Pierre Falardeau, libre Québécois

Pierre Falardeau : 1946-2009


Le Québec vient de perdre un grand patriote et la culture québécoise est en deuil de l’un de ses artisans les plus créateurs. Pierre Falardeau est mort ce vendredi 25 septembre 2009.
Homme libre et intègre − il n’est pas inutile de le rappeler en ces années où les cupides et les corrompus sévissent dans notre société −, anthropologue de formation, polémiste redoutable, indépendantiste déterminé, Falardeau était d’abord et avant tout un cinéaste et un des meilleurs de sa génération. Il a réalisé quelques uns des plus grands films de notre jeune cinéma national, en particulier, je crois, Le Party, Octobre et 15 février 1839. Le contenu politique de ses films en avait fait la bête noire des pourvoyeurs fédéralistes de Téléfilm Canada qui, le privant de financement, tentaient de le réduire au silence.
Mais on ne fait pas taire un Pierre Falardeau et quand ses censeurs seront dans leurs tombes, oubliés, l’œuvre cinématographique de Falardeau sera toujours bien vivante pour les narguer. Seront toujours vivants, aussi, ses écrits pamphlétaires : La liberté n’est pas une marque de yogourt, Les bœufs sont lents mais la terre est patiente, Il n’y a rien de plus précieux que la liberté et l’indépendance. Comme sera toujours tellement pertinente et émouvante cette Lettre à mon Ti-cul, qu’il avait rédigée pendant la campagne référendaire de 1995 et publiée dans Trente lettres pour un OUI.
Libre-penseur, Falardeau brassait avec une franchise peu commune la cage de notre aliénation collective. Il était un impitoyable critique de nos lâchetés, de nos attitudes colonisées. Il ne faisait pas dans la dentelle. Sa plume était un couteau trempé dans le curare. Sa parole, un dérangeant cri d’indignation, de colère, de révolte. Il adorait provoquer les chantres de la rectitude politique, ce qui le conduisait à l’occasion à des excès qui choquaient et qu’il regrettait parfois. Il donnait des coups. Il en recevait aussi plus que sa part.
Mais, quand il enlevait son masque de «grande gueule», le Falardeau que je connaissais, que j’aimais et que je pleure, était un tout autre homme : amoureux d’une femme remarquable et père attentionné de trois beaux enfants, lecteur curieux, intelligent et modeste, capable d’écouter et de débattre avec respect, d’une rare culture, d’une sensibilité exceptionnelle, d’une sincérité indéniable et, j’en étonnerai sans doute plusieurs en ajoutant cela, d’une grande timidité.
De la nation québécoise qu’il aimait avec une passion parfois désespérée, il n’aurait souhaité, j’en suis persuadé, qu’un seul hommage : qu’elle se décide enfin à proclamer son indépendance politique, à conquérir sa liberté.
Par PIERRE GRAVELINE
Écrivain et éditeur


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1 commentaire

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    28 septembre 2009

    J'ai appris la nouvelle de la mort de Falardeau il y a maintenant trois jours, et je dois avouer que de voir Luc Picard sur plusieurs photos en sa compagnie, comme le fait que l'on ait demandé des commentaires à Luc Picard, je le comprends, mais ça crée chez moi, un malaise.
    Je le comprends, donc, car Luc Picard, c'était l'acteur fétiche du réalisateur de films qu'était Pierre Falardeau. Sauf que je me souviens très clairement d'avoir lu dans le journal Le Soleil, à Québec, une entrevue avec Luc Picard, en 1994, qui avait de quoi décevoir, je pense...
    C'est qu'à l'époque de la sortie d'Octobre, l'acteur en question, disait : «... moi, non, je ne veux pas nécessairement qu'on aie un pays, nous. Je veux juste pas qu'on disparaisse. Arrêtez de dire qu'on paranoye; regardez les chiffres!».
    Déjà, à l'époque, Luc Picard s'était fait une réputation «d'acteur engagé» (sic); et encore aujourd'hui, on peut le voir participer à des messages télévisés pour Vision Mondiale, pour recueillir des fonds pour les pauvres, en Afrique...
    Pauvre Luc Picard! L'acteur fétiche de Pierre Falardeau, se préoccupe du sort des pauvres du continent Africain, mais il semble incapable de comprendre que pour que son propre peuple ne disparaisse pas, il doit avoir son propre pays!