Tous les partis sont pollués par des trolls insipides, des gens, parfois anonymes, qui, loin d’aider leur cause, y nuisent de façon ostentatoire.
J’ai dénoncé à maintes reprises et sur plusieurs tribunes, le recours à l’anonymat de certains usagers des réseaux sociaux, ces plaideurs quérulents, qui n’ajoutent rien au débat public, et qui ne font que polluer l’atmosphère des uns et des autres.
Le Parti libéral a eu recours (et certains comptes existent encore) à des identités factices sur les réseaux sociaux, créées de toutes pièces, pour attaquer ses adversaires. Et à la CAQ, on se souvient des facéties ridicules de l’employé (ADQ à l'époque) Pierre Morin, et de ces multiples identités.
Tout ça pollue l’air ambiant.
Dans le cas du Parti québécois, il y a cette frange, petite mais très entreprenante, de ce que l’on pourrait appeler les « angry péquistes ». Ces « militants » qui recourent de façon continue à l’invective, au procès d’intention et à l’argumentaire sans cesse teinté de complot de toutes sortes ou toute autre complainte victimaire.
C’est franchement lassant. Pire, cette petite bande produit exactement l’effet inverse qu’on pense qu’elle voudrait; elle éloigne toute personne d’accorder quelque sympathie que ce soit à l’option politique qu’elle entend défendre. Si c’est bien cela son but, évidemment.
Pour le « angry péquiste », tout est la faute de quelqu’un d’autre.
Les merdias, Radio-Canada, La Presse, et le complot fomenté dans une salle obscure quelque part à Sagard; c’est la faute d’autres indépendantistes parfois aussi, pas assez indépendantistes, trop attentistes; c’est la faute de l’invasion musulmane et des migrants illégaux (la pire des stratégies du monde c’est de penser qu’on réussira à faire l’indépendance ou même à fédérer les gens à cette idée en misant sur cet argument, stupide, là) ou encore des islamo-gauchistes; c’est toujours la faute de quelqu’un d’autre.
C*lisse que c’est lourd.
On peut douter du traitement de la nouvelle, on peut ne pas aimer l’angle retenu par un journaliste, un analyste, un chroniqueur. Je le fais souvent moi-même. Un jour, les partisans du PQ n’aimeront pas l’angle de l’analyse de Martine Biron; le lendemain, les partisans du PLQ ou de la CAQ diront la même chose.
J’ai vu au cours des derniers mois des militants QSistes être enragés de la couverture à leur endroit faite par Le Devoir, des militants libéraux être en maudit que leur congrès reçoive si peu d’attention, des militants péquistes déçus que l’on accorde trop d’importance aux chicanes du Bloc et pas assez à leurs propositions, des militants caquistes excédés que l’on accorde trop d’importance à la vague libérale qui frappe leur parti (ok, celle-là, je la prends sur moi!).
Loin d’être un complot, cette dichotomie est PRÉCISÉMENT l’expression d’une saine démocratie par le biais d’un journalisme libre, par le recours à une pluralité d’opinions et d’angle d’analyse.
Au cours des dernières heures, j’ai observé de loin les journalistes Yves-François Blanchet et Patrick Lagacé (je prends large en partant, tsé!) se dépatouiller sur les réseaux sociaux avec quelques « angry péquistes ». C’est franchement déprimant.
J’écrivais la même chose l’hiver dernier quand Guy A. Lepage se faisait haranguer d’être un vendu de colonisé par ces mêmes bougres.
Les indépendantistes ont de la difficulté à trouver des personnalités au profil hypermédiatisé pour défendre leur idéal et ce n’est certainement pas en insultant et vilipendant les rares qui le font qu’on réussira à en recruter davantage. Pire, ça décourage toute personne qui a des sympathies indépendantistes de le faire!
J’en reviens à Blanchet et Lagacé.
Le premier défend quotidiennement, et avec professionnalisme et minutie, de bien habile façon, le point de vue des indépendantistes. Il le fait de façon pertinente, soulève des questions, et affirme sa pensée en partant de l’angle des indépendantistes. C’est utile et précieux. De voir des « indépendantistes » l’insulter et le traiter de tous les noms m’écoeure au plus haut point.
Le second est souvent perçu comme l’étendard de l’Empire rival, celui qu’il faudrait honnir, car il serait un suppôt des forces ennemies. Que c’est ridicule. Je me demande combien de ces « angry péquistes » qui vilipendent constamment Patrick Lagacé ont consulté les entrevues essentielles qu’il a menées avec Pascal Bérubé. Dont celle-ci, à Deux hommes en or, sur l’indépendance, ou pas, de la police au Québec.
Alors que certains étaient bien frileux de parler de corruption, d’indépendance de la justice et de possibles manquements à l’UPAC et au DPCP, Patrick Lagacé a été de ceux qui ont foncé dans l’tas. Et en entrevue, il a su poser les questions essentielles à ses invités, dans l’intérêt supérieur de la population.
Oui, oui. Il l’a fait même dans La Presse.
Avec mes modestes moyens, à l’époque, sur mon blogue ou dans le HuffPost, cela traçait la voie à d’autres pour qu’ils foncent eux aussi. Et Dieu sait que je l’ai fait. Je me fous pas mal de savoir si Lagacé est indépendantiste ou pas. Une chose que je sais par contre c’est que ce journaliste-là a pris des risques, il a posé les questions qu’il fallait, quand il fallait.
Parlez-en à Sam Hamad.
Et c’est précieux ça. Les « angry péquistes » devraient en prendre bonne note. Et cessez de voir des complots partout.
Mais surtout, quitter le champ de la harangue et de l’invective. Apprendre à débattre, sereinement, respectueusement, et accepter la dissidence idéologique. Ça presse.
Et penser à ce qui pourrait créer un environnement idéologique qui donne le gout à d’autres de se joindre aux indépendantistes, aux autres péquistes. À commencer par la promotion du travail de gens comme Yves-François Blanchet justement, mais aussi de députés comme Véronique Hivon, Pascal Bérubé et Stéphane Bergeron par exemple.
Car il y a une fenêtre intéressante pour le PQ en ce moment. Devant lui, deux partis proposent pas mal la même affaire et le PQ a l’avantage de pouvoir se définir de façon claire, en contrepartie de l’héritage libéral et sa succession caquiste.
Pour autant que les « angry péquistes » cessent de nuire un peu.