Les anglophones demeurent champions des gros salaires

On attend toujours la réplique de Jedwab...


Le recensement de 2006 indique, au Québec, un revenu d'emploi moyen de 36 857$ pour les anglophones, langue maternelle, contre 32 824 $ pour les francophones, soit un net avantage de 4000 $ au profit des anglophones.
La nouvelle se répand selon laquelle les Québécois francophones auraient aujourd'hui un niveau de revenu supérieur à celui des anglophones. Il s'agit d'une information douteuse fondée sur l'analyse d'une enquête menée par Léger Marketing pour le compte du Quebec Community Groups Network et de l'Association d'études canadiennes, et portant sur les perceptions des Québécois quant à savoir qui gagne, en moyenne, le plus gros revenu.
Jack Jedwab, directeur de ladite association, et Christian Bourque, vice-président de Léger Marketing, ont comparé les résultats de leur enquête aux données du recensement de 2006. Le 3 mai dernier, ils ont diffusé les conclusions de leur analyse sous le titre accrocheur de «Busting the Myth that Quebec Anglophones Earn More than Francophones».
Plusieurs médias ont reproduit leurs conclusions sans recul critique. La Presse reprenait une dépêche de l'agence France-Presse intitulée «Québec: les francophones gagnent plus d'argent, sans le savoir». Le Devoir titrait : «Les mieux rémunérés au Québec ne sont plus ceux que l'on croit ». «Anglo Salary Fallacy Persists: Poll», claironnait The Gazette à la une.
Faux. Le recensement de 2006 le confirme: par tête de pipe, nos Anglos gagnent toujours plus. S'appuyant sur l'analyse de Jedwab et Bourque, Le Devoir précisait néanmoins que le «dernier recensement fédéral [...] établit à 26 388$ et 24 617$ respectivement le revenu d'emploi médian pour les deux groupes.» Le hic, c'est que pour comparer des revenus, la statistique la plus courante n'est pas la médiane mais la moyenne.
The Gazette a développé la nouvelle de manière encore plus risquée. «C'est un fait: si vous êtes de langue maternelle française, vous gagnez 2000$ par année de plus, en moyenne [sic], qu'un Québécois d'expression anglaise.» [Traduction libre]
À la décharge des médias, notons que dans leur analyse, Jedwab et Bourque ont affirmé avoir comparé les perceptions des répondants à leur enquête touchant, rappelons-le, le revenu gagné «en moyenne», aux données du recensement de 2006 sur le revenu «médian», sous prétexte que «les autres données de 2006 sur le revenu révèlent à peu près la même chose».
La vérité est tout autre. Le recensement de 2006 indique, au Québec, un revenu d'emploi moyen de 36 857$ pour les anglophones, langue maternelle, contre 32 824$ pour les francophones, soit un net avantage de 4000$ au profit des anglophones. Il est par conséquent tout à fait inacceptable de prétendre que «les autres données de 2006 sur le revenu révèlent à peu près la même chose» que la médiane.
Il aurait été facile pour un journaliste de vérifier les dires de Jedwab et Bourque. Les données pertinentes de 2006 sur les revenus médian et moyen figurent sur deux lignes consécutives d'un même tableau, disponible à tout venant sur le site de Statistique Canada. Le même tableau précise par ailleurs que l'avantage des francophones quant au revenu médian se limite aux emplois précaires, saisonniers, à temps partiel, etc.
En effet, parmi les travailleurs qui ont oeuvré toute l'année à plein temps, l'avantage va aux anglophones aussi bien en ce qui concerne le revenu médian (1800$ de plus que celui des francophones) que le revenu moyen (9300$ de plus). Les francophones ne s'en tirent mieux et ce, uniquement du point de vue du revenu médian, que parmi ceux qui ont travaillé seulement une partie de l'année ou à temps partiel.
Les faits sont têtus: nos Anglos demeurent champions des gros salaires.
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Charles Castonguay, professeur à la retraite
Université d'Ottawa


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