Les femmes et la politique : Et si le sexe faisait

Des observateurs croient que cela n'a rien à voir

17. Actualité archives 2007



par Drolet, Anne; Mathieu, Isabelle - Bill Clinton deviendra-t-il "premier monsieur" des États-Unis si sa femme, Hillary, est élue présidente ? Verrons-nous bientôt une femme, Ségolène Royal, à la tête de la République française ? Les femmes en politique font jaser ces temps-ci. Ont-elles une approche différente de celle de leurs confrères ? Question complexe. Quoi de mieux que l'étude d'un cas bien de chez nous pour tenter de trouver quelques éléments de réponse.
Depuis novembre 2005, à Québec, la mairesse Andrée Boucher fait face à une chef de l'opposition, Ann Bourget, du Renouveau municipal de Québec. La région vit d'ailleurs une situation rare : à Lévis aussi, deux femmes s'affrontent. Danielle Roy-Marinelli, en poste depuis 2005, donne depuis quelques mois la réplique à Isabelle Demers.
Y a-t-il eu des changements dans la façon de diriger la capitale ?
D'entrée de jeu, les observateurs interrogés par Le Soleil ne croient pas que le sexe des élues aient quoi que ce soit à y voir. "Les différences sont beaucoup plus dues aux personnalités qu'au fait que ce soient des femmes ou des hommes", pense Michel Giroux, maire de Lac-Beauport.
Ce dernier siège au sein de la Communauté métropolitaine de Québec (CMQ), où il côtoie mesdames Boucher, Roy-Marinelli et Bourget. Il y siégeait aussi pendant l'administration précédente. "Je vois autant de différences entre Mme Boucher et Mme Roy-Marinelli que j'en voyais entre M. L'Allier et M. Garon. C'étaient des personnalités, des valeurs, des façons d'approcher les dossiers politiques qui étaient parfois très opposées. Mais ils finissaient par se comprendre et actuellement, on ne peut pas dire qu'on a des conflits à la CMQ."
D'après ce que le groupe Femmes, politique et démocratie a pu observer, les femmes n'ont pas des priorités ou des valeurs différentes des hommes, mais leur approche, elle, l'est souvent. Elles seraient plutôt orientées vers la recherche du consensus, note sa directrice générale, Élaine Hémond. Consensus ? La mairesse ? Évidemment, la personnalité joue pour beaucoup, ajoute Mme Hémond.
Ann Bourget fait valoir que la société attribue davantage les notions de dialogue à la femme qu'à l'homme. C'est la voie qu'elle et Mme Roy-Marinelli ont choisie, dit-elle. Mais il faut éviter les généralisations, avertit-elle. Ces derniers mois, on a eu droit à plusieurs prises de bec à l'hôtel de ville. La mairesse a même déjà fait des allusions à la taille et à la "petite voix" de Mme Bourget.
Les couteaux volent-ils plus bas lorsque c'est entre femmes ? "Je pense que dans les mêmes circonstances, Mme Boucher aurait réagi de la même façon avec un homme devant elle. Elle n'aime pas l'opposition", croit Réjean Pelletier, professeur en sciences politiques à l'Université Laval.
Les femmes seraient aussi souvent perçues comme étant plus émotives que les hommes. Andrée Boucher a notamment parlé à quelques reprises d'enjeux qui touchent "son coeur de mère". "Un homme pourrait être sensibilisé à certaines choses de la même façon, mais ne le dirait pas", pense M. Pelletier. Michel Giroux nuance. "En politique, il y a plein d'hommes émotifs aussi. Des déclarations à l'emporte-pièce, des émotions et des coups de gueule, on en voit, hommes et femmes", lance-t-il.
Et l'image ?
La saga de la robe de la mairesse à Paris a fait couler beau d'encre. Exige-t-on des femmes qu'elles soient plus élégantes que leurs collègues masculins ? Oui, pense Mme Boucher. "Ça fait 40 ans que je travaille avec des hommes, et je peux vous dire que je n'ai pas vu que des Alain Delon dans ma carrière !"
Michel Giroux croit quant à lui qu'un homme qui porterait une "tenue exagérée" aurait reçu le même accueil. M. Pelletier affirme qu'il est vrai que l'on porte plus d'attention à l'habillement d'une femme.
Président-directeur général de la Fondation de l'entrepreneurship et ancien candidat à la tête du RMQ, Régis Labeaume trouve qu'en général, les femmes ont une "intelligence sensible" et sont vraies. Il estime qu'il y a une espèce de "bêtise", de fausseté inhérente à la joute politique que les femmes ont de la difficulté à gérer et qui les en éloigne. "On a toujours le choix des moyens que l'on prend pour faire passer nos idées, tranche Ann Bourget. On n'a pas à entrer dans l'arène."
À quand la parité ? M. Labeaume la prône et pense qu'on devrait obliger les partis politiques à présenter autant de candidates que de candidats. Au RMQ, on évalue régulièrement la question, note Mme Bourget. Mais on n'a pas encore trouvé le moyen de concilier la parité avec le droit des militants de choisir leur représentant.
Une chose est sûre, le nombre de femmes en politique croît. Et la présence de femmes à ces postes-clés ne peut qu'inspirer celles qui hésitent encore à se lancer.
adrolet@lesoleil.com


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