Le pont Rocket

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Même La Presse monte au créneau, c'est dire la bêtise du geste

À l'eau le souvenir de Champlain, vive le pont Maurice-Richard! De toute façon, quelle idée de consacrer un ouvrage majeur à un type qui n'a jamais compté un but de sa vie?
Tant qu'à faire, pourquoi ne pas rebaptiser le pont Jacques-Cartier du nom de Boum-Boum Geoffrion et le pont Victoria du nom de Gary Carter?
Je blague pour ne pas pleurer. Cet entêtement du ministre Denis Lebel à occulter la mémoire de l'explorateur qui a donné naissance à la Nouvelle-France pour rendre hommage à un joueur de hockey relève de la pire démagogie, et, disons-le, du plus parfait mépris envers ces Québécois, dont on tente de racoler les votes en misant sur l'image populaire d'un grand athlète... lequel, notons-le bien, aurait été le premier à refuser pareil honneur.
Nul doute que dans les «focus groups» qu'on a organisés pour tester les noms possibles, le Rocket se soit avéré mieux connu que le fondateur de Québec. Comment s'en étonner, compte tenu du système scolaire inculte et amnésique dont nous sommes affligés?
Mais, à ce compte-là, laissons-nous tous ensemble glisser dans l'insignifiance et l'oubli de ce que nous fûmes et d'où nous venons, nous qui par ailleurs ne savons même pas où nous allons.
Même le premier ministre Couillard, qui a la réputation d'être un homme cultivé, a lâchement emboîté le pas au ministre Lebel, en disant que ce changement de nom sera bien vu et que, de toute façon, la décision relève du gouvernement fédéral. Depuis quand le premier ministre du Québec doit-il s'écraser devant une décision émanant d'Ottawa?
Nos politiciens cèdent-ils au ministre Lebel par peur d'être accusés d'«élitisme» (le pire des crimes)? Mais alors, si c'est «élitiste» que d'honorer les fondateurs de notre pays, finissons-en, fermons la boutique, et que le dernier éteigne la lumière.
Le maire Coderre a manifesté plus de finesse: il aurait préféré un consensus, dit-il, et s'inquiète de la situation dans laquelle cette controverse place la famille Richard. La voilà, la porte de sortie, celle qu'a d'ailleurs esquissée, avec beaucoup de dignité, le fils aîné du Rocket, qui a affirmé que la famille appréciait l'hommage, mais ne voudrait pas semer une controverse, sachant que son père ne l'aurait pas appréciée, lui qui a toujours refusé de se voir comme un symbole de quoi que ce soit.
La famille de Robert Bourassa avait été pareillement affectée par la polémique qui avait suivi le projet (finalement avorté) de changer le nom de l'avenue du Parc.
La polémique, dans ce cas, se doublait d'un conflit politique entre péquistes et libéraux. Dans ce cas-ci, comme le disait platement M. Couillard, «personne n'a d'opinion négative sur Maurice Richard». C'est bien évident! Tout le monde reconnaît, dans cet homme modeste et batailleur, un grand hockeyeur qui a marqué l'imaginaire collectif des années 50. Si l'on veut davantage qu'un aréna pour honorer sa mémoire, qu'on lui trouve un bel endroit à Montréal. Mais enfin, ne perdons pas le sens des perspectives!
Le fleuve majestueux qu'enjambent nos trois ponts vers la Rive-Sud est l'endroit par excellence où honorer Jacques Cartier, l'explorateur qui a découvert le Canada, Samuel de Champlain, le grand artisan du peuplement du territoire, et la reine Victoria, qui représente en quelque sorte l'importance déterminante des anglophones dans la construction de Montréal. Il n'y a rien à changer à ce prestigieux alignement.
Correction
Une erreur s'est glissée dans ma chronique de samedi quant au nombre de hauts fonctionnaires au ministère de la Santé et des Services sociaux. En fait, le ministère compte sept sous-ministres adjoints et 72 directeurs.


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