôt.
Autrement dit, la question qui se pose est la suivante. Sachant que l’indépendance ne se fera pas dans un prochain mandat péquiste, quel doit être le sens de celui-ci ? À quoi peut servir, à quoi doit servir l’exercice du pouvoir par les souverainistes, s’ils ne sont pas capables de réaliser à court terme l’indépendance ? C’est en y répondant intelligemment que les souverainistes réussiront à transformer l’actuelle embellie sondagière en véritable «moment politique» qu’ils définiront à partir de propositions fortes, transformant l’appui passif au PQ en appui actif.
J’ajoute que c’est cette question que devrait(sic) se poser les députés démissionnaires du PQ, qui se demandent actuellement s’ils devraient y revenir. Ils devrait(sic) négocier leur ralliement non pas autour de l’utopie d’une souveraineté à court terme, mais bien autour d’éléments de programme susceptibles de revaloriser l’offre politique souverainiste.
Je reviendrai d’une manière ou d’une autre sur tout cela en chronique dans les prochaines semaines.
Question à Jean-Martin Aussant
(et réflexions sur un éventuel programme nationaliste)
Option nationale
Mathieu Bock-Côté1347 articles
candidat au doctorat en sociologie, UQAM [http://www.bock-cote.net->http://www.bock-cote.net]
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