Québec solidaire les deux pieds dans le marais...

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QS, le meilleur allié du pouvoir Libéral délétère

« Sortir du marais

L'État du Québec risque, dans les années Couillard, de se vider en partie par le haut. Mais aussi, simultanément, par le bas [...] Face à cela, ce n'est pas tant la « division des souverainistes » qui devrait inquiéter, mais celle des nationalistes. Ces derniers forment encore une majorité au Québec, mais ils n'arrivent pas à s'entendre sur un véhicule commun. Il le faudrait, pour mettre au moins un pied en dehors du marais. »

Antoine Robitaille, Le Devoir.

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«Dès demain, nous allons travailler en vue des prochaines élections!» -Marie-Ève Rancourt, candidate de QS, défaite dans la partielle de St-Henri - Ste-Anne.

Je n'ai jamais vu autant d'indignation sur les réseaux sociaux envers Québec solidaire que lundi soir, suite au résultat de l'élection partielle dans St-Henri - Ste-Anne. À mesure que les résultats défilaient, on constatait que la candidate transfuge (et mythomane - Anglade refusant d'admettre qu'elle fut caquiste) Dominique Anglade peinait à s'imposer dans un château fort du Parti libéral du Québec. À un moment donné, une centaine de votes séparaient la néolibérale pro-austérité et la candidate du Parti québécois, issue du monde communautaire, indépendantiste de gauche.

C'était sans compter la division du vote « non libéral ».

Comme d'habitude, un bloc monolithique libéral minoritaire a profité de la division du vote pour arracher un siège à l'Assemblée nationale. Une majorité très claire de Québécois sont indignés, écœurés de la gouvernance libérale, de son austérité illégitime, mais Philippe Couillard peut dormir sur ses deux oreilles. Il n'a pas été inquiété lors de ces partielles, et quand on entend le discours de la candidate défaite de Québec solidaire, ou celui des autres chefs caquiste et d'Option nationale, rien ne laisse présager que les « non libéraux » se coaliseront pour lui bloquer la voie.

Ce qui a indigné particulièrement les internautes lundi soir cependant, c'est le party de QS après la partielle. Des centaines de gens ont fait remarquer aux « solidaires » que c'est la candidate libérale qui avait gagné dans ce comté et qu'il n'y avait rien à se réjouir de voir le cynisme triompher. Car oui, l'élection pour le PLQ de l'ex-présidente de la CAQ, c'est un gain pour le cynisme. Arracher cette circonscription aux libéraux aurait été un message fort, un élan positif pour la majorité qui conteste la gouvernance libérale.

Sur la planète « solidaire », le seul élan qui compte, c'est le sien. Quand on fait le décompte des appuis de QS sur l'ensemble des 125 circonscriptions du Québec, on remarque que cette gauche-là est très marginale. Tout au plus une demi-douzaine de comtés où elle réussit à bien faire et peut-être, sait-on jamais, un quatrième député en 2018. À ce rythme-là, QS peut espérer le statut de troisième opposition en 2093 sur ce qui restera du Québec, suite à un règne libéral ininterrompu jusque-là.

Sur la planète « solidaire », on vise un quatrième, un cinquième député non pas en attaquant le gouvernement Couillard - ô quelques flèches parfois pour la forme bien sûr - mais en se réjouissant des échecs du PQ et en attaquant des « alliés indépendantistes ». On se souvient de la réaction des militants au rassemblement de QS lors de l'élection de 2014 quand on a annoncé la défaite du PQ et de Pauline Marois.

En attaquant constamment le Parti québécois et en menant une campagne parfois vicieuse contre un environnementaliste péquiste, Daniel Breton, Québec solidaire a arraché un troisième député. C'était sa petite victoire. Depuis, le Parti libéral déconstruit 60 ans de consensus social et mène une charge contre des acquis sociaux qui fragilisent les plus démunis, les femmes, les familles de la classe moyenne. De ça, QS se formalise peu. La gauche illuminée saura bien, en temps et lieu, servir d'avant-garde révolutionnaire à ce pauvre petit peuple, n'est-ce pas? Car dans St-Henri-Ste-Anne, pendant que Marie-Ève Rancourt s'attaquait, encore, au PQ, c'est une opportuniste pro-austérité de plus qui s'ajoute.

Quelle convergence indépendantiste?

À un moment donné, il faudra dire les choses crûment : Québec Solidaire, dans l'état actuel des choses, nuit au Québec et devient le meilleur allié objectif du pouvoir libéral délétère. Point à la ligne. Pourtant, les occasions de convergence, à tout le moins de discussions vers une alliance permettant à la majorité « non-libérale » de s'affranchir du ratatinement des Couillard, Barrette et Coiteux ne manquent pas. Des représentants solidaires paradent en Catalogne au nom de l'indépendance, mais refusent même le principe de « discuter » avec les autres partis nationalistes. Pas mal sectaire comme attitude. Ironique quand on sait que ce qui fait la force des mouvements indépendantistes catalans et écossais c'est justement qu'ils se fondent sur la convergence de toutes les tendances nationalistes, sans égards aux inclinaisons gauche-droite.

Pour se défendre et justifier leur absence à tous les efforts de convergence (et quant aux effets de la division du vote), nombre de militants solidaires et les gens du parti aiment jeter la faute sur le PQ qui n'a pas réformé le mode de scrutin.

On invitera les solidaires à s'instruire des tentatives récentes de réformer le mode de scrutin en Ontario et en Colombie-Britannique. S'il est une chose que l'on apprend de ces expériences infructueuses, c'est bien que la « fédération » canadienne est plus difficile à réformer qu'on ne le pense. Le Parti québécois n'a gouverné que 18 mois depuis fin 2002. Croire que l'on peut changer le mode de scrutin en 18 mois relève de la mauvaise foi.

À moins que Québec solidaire ne juge les actions du PQ antérieures à sa propre existence? Auquel cas je répondrai que Lucien Bouchard n'avait rien d'un réformateur des institutions. Et Parizeau? On lui doit la plus profonde tentative de refonte de notre mode de scrutin, le référendum de 1995 sur lequel je ne m'étendrai pas maintenant. Mais croire que le Québec indépendant aurait épousé le mode de scrutin uninominal à un tour désuet qui nous accable présentement est aussi acte de mauvaise foi.

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Les choses ont évolué depuis ce matin frisquet du mois de mars 2014 lorsque Pierre-Karl Péladeau annonça qu'il se lançait en politique pour faire du Québec un pays. Aujourd'hui, la convergence indépendantiste à laquelle participent le Parti québécois et son chef tente de ratisser le plus large possible. C'est bon signe. Quand le chef du PQ affirme que son parti n'a pas, et n'aura jamais le monopole de la lutte pour le pays, c'est aussi un très bon signe. Quand le PQ nomme des gens dont le mandat de discuter avec tous les autres nationalistes, c'est aussi une bonne chose.

Mais quel espace de discussion y a-t-il avec Québec solidaire quand la co-porte-parole et figure de proue Françoise David prend une position aussi radicale en « jurant que jamais un solidaire ne siégera à côté de PKP? Ce faisant, David crée un schisme irréconciliable en s'isolant de façon permanente. Péladeau le politicien en a surpris plus d'un par son aplomb à défendre ses convictions indépendantistes d'une part, mais aussi par ses attaques incisives contre le PLQ, contre le premier ministre Couillard, mais de façon encore plus savoureuse en s'attaquant à l'élite libérale fédéraliste du Québec qui fait tout pour rendre pérenne le règne du PLQ. Comme s'assurer que QS obtienne plus que sa part de visibilité médiatique en dépit de son statut parlementaire marginal; statut que cette même élite invoque pour refuser plus de place dans ses médias au Bloc québécois par exemple.

Le plus frustrant, c'est que chez Québec solidaire, il y Amir Khadir qui sait, lui aussi, porter des coups incisifs à cette élite. S'il fallait que ceux qui attaquent l'hégémonie libérale s'assemblent au lieu de se diviser, il y aurait une députée opportuniste pro-austérité PLQ de moins aujourd'hui à l'Assemblée nationale.

Pour défaire l'infâme Harper, les militants solidaires n'en finissaient plus d'implorer au « vote stratégique » pour le meilleur intérêt du Canada. À bien des égards, le règne Couillard au Québec est pire que celui de Harper. La même logique ne s'applique-t-elle pas ici? À moins que les solidaires ne s'accommodent très bien du pouvoir libéral tant que cela les sert électoralement... Même sur un horizon de 100 ans!

On a souvent demandé aux indépendantistes de « se remettre en question ». Les partielles de lundi sont un témoignage probant de la nécessité des solidaires de faire de même. Il est plus que temps que QS cesse de s'isoler telle une secte, car dans l'état actuel des choses, tout le monde y perd.


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