Premier ici, dernier ailleurs

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Le NPD gagne le Québec, mais perd le Canada. La preuve que les intérêts des deux sont irréconciliables

Bonne nouvelle pour le NPD: il est devenu le premier parti fédéral au Québec. De loin le plus populaire chez les francophones, il est en train de saper la base du Bloc québécois, qui ne peut même plus compter sur la majorité des électeurs péquistes.
Mauvaise nouvelle pour le NPD: le parti dégringole partout ailleurs qu'au Québec, ce qui est à la veille de le priver de tout espoir de former le prochain gouvernement. Une fois de plus, à l'échelle du Canada, le NPD se trouve relégué en troisième place, comme ce fut le cas durant toute son existence jusqu'aux élections de 2011... alors qu'il se trouvait miraculeusement (ou plus précisément grâce au vote du Québec) propulsé au rang d'opposition officielle.
Le Québec, château fort du NPD! Ceux qui, comme moi, se rappellent les années où le Québec était, pour ce parti, le désert absolu, n'en reviennent pas encore.
Son ancêtre la CCF, affublée d'un nom à coucher dehors (la Co-operative Commonwealth Federation), une organisation née du syndicalisme agricole des Prairies, s'est toujours butée à une porte close au Québec. À partir de 1961, malgré les aimables visages des Tommy Douglas, David Lewis et Ed Broadbent, le NPD n'a jamais réussi à s'implanter ici, même s'il réussissait parfois à dénicher un porte-parole francophone plus ou moins crédible.
Cette impossibilité pour ainsi dire congénitale de pénétrer la seconde plus grande province du pays constituait alors, pour le parti, l'un des principaux obstacles qui lui barraient la route du pouvoir (l'autre obstacle étant son étiquette socialiste, dans un pays où l'électorat vote autour du centre). Mais, paradoxalement, sa toute récente implantation au Québec risque de lui nuire dans les autres provinces.
Malgré la bonne performance de son chef aux Communes, le NPD a perdu de son impact au Canada anglais parce qu'il doit accommoder sa députation québécoise qui fourmille de sympathisants souverainistes. Surtout, le parti fait face aujourd'hui, au Québec comme ailleurs, à un adversaire de taille, les libéraux ayant repris du poil de la bête sous la houlette agréable et rafraîchissante de Justin Trudeau. Plusieurs comtés québécois à forte représentation anglophone pourraient glisser dans l'escarcelle libérale.
Hors Québec, le tableau est sombre pour le NPD. Même si, en principe, les élections partielles ne préfigurent pas des résultats d'une élection générale, force est de constater que la part du vote néo-démocrate a fortement décliné dans toutes les élections partielles tenues depuis mai 2011.
Le NPD a perdu le comté de Toronto-Spadina, l'ancienne circonscription d'Olivia Chow, la veuve de Jack Layton. Il a été incapable de gagner Toronto-Centre, l'ancienne circonscription de Bob Rae - un autre comté urbain où il avait de bonnes chances. Mais là aussi, l'effet Trudeau, relayé par une bonne candidate, Chrystia Freeland, a joué à fond en faveur du PLC. Partout ailleurs, le vote néo-démocrate s'est effondré au profit des libéraux, y compris dans Whitby-Oshawa, en Ontario, un comté qui fut dans le passé représenté par son ancien chef, Ed Broadbent, et que les conservateurs ont réussi à conserver la semaine dernière.
Parlant des conservateurs, justement, ils affichent une résilience étonnante, pour un parti qui est au pouvoir depuis huit ans. Ils ont beau être les derniers au Québec, ils restent très forts en Ontario, et la quinzaine de comtés créés en Ontario par la nouvelle carte électorale sont presque tous dans la grande banlieue torontoise, un territoire qui leur est naturellement favorable.
Entre les conservateurs qui tiennent bon et les libéraux qui montent, le NPD est coincé. Ce n'est pas l'arrivée de la députée Maria Mourani, un électron libre connu pour ses sorties provocantes, qui règlera le problème.


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