Conseil de presse du Québec

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Médias et politique

Vendredi dernier, nous avons démissionné de nos fonctions au sein du Conseil de presse du Québec. Ce sont les mêmes raisons qui nous ont incités à oeuvrer au sein du Conseil de presse qui nous obligent aujourd'hui à en sortir.
Au cours des dernières années, le Conseil s'était doté d'un plan d'action qui visait à fédérer les intérêts divergents des acteurs qui le composent. Avec une écrasante majorité, les représentants du public, des journalistes et des entreprises de presse avaient approuvé un plan d'action dont la tournée des régions et son suivi constituaient un des points d'importance. Écouter la société civile et faire connaître le Conseil justifiait cette démarche unique dans l'histoire du Québec.
La situation jamais paisible du Conseil évoluait tout de même de façon normale jusqu'au moment de publier le rapport. Devant la menace de retrait d'un regroupement d'entreprises, advenant la publication du rapport, s'est enchaînée un peu plus tard la sortie des médias électroniques du Conseil de presse. Cette sortie, qui était désirée depuis 1990 par les médias électroniques, mais empêchée à l'époque par le premier ministre Robert Bourassa, a finalement connu un dénouement peu avant Noël.
Conséquences néfastes
Devant l'appel de solidarité du conseil d'administration, les entreprises de presse ont répondu par la «mise entre parenthèses» des suites à donner à la tournée des régions et par une série d'anciennes et de nouvelles réclamations. La signature des décisions par chaque membre du Tribunal d'honneur en est une, elle avait été pourtant mise de côté, car le conseil d'administration avait jugé que cela rend les journalistes, et surtout les pigistes, vulnérables à d'énormes pressions dans un monde où l'on connaît une grande concentration de la presse. Sans oublier les menaces personnelles, hélas, bien documentées qui peuvent aussi en découler.
Plus que cela, les entreprises revendiquent à nouveau une renonciation à toute poursuite éventuelle des médias par les plaignants lorsqu'ils s'adressent au Conseil de presse. Cette renonciation interpelle les droits fondamentaux des individus et avait été aussi écartée par le conseil d'administration. Il y a eu également une requête visant à diminuer la fonction «conseil» et à rapetisser le Tribunal d'honneur. Ces modifications rendent, à nos yeux, caduque toute prétention du Conseil de presse à la défense du droit du public à une information libre et de qualité.
Cap sur la déontologie
Avec ces nouvelles directives proposées par les entreprises, on ne pourrait plus, par exemple, commenter les compressions à Radio-Canada, même si cela influe gravement sur l'information régionale. Les plaintes, quant à elles, devraient revêtir un caractère pédagogique. Bien que non consensuelle chez toutes les entreprises, cette dernière proposition s'inscrit tout de même dans un protocole de relations publiques convenu entre elles dont la déontologie constitue l'assise.
Il faut resserrer le mandat du Conseil sur la déontologie. La déontologie, vertueuse en soi et inattaquable, devient ici le paravent à la mise sous silence des représentants de la société civile et de leurs préoccupations. Il n'est plus question, évidemment, de parler de concentration de la presse ou de convergence et de leurs conséquences dans l'information.
Les entreprises de presse pourraient toujours prétexter que ce n'est là qu'un plancher de négociation. Nous considérons que nous n'avons jamais reçu le mandat, comme représentant du public, de diminuer les droits de la personne ni d'affaiblir la seule institution, si précaire soit-elle, qui protège le citoyen au chapitre de l'information. Dans leurs textes, les entreprises de presse laissent planer plusieurs fois le spectre du désistement et de compressions budgétaires sévères. Il est encore plus troublant de n'y retrouver aucune proposition de financement, si ce n'est que de créer... un comité.
De crise en crise
On ne peut qu'observer la grande similitude de la crise vécue dans les années 90. Près de vingt ans plus tard, le constat est accablant; nous ne faisons que nous enfoncer davantage dans le même sillon (précarité financière, restriction de la parole dans la sphère publique, limitation des droits du plaignant, etc.). Il est difficile de croire que cela perdure [...].
L'historique des crises quasi permanentes du Conseil de presse laisse penser que l'autoréglementation ne fut jamais bien acceptée par les entreprises de presse et que ce mal obligé se transforme aujourd'hui en cauchemar, car la crise financière grève sévèrement leurs revenus publicitaires et l'ajustement technologique ne se fait pas sans heurts. Même la formule bancale actuelle devient insoutenable, leur seule solution est de limiter le Conseil à sa plus simple expression.
Nous pensons que l'avenir du Conseil de presse ne peut se définir derrière des portes closes, ni en catimini, c'est toute la société civile qui doit être interpellée, car c'est tout l'équilibre social qui est en cause. Mais l'établissement d'un Conseil de presse viable et indépendant peut-il se faire sans l'inscrire dans une réflexion plus globale sur l'information?
Cadre juridique
Plusieurs l'ont dit [...], il faut encadrer juridiquement l'activité des médias. Ceux-ci pourraient y trouver des avantages -- pensons à la protection des sources, ou à une contribution accrue de l'État au Conseil de presse, par exemple.
Les médias ont eu 35 ans pour offrir une solution remplacement viable à un encadrement juridique de leurs activités, et ils ne l'ont pas fait. Nous pensons qu'une commission parlementaire pourrait s'attarder à cette tâche et proposer, comme d'autres l'ont réalisé ailleurs dans le monde, une formule qui garantit la liberté et l'indépendance de la presse, mais qui respecte aussi bien les droits individuels que collectifs. Il est incompréhensible que l'information ne soit laissée qu'au modèle d'affaires des entreprises.
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Raymond Corriveau et Denis Plamondon,
Respectivement président et vice-président sortants du Conseil de presse du Québec

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Denis Plamondon1 article

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vice-président sortant du Conseil de presse du Québec





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