Pour une Commission d'enquête en 2010

Chronique d'André Savard

S'il y a commission d'enquête, elle sera née au terme d'un accouchement d'enquête. Qu'elle tarde autant est très inquiétant. Un oligopole définit une situation où un petit nombre de firmes contrôle le marché. On peut s'attendre à ce que le phénomène se produise parfois à titre d'exception.
Si, cependant, on se retrouve avec des oligopoles partout qui rendent des pans entiers des services publics 20 % à 40% plus chers, ce sont les dispositifs fondamentaux de l'économie qui en sont altérés.
La tendance que montre un entrepreneur à vendre trop cher ses services devrait être corrigée par l'offre plus avantageuse que fait un concurrent. Le vérificateur général a ouvert de façon aléatoire les livres au ministère des transports. Dans chacun il a relevé des failles démontrant que ce mécanisme n'opérait plus.
La fonction d'une firme n'est pas d'imposer son jugement mais de se soumettre aux conditions de son client. Dans le cas des contrats gouvernementaux, le client c'est le représentant du bien public. Celui-ci semble s'être effacé et voguer main dans la main avec les firmes qui, elles, s'entendent pour échapper aux règles de la concurrence.
Jean Charest prétend que le tout est désormais du ressort de la police et qu'il faille la laisser aller sans l'interférence indue d'une commission d'enquête. Or, la police enquête sur la foi d'accusations portées contre des citoyens en particulier. Ce n'est pas dans son mandat d'expliquer pourquoi l'influence des oligopoles est telle qu'elle en devient un rouage interlope de l'économie. Ce n'est pas dans son mandat non plus de déterminer quel traitement curatif s'impose à un système économique qui obéit aux préséances d'oligopoles au pluriel, au grand pluriel.
Si la police avait uniquement à sonder un ou deux cas d'exception, on pourrait se contenter d'émettre un ou deux mandats de perquisition. Mais là, la police comme le reste de la population se retrouve devant l'influence de ses tractations oligopolistiques à plusieurs niveaux de l'administration publique. Les représentants de la police ont convenu eux-mêmes qu'ils manquaient d'une représentation adéquate de la situation.
Les seuls qui ne veulent pas d'une commission d'enquête, ce sont les proches du parti Libéral. Jean Charest ne souhaite pas une représentation adéquate de la situation. Elle risquerait de ne pas contribuer à la quiétude de ses partisans et au confort politique et social de la grosse entreprise moderne. C'est sûrement ainsi que Jean Charesrt définit les oligopoles en place.
D'ailleurs si la situation persiste, on finira par se convaincre qu'une bonne entreprise est un oligopole. On finira par accepter que normes et règles soient détournées. Que les prix soient trop élevés, qu'ils ne soient pas fixés par le marché, on finira par se convaincre que c'est normal.
Jean Charest veut passer 2010 à redire que les oligopoles au Québec ne sont que des conséquences anti-économiques isolées en voie d'être résolues par la sûreté du Québec.
André Savard


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2 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    5 janvier 2010

    Ne faudrait-il pas au moins DEUX enquêtes publiques de première importance cette année ?
    En tout premier lieu, une enquête approfondie pour découvrir les causes et les responsables des pertes en excès de notre Caisse de Dépôt et Placement au cours de 2008.
    Sur un total de près de 40 MILLIARDS de $, environ 12 milliards se seraient volatilisés à la suite d'échanges douteux de « papiers commerciaux » avec au moins une firme de Toronto...
    On voudrait aussi savoir les raisons du départ précipité du président Rousseau pour un pactole chez Power Corp...

  • Archives de Vigile Répondre

    4 janvier 2010

    Il y a une pétition électronique en cours présentement demandant la tenue d'une telle Commission d'enquête dans le domaine de la construction. La pétition est ouverte jusqu'au 4 février 2009 et a recueilli jusqu'à maintenant plus de 20 700 signatures.
    À mon avis, faudrait atteindre 50 000 pour faire bouger le gouvernement...