Palmarès politique et social 2017

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La bonne nouvelle de l’année : la fin du projet Énergie-Est

L’année achève. Une autre année bien chargée !


Comme à l’accoutumée, c’est le moment de faire des bilans tout en dégustant un chocolat chaud et en regardant la neige tomber. Voici mon petit classement personnel. Il faut malheureusement toujours faire des choix, et la liste suivante est donc très loin d’être exhaustive.


La chute des intouchables : le mouvement #MoiAussi et les Paradise Papers


Il y a dans ce monde un paquet de gens se croyant intouchables et estimant détenir une impunité quasi divine. Il y a aussi de ces moments où ceux-ci tombent de leur piédestal. Accorder au mouvement #MoiAussi la palme d’or dans cette catégorie est convenu mais néanmoins justifié. Il est fondamentalement bénéfique que les langues se délient et que les abus soient dénoncés. Attention cependant à ne pas tout mettre dans un même panier. À ce titre, les allégations contre Gilbert Sicotte ont ralenti le mouvement, donnant l’impression qu’on était allé trop loin cette fois. Dans toute révolution, des innocents sont malheureusement condamnés. C’est difficilement évitable, mais il faut d’autant plus y aller avec parcimonie. Quoi qu’il en soit, bravo à toutes ces personnes ayant eu le courage de parler.


Les Paradise Papers s’inscrivent aussi dans cette dynamique. Ces « élites » qui pensaient que la fortune n’avait pas à s’arrêter là où les frontières se dressent en ont pour leur... argent.


La bonne nouvelle de l’année : la fin du projet Énergie-Est


La volonté d’un État lié aux pétrolières d’imposer la construction d’un oléoduc peu sécuritaire et sans redevances dignes de ce nom n’augurait rien de bon, surtout à une époque où il nous faudra impérativement sortir, plus tôt que tard, de notre dépendance aux énergies polluantes. Par chance, l’abandon du projet a été annoncé en 2017. Si la mobilisation populaire a été remarquable au Québec, on peut cependant soupçonner que la décision a été prise à cause de l’évolution du prix du baril. Quoi qu’il en soit, il faut sauter sur les bonnes nouvelles quand on en a.


La personnalité de l’année : Valérie Plante


L’an dernier, c’est Donald Trump qui avait mérité cette place. Cette année, c’est à Valérie Plante que revient le titre de personnalité de l’année. Quelle surprise ! Défaire Denis Coderre (après avoir battu Guillaume Lavoie à la chefferie de Projet Montréal et Louise Harel comme conseillère municipale) est tout un exploit, impensable il y a encore quelques mois. On croyait le new sheriff in town invulnérable et installé à la mairie jusqu’à la fin des temps, un peu comme Régis Labeaume à Québec. Et pourtant, une jeune inconnue l’a battu dès sa première tentative. Quand on regarde de plus près les résultats, on constate que Plante a été plébiscitée par les francophones tandis que le vote allophone s’est reporté sur Coderre. Les allophones n'ont cependant pas été assez nombreux à se rendre aux urnes, ne sentant sans doute pas le même danger que lorsque la souverainiste Louise Harel risquait de vaincre Gérald Tremblay. Mise en garde, toutefois : le principe de l’underdog défaisant un politicien aguerri et bien installé n’est pas en soi positif. Il peut l’être, comme il peut ne pas l’être. Dans le cas de Valérie Plante, on en saura assurément plus sur ses capacités au cours de la prochaine année.


Le grave danger passé sous le radar de l’année : la centrale de Chalk River


Le projet de dépotoir de déchets radioactifs de Chalk River est porteur d’un danger extrêmement sérieux, celui de voir des molécules radioactives se retrouver dans notre fleuve St-Laurent. Avez-vous envie de boire de l’eau qui vous fasse pousser un troisième œil ? Personnellement, j’avoue que je m’en passerais.


Pour en savoir plus, je vous renvoie à mon texte sur la question. Il faudra assurément y revenir en 2018 jusqu’à ce qu’on ait la confirmation que ce projet sans queue ni tête soit abandonné. Espérons une mobilisation populaire et politique de l’ampleur de celle qui se dressait contre l’oléoduc Énergie-Est.


La tragédie de l’année : la tuerie de la mosquée


L’hiver dernier, la ville de Québec a été foudroyée par une grande tragédie, celle de la tuerie de la mosquée de Ste-Foy. On en sait encore très peu sur les motifs de l’assassin, Alexandre Bissonnette, dont le procès devrait débuter en mars prochain. Ayant enseigné lors de la session d’hiver 2017 à l’Université Laval, je dois dire que cet événement m’a beaucoup troublé. J’imagine ne pas être seul dans cette situation.


La grande diversion de l’année : la légalisation du cannabis


Depuis plusieurs années, on connait la volonté du gouvernement de Justin Trudeau de permettre la consommation récréative de cannabis. Le premier ministre veut entretenir son image de jeune cool et branché. Pendant ce temps, un paquet d’enjeux bien plus fondamentaux sont mis de côté. On comprend mal l’urgence de vouloir à tout prix organiser une vente légalisée de cannabis récréatif.  Quand on creuse un peu, on constate que la légalisation profitera surtout à des compagnies ontariennes proches du parti au pouvoir. Tant qu’à avoir cette discussion peu utile -outre pour le Parti libéral et ses entreprises alliées- on aurait pu au moins avoir un vrai débat de société sur le fond de la question. Ça, ça aurait pu valoir la peine.


Début en lion, fin en mouton : l’indépendantisme catalan


J’étais présent à Barcelone lors du référendum catalan. Une mobilisation impressionnante, un moment rempli d’espoir, une volonté sans faille de défier l’autorité d’un État qui voulait mater la liberté d’une nation. Quel dommage que ça ait si mal viré !


Le délire de l’année : les Russes sont partout !


L’élection de Donald Trump ? Ce sont les Russes ! Le référendum catalan ? Ce sont les Russes ! Le monde est en train de délirer autour du Croque-mitaine russe. Le pays dirigé par Vladimir Poutine représente un épouvantail efficace. L’Amérique y est habituée, suite à un demi-siècle de propagande antirusse pendant la Guerre Froide. Après la fin du bloc soviétique, la Russie a décidé d’appliquer les recettes économiques du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale et des États-Unis. Le résultat a été catastrophique. Depuis le début des années 2000, la Russie a appris ses leçons et ne les écoute plus. Cherchant à être indépendante du giron américain, Moscou est à nouveau l’objet de toutes les diabolisations imaginables. Et ça ne va pas s’arrêter.


Le magané de l’année : Jean-François Lisée


Jean-François Lisée était ma « révélation de l’année » dans le cadre de mon palmarès 2016. En quelques mois à peine, Lisée, qui était le potentiel chef préféré de 3 pour cent des électeurs péquistes, avait su écraser le candidat choisi par la machine. On a rarement vu une stratégie communicationnelle aussi efficace. En cette fin d’année 2017, le portrait est complètement différent et la descente aux enfers aurait difficilement pu être plus rapide. Il ne faudrait pas imputer à Jean-François Lisée l’unique responsabilité de la position déplorable du Parti québécois dans l’opinion publique. Le PQ a des maux structurels très profonds depuis plusieurs décennies, et commet précisément l’erreur de ne blâmer que ses chefs ou ses erreurs conjoncturelles. Cela ne veut pas dire qu’il ne prendra pas le pouvoir, ou qu’il ne remontera pas : fin 2011, Pauline Marois était également à 19 pour cent, ce qui ne l’a pas empêché de devenir première ministre quelques mois plus tard. Au début de l’élection fédérale de 2015, on disait du PLC qu’il était un vieux parti déphasé et de son chef qu’il n’était pas prêt. Or, le lointain troisième parti est passé en première position dans la dernière semaine avant le jour du vote. Cependant, dans le cas du PQ, il lui faudrait éviter de toujours pelleter en avant. Après chaque défaite, le PQ promet une grande introspection, qu’il laisse de côté dès le premier sondage laissant miroiter une certaine lune de miel pour son nouveau chef. Et à chaque fois, il perd, faute d’avoir pu se poser les questions qui dérangent. Ça ne pourra durer éternellement.


Le gagnant apparent de l’année : François Legault


La Coalition Avenir Québec termine l’année en beauté, c’est vrai. La CAQ est cependant dans la même position que le NPD de Thomas Mulcair : trop haute trop tôt. La prochaine élection est prévue pour le 1er octobre 2018, soit dans une éternité. Être en première place un an avant les élections est presque une garantie de ne pas l’être le jour du vote. La position de François Legault est actuellement celle de celui qui fédère les insatisfaits du gouvernement libéral. Normalement, il lui faudrait donc éviter d’avancer des propositions trop audacieuses pour éviter de diviser ses appuis circonstanciels, qui n’ont rien de solide. En même temps, refuser toutes les étiquettes finit par déplaire à tous. La position de la CAQ est si délicate que la meilleure chose qui puisse lui arriver, si elle veut espérer prendre le pouvoir en 2018, c’est de baisser au cours des prochains mois. Plus les attentes sont élevées, et plus il est difficile de les combler. À l’inverse, plus les espoirs sont bas, et plus il est facile de surprendre.


Je ferai, avant la fin de l’année, un petit classement personnel des essais de l’année et de ce qu’il faut surveiller pour 2018.


Qu’en pensez-vous ?


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Simon-Pierre Savard-Tremblay179 articles

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Simon-Pierre Savard-Tremblay est sociologue de formation et enseigne dans cette discipline à l'Université Laval. Blogueur au Journal de Montréal et chroniqueur au journal La Vie agricole, à Radio VM et à CIBL, il est aussi président de Génération nationale, un organisme de réflexion sur l'État-nation. Il est l'auteur de Le souverainisme de province (Boréal, 2014) et de L'État succursale. La démission politique du Québec (VLB Éditeur, 2016).