Meech 3. Quoi qu’on dise…

MEECH - 20 ans plus tard...


Robert Bourassa nage. C’est un exercice auquel il s’astreint quotidiennement, pour garder la forme. C’est aussi une cérémonie. Un rituel qu’il accomplit chaque fois que sa fonction l’oblige à un effort particulier, à une décision difficile. « Dans les moments importants, je vais nager pour dégager l’esprit de la déclaration — comme je ne lis pas de texte écrit. J’improvise d’une certaine façon, dans la forme sinon dans le fond. »
Pour souligner les 20 ans de la mort de l’accord du lac Meech, il me fait plaisir de vous présenter, en feuilleton, des extraits du premier chapitre de mon livre Le Tricheur, qui relate comment les acteurs politiques québécois ont vécu la mort de l’accord.
Les cadres du pouvoir chinois tremblaient dans leurs cols Mao chaque fois que le Grand Timonier se lançait, torse nu, dans le Yangtsé. Sa plongée annonçait invariablement une nouvelle purge, camouflée sous un mouvement de masse. À Québec, ce sont les journalistes qui guettent les baignades du premier ministre, les jours où l’histoire change de paragraphe ou de page. Aujourd’hui, sentant qu’un nouveau chapitre pourrait s’ouvrir, ils sont particulièrement fébriles.
« Quand c’est rendu que les journalistes vous attendent quand vous allez nager ! » peste le premier ministre. Ils font le pied de grue autour de l’immeuble du Club des employés civils, où se trouve la piscine, espérant lui arracher une phrase au passage. Les agents de sécurité font entrer le premier ministre par une porte dérobée. Entre deux longueurs, Bourassa cherche « la » phrase de son discours du soir. La conclusion. La formule choc. Celle qu’on citera longtemps.
Il a accepté l’idée de la proclamation [proposée par ses conseillers]. Il l’aurait peut-être eue tout seul. Maintenant il veut la tourner « de la façon la plus concise et la plus percutante possible, en préservant l’avenir, comme c’était ma responsabilité comme premier ministre ».
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Jean-François Lisée297 articles

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Ministre des relations internationales, de la francophonie et du commerce extérieur.

Il fut pendant 5 ans conseiller des premiers ministres québécois Jacques Parizeau et Lucien Bouchard et un des architectes de la stratégie référendaire qui mena le Québec à moins de 1% de la souveraineté en 1995. Il a écrit plusieurs livres sur la politique québécoise, dont Le Tricheur, sur Robert Bourassa et Dans l’œil de l’aigle, sur la politique américaine face au mouvement indépendantiste, qui lui valut la plus haute distinction littéraire canadienne. En 2000, il publiait Sortie de secours – comment échapper au déclin du Québec qui provoqua un important débat sur la situation et l’avenir politique du Québec. Pendant près de 20 ans il fut journaliste, correspondant à Paris et à Washington pour des médias québécois et français.





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