« Alphée » Lafrenière et « Pérée » Charbonneau à l’ouvrage !

Les Écuries de Jean « Augias » Charest

Il y a quelques petites différences, mais …

Chronique de Richard Le Hir


« Dans la mythologie grecque, Augias était le roi d'Élide. [ … ], il possédait un troupeau de plusieurs milliers de boeufs principalement parqués dans des étables qui n'avaient pas été nettoyées depuis plus de trente ans.
Quand même conscient du niveau de saleté de ses étables, il ordonna à Héraclès (Hercule, dans la mythologie romaine), dont ce fut un des douze travaux, de les nettoyer en une journée. Et comme il était persuadé que ce serait impossible, il lui proposa généreusement un dixième de son troupeau en paiement du travail effectué.
Héraclès ne s'embarrassa pas d'un balai et d'une serpillière : il détourna le cours des fleuves Alphée et Pérée pour leur faire traverser les étables et, ainsi, emporter en un instant la bouse et le fumier accumulés depuis si longtemps.
Étonné par le résultat, mais toujours foncièrement malhonnête, Augias refusa de payer Héraclès qui le trucida.
Ceux qui suivent vont me dire : puisqu'il s'agit d'étables, pourquoi parle-t-on des écuries d'Augias ? Eh bien probablement parce que le mot se rapproche de 'curer' mot qui s'utilisait autrefois à la place de 'nettoyer' pour des lieux comme des étables ou pour du bétail
Si l'expression ‘les écuries d'Augias’ seule désigne bien un lieu très sale, lorsqu'on les nettoie, les écuries deviennent au figuré des pratiques abusives ou des personnes critiquables qu'il faut remplacer. »
http://www.expressio.fr/expressions/les-ecuries-d-augias-nettoyer-les-ecuries-d-augias.php

Bon, je vous l’accorde, il y a quelques petites différences entre la mythologique grecque et la réalité québécoise, notamment dans le degré de consentement de Jean « Augias » Charest, mais il n’en existe aucune sur la saleté de ses écuries et sur l’ampleur du ménage qui s’impose.
Et au cours de la semaine qui vient de s’écouler, nous avons assisté aux premiers signes de ce qui s’en vient. Ça ne se fera pas en une journée, ça prendra peut-être même quelques années, mais il semble désormais acquis que le ménage se fera.
C’est l'Unité permanente anticorruption (UPAC) et son escouade « Marteau » qui ont lancé le bal en procédant à l’arrestation de quinze personnes dont le désormais célèbre Tony Accurso et le maire de Mascouche, Richard Marcotte. Au nombre des personnes épinglées figurent également le directeur général de Mascouche, le propriétaire d’une entreprise locale d’excavation, deux ingénieurs à la tête d’une firme de génie-conseil, et un avocat associé dans l’un des plus importants cabinets de Montréal.
[
Les accusations portées contre ces personnes->http://www.cyberpresse.ca/actualites/quebec-canada/justice-et-faits-divers/201204/17/01-4516040-le-systeme-mascouche-demantele.php] sont relatives à des actes de fraude, d’abus de confiance, d’utilisation de documents contrefaits, de complot et de corruption .
La présence d’un avocat d’un grand cabinet parmi les accusés a causé toute une surprise. Jusqu’ici, on avait surtout évoqué la présence dans ces affaires d’ingénieurs, mais toute personne un tant soit peu au fait des pratiques d’affaires se doutait bien que finiraient par apparaître des représentants des professions juridiques, avocats ou notaires, dont les connaissances et les fonctions les placent souvent au cœur de ce genre d’affaires à titre de « facilitateurs ». Et la ligne est parfois bien mince entre le conseil professionnel et la participation à un complot.
Il faut lire à ce sujet le billet d’Yves Boisvert de La Presse, intitulé « Les pros de la corruption » qui annonce rien de moins que des conséquences cataclysmiques pour nos milieux professionnels, car il faut bien comprendre que l’élimination de certaines pratiques affecterait grandement le chiffre d’affaires et la rentabilité de nombreux cabinets, sans compter la rémunération et le niveau de vie de nombreux professionnels.
Il ne faut pas se le cacher, une bonne part de notre prospérité comme société repose sur les activités au noir. Éliminez-les du jour au lendemain, et vous faites disparaître du même coup la moitié des concessionnaires de voitures de luxe au Québec et un nombre important de restaurants, de clubs de golf et de commerces divers qui ne pourraient pas survivre sans la « manne » de l’argent noir. Ne perdez pas de vue que toutes ces entreprises créent des emplois dont la qualité varie de mauvaise à excellente.
Les gouvernements le savent, et ils « tolèrent » ces activités tant que l’opinion publique ne s’en soucie pas. Et lorsqu’ils interviennent, c’est toujours sous la pression de l’opinion publique. Sans cette pression, l’UPAC et la Commission Charbonneau n’auraient jamais vu le jour. Et le degré de résistance du pouvoir à cette pression de l’opinion est toujours fonction de son degré de compromission avec les promoteurs de ces activités. À la clé, le financement des partis politiques, autant la partie déclarée que la partie qui ne l’est pas, et qui, échappant à tout contrôle, est également à la source des plus grands abus.
Plus l’activité au noir augmente dans une société, plus la confusion s’installe dans ces valeurs et plus elle perd ses repères moraux. La situation que nous vivons à l’heure actuelle au Québec où les scandales se multiplient constitue un signe incontestable que la proportion d’activités économiques souterraines dépasse désormais le seuil acceptable.
Mais l’industrie de la construction n’est que la pointe la plus visible de l’iceberg au bas duquel se trouvent toutes les activités criminelles sources d’argent à blanchir, le trafic de la drogue étant la plus lucrative.
Tout cet argent doit être recyclé dans l’économie ouverte, et le développement immobilier et la construction constituent les circuits les plus faciles en raison de l’importance des capitaux requis, du peu de contrôle sur ces activités, et de l’importance de la chaîne d’intéressement depuis le promoteur de projet, les architectes et les ingénieurs pour les plans, les notaires et avocats pour les contrats, les banques pour le financement, les entrepreneurs, les acheteurs, les municipalités pour les permis de construire et les revenus de taxe, et ainsi de suite jusqu’aux marchands de meubles et aux déménageurs.
Avec autant de parties intéressées et pressées de partager la manne, on comprend facilement que les enquêtes et les remises en question aient été si longues à venir. Mais maintenant que nous savons que l’UPAC a dix-sept dossiers ouverts dont quatre sont susceptibles de donner lieu à des arrestations d’un jour à l’autre, et que la Commission Charbonneau tiendra bientôt ses premières audiences publiques, il serait temps que le gouvernement nous laisse savoir comment il compte empêcher que notre économie ne fige complètement lorsque les enquêtes sur nos mœurs politiques et certains liens « incestueux » commenceront à faire sentir leurs effets.
Quand je dis gouvernement, je ne pense évidemment pas au gouvernement de Jean « Augias » Charest. Ce serait demander au pyromane d’éteindre le feu qu’il a lui-même allumé. Je ne pense pas non plus à la CAQ qui n’est qu’une tentative de « repackager » le PLQ en s’appuyant sur les mêmes réseaux. Mais au fait, à quel parti pouvons-nous vraiment faire confiance pour « moraliser » nos mœurs sans étouffer notre économie ? Le PQ prétendait autrefois à ce rôle, mais il a cafouillé en cours de route. Est-il aujourd’hui digne de confiance ?


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3 commentaires

  • Michel Tétrault Répondre

    25 avril 2012

    On parle de crimes commis contre la société, contre nous tous. Un cancer qui ronge les aspirations d'une nation jumelé d'une intention de dépossession et d'appauvrissement.
    Jean Charest cache ces crimes derrière l'idéologie perverse que la fin justifie les moyens. Une sorte de Mensonge Honorable où l'histoire le blanchirait pour avoir combattu les méchants séparatistes et sauvé le Canada.
    Depuis son début de carrière il a prouvé à maint reprises qu'il est un récidiviste incurable, sans moral. Un p'tit "King".
    Le Québec, doublement ciblé, par le fédéralisme et par la mondialisation, est sous attaque comme le reste de la planète. C'est triste à dire mais 223 ans après la révolution française il serait peut-être nécessaire de sortir la guillotine des boules à mites et laisser aux peuples décider du sort de ces gens qui attaquent l'humanité.
    http://www.çavafaire.com/humain.jpg

  • Henri Marineau Répondre

    23 avril 2012

    Grâce à l’infiltration d’un agent civil en mission secrète au cœur du « système Mascouche », l’escouade Marteau a pu procéder le 17 avril à l’arrestation du magnat de la construction Tony Accurso et relier le maire Richard Marcotte à son vaste stratagème de corruption. En tout, les policiers du bras armé de l’Unité permanente anti-corruption (UPAC) ont exécuté huit perquisitions et émis quatorze mandats d’arrêt dans le cadre de l’opération Gravier. Parmi eux, se retrouve Louis-Georges Boudreault, ex-organisateur du PLQ dans l’Est-du-Québec et collecteur de fonds.
    Une brochette de finauds magouilleurs qui ont su habilement profité d’un système laxiste et de dirigeants municipaux et provinciaux sans scrupule, dilapidant à outrance les impôts des contribuables québécois au profit de leurs goussets personnels ou de leurs ambitions politiques bassement carriéristes.
    Des accusations qui visent des motifs aussi variés que la fraude, la corruption, le complot, l’abus de confiance, l’utilisation de documents contrefaits jusqu’aux versements de pots-de-vin, communément appelés « récompenses », en contrepartie de l’obtention de contrats. Un système corrompu jusqu’à la moelle et dont nous ne percevons que l’os attaqué, lequel ressortira dans toute sa gangrène lorsque la commission Charbonneau en montrera tous les méfaits dévastateurs.
    En attendant, Jean Charest, passé maître dans l’art de la diversion, prépare le terrain pour sa campagne électorale en avançant comme arguments « positifs » à son gouvernement les « avantages » de son Plan Nord, la création de la commission Charbonneau pour pallier la corruption dans l’industrie de la construction et sa ligne dure devant la « juste part » que doivent assumer les étudiants à travers sa décision de maintenir la hausse des droits de scolarité.

  • Henri Marineau Répondre

    23 avril 2012

    Vous demandez:
    "Le PQ prétendait autrefois à ce rôle, mais il a cafouillé en cours de route. Est-il aujourd’hui digne de confiance ?"
    Il me semble que le simple fait que vous posiez la question nous amène à la réponse!..­.
    À mon sens, le seul qui peut "nettoyer les écuries D'Augias", c'est Jean-Martin Aussant...Qu'en pensez-vous, M. Le Hir?