Adopté mercredi à l’Assemblée nationale, le projet de loi sur la neutralité religieuse interdit toutes formes de visage couvert dans l’échange de services publics, incluant autant le voile intégral que la cagoule, a statué le gouvernement.
«Le visage couvert, c’est autre chose que la religion», a commenté le premier ministre Philippe Couillard, dans les minutes suivant l’adoption du projet de loi 62 par la majorité libérale, mercredi, à l’Assemblée nationale.
Certaines dispositions de ce projet de loi entreront en vigueur de façon imminente, soit dès qu’il aura reçu le sceau du lieutenant-gouverneur. C’est le cas de l’échange de services publics à visage découvert, une notion qui touche les municipalités et les sociétés de transport.
«Vous me parlez, je vous parle, je vous vois le visage, vous voyez le mien. Ça fait partie de la communication. C’est une question qui à mon avis n’est pas uniquement religieuse, qui est humaine», a ajouté M. Couillard.
Un étudiant universitaire qui souhaite passer un examen pourra-t-il avoir le visage couvert? Une femme ayant le visage voilé pourra-t-elle monter à bord d’un autobus? Non, a assuré la ministre de la Justice, qui refusait jusqu’ici de commenter des «cas d’espèce». «Pour prendre un transport en commun, il faut avoir un visage découvert. Tout le long du trajet», précise Stéphanie Vallée.
Cagoules
L’obligation du visage découvert touche autant le voile intégral que la cagoule, le bandana ou les verres fumés qui masqueraient le visage, a-t-elle illustré. La ministre Vallée base cette décision sur des motifs de sécurité, de communication et d’identification, évoquant du même souffle les manifestations violentes survenues à Québec, à la fin du mois d’août.
Rappelons qu’à la suite de ces incidents, le maire de Québec avait déclaré qu’il ne voulait plus de «burqa», de «niqab» et de «cagoule» dans l’espace public. Le ministre Gaétan Barrette avait immédiatement déploré que Régis Labeaume ait effectué un lien entre les manifestants cagoulés et les femmes qui cachent leur visage avec un vêtement religieux.
Accommodements
Le projet de loi sur la neutralité religieuse permet les accommodements raisonnables pour motifs religieux, en vertu de la Charte des droits et libertés. «Il est impossible d’empêcher quelqu’un de demander un accommodement, a affirmé le premier ministre. Ce qu’il faut faire, c’est déterminer les critères d’analyse et de prise de décision.»
Les directives entourant le traitement de ces demandes ne seront toutefois révélées qu’au printemps. Dans l’intervalle, ce sera au «cas par cas», a statué la ministre. M. Couillard a invité les municipalités à discuter avec le gouvernement des éventuelles règles d’application de cette loi. Des démarches auraient été entamées en ce sens en août, plaide Mme Vallée.
Une «farce»
Tous les partis d’opposition se sont opposés à cette pièce législative, que le Parti québécois a qualifié de «farce». «Quand les juges vont décider, bien, tout le monde devra avoir le visage découvert, sauf ceux qui veulent le couvrir pour des raisons religieuses. Alors, c'est: à part Batman puis Spiderman, là, tous ceux qui ont des raisons religieuses pourront avoir le visage couvert», a scandé le chef Jean-François Lisée.