Les Canadiens sont... là!

Le matériel pédagogique utilisé par enseigner aux élèves devrait être la responsabilité exclusive du ministère de l'Éducation.

Sports et politique


L'idée était brillante. Du matériel pédagogique préparé par le Canadien de Montréal, en collaboration avec un éditeur scolaire, et offert gratuitement aux enseignants du Québec. Les fascicules avaient été lancés en novembre 2007 pour souligner le centenaire du club. Ils ne seront plus disponibles l'an prochain, assure la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne.

Le matériel en question est actuellement utilisé dans des centaines d'écoles dans la province. L'opération marketing, car c'est de cela qu'il s'agit, permettait de mousser la popularité du club de hockey tout en motivant les élèves (en particulier les petits garçons) à faire des opérations compliquées en calculant la moyenne de Carey Price ou le salaire d'Alex Kovalev...


N'en déplaise aux admirateurs, le Canadien n'est pas une oeuvre de bienfaisance. C'est une entreprise qui cherche à faire des profits, à vendre des billets au Centre Bell (dont le nom apparaît sur les feuilles d'exercices avec le logo du Canadien) ainsi que des objets promotionnels assez dispendieux.
Or centenaire ou pas, la promotion n'a pas sa place dans une salle de classe.
Le Canadien cherche à bâtir le public de demain, c'est normal. Sa campagne de marketing vise les jeunes, ce qui est tout à fait légitime. Cela dit, le club de hockey dispose de suffisamment de moyens de communication pour se faire connaître et aimer des fans. L'école devrait être préservée des assauts publicitaires, quels qu'ils soient. Les enfants sont constamment assaillis par la publicité, à la télévision ou dans l'internet. Est-ce trop demander que la salle de classe demeure un lieu neutre?
Bien sûr, le fameux club est une institution qui incarne de belles valeurs et qui fait la promotion du sport. Mais il ne s'agit pas de la seule entreprise qui véhicule des valeurs positives. Il y en a d'autres et elles rêvent sans doute, elles aussi, de s'immiscer dans les salles de classe. Où trace-t-on la ligne?
L'équipe de hockey, entend-on depuis 24 heures, est une entreprise qui s'implique dans sa communauté et investit pour les jeunes. C'est vrai. McDonald's aussi s'implique dans sa communauté et auprès des jeunes. Laisserait-on entrer le fabricant de hamburgers dans les écoles pour autant?
Récemment, le Canadien a inauguré une patinoire dans Saint-Michel, un des quartiers les plus défavorisés de Montréal. C'est le genre d'engagement, admirable, qu'on attend d'un club sportif. Si le Canadien veut s'engager davantage dans l'éducation des jeunes québécois, qu'il fasse un don à la fondation pour l'alphabétisation ou encore, qu'il offre une somme d'argent à des écoles.
Le matériel pédagogique utilisé par enseigner aux élèves devrait être la responsabilité exclusive du ministère de l'Éducation. De plus, sans nier le jugement professionnel des enseignants, le Ministère pourrait très bien interdire l'utilisation de tout matériel publicitaire. Ce n'est pas un geste abusif, c'est un geste responsable. Dans ce cas-ci, l'attitude de la ministre a été décevante. Elle aurait dû être la gardienne de l'école et ne pas céder aux pressions extérieures, aussi emballantes soient-elles. Or non seulement a-t-elle accepté l'idée, elle l'a subventionnée. La porte est désormais ouverte. Pourra-t-elle la refermer?
nathalie.collard@lapresse.ca


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