Le saccage de notre système de santé.

Tribune libre

Il est surprenant, et je suis poli, que Le Protecteur du citoyen & le ministre de la Santé M.Hébert constatent (comme si c'était une grande réalisation) que notre système de la santé, dit à deux vitesses, avec sa privatisation partielle, fait en sorte que certain (e)s citoyen (ne)s peuvent se prévaloir, de par leur distinction de fortune (vocabulaire utilisé dans la Déclaration universelle des droits de l’homme), d’un accès privilégié (par rapport à d’autres citoyen(ne)s) à des soins .
Commentons les citations de la protectrice du citoyen, Mme Raymonde Saint-Germain & M. Hébert.
Le Protecteur du citoyen.
« Les citoyens qui bénéficient d'une assurance privée ou de revenus suffisants peuvent s'offrir des services plus rapides en clinique privée. Les autres doivent attendre l'accès au régime public, ce qui peut être au détriment de leur état de santé ».
Commentaire : Comment peut-on (ou a-t-on pu) imaginer qu’il en soit autrement!
Les délais d'attente sont bien souvent très longs. « C'est de plus en plus ce qui se fait. La question qui se pose, c'est: est-ce que c'est ce que l'on souhaite »?
Commentaire : La réponse est évidente, non!
À mon avis, il faut prendre les moyens pour rendre le régime accessible à tous, ce qui n'exclut pas le privé ».
Commentaire :.Mme Saint-Germain n’expliquant pas comment le privé pourrait rendre les soins plus accessibles m’oblige à qualifier son affirmation comme simplement diplomatique, politique, accommodante et conciliante sans fondement objectif.
« Dans la mesure où le privé peut avoir un apport positif sur l'accessibilité des services selon la priorité santé et pour tous, c'est effectivement souhaitable.
Commentaire : idem au précédent.
Mais ce qu'on constate présentement, c'est le double avantage de la carte d'assurance maladie et de la carte de crédit. À mon avis, ce n'est pas acceptable. Alors, il faut se poser des questions sur les fondements du système ».
Commentaire : Encore là, comment peut-on imaginer qu’il est soit autrement!
Cette médecine à deux vitesses remet en question le principe selon lequel les soins sont donnés d'abord à ceux qui en ont le plus besoin en fonction de leur état de santé, « sans égard à leur capacité de payer ». Les valeurs d'universalité et d'équité inscrite dans la Loi sur l'assurance maladie sont également bafouées, selon Mme Saint-Germain.
Commentaire : Cet argument a été mis à l’avant-scène dès les premiers signes de privatisation du système de la santé. Rappelons que la privatisation du système s'est faite de façon « sous-marine, » sans égard aux lois, aux yeux de nos élus libéraux, qui volontairement ont fait en sorte que la privatisation atteigne un point de non-retour.
Parmi les services au coeur de la médecine à deux vitesses, il y a la physiothérapie, l'audiologie, l'orthophonie et la coloscopie. « En radiologie, des gens se font dire: vous avez une masse à tel endroit, c'est possiblement cancéreux. À l'hôpital, c'est trois ou quatre mois avant d'avoir la radiologue, mais à la clinique d'en face, c'est 24 heures, 48 heures, deux semaines. Il y a même des gens qui vont, et on le comprend, prendre les moyens et y aller. C'est ce qui s'installe et qu'on ne doit pas laisser aller sans régir ce qui se passe. C'est ça qui est vraiment important », a dit Mme Saint-Germain.
Commentaire : À cette situation tellement injuste, on comprend que quelqu’un qui a les moyens économiques les utilise pour se faire soigner. Mais n’est-il pas difficile d’accepter qu’un médecin, pour des raisons économiques, soigne quelqu’un avant un autre qui a un besoin plus urgent! La privatisation du système de la santé fait de nos médecins des hommes d’affaires.
Les services du système public sont souvent « théoriquement » à la disposition de la population, mais en réalité, les délais « réduisent l'accessibilité ». Ce phénomène contribue au développement de la médecine à deux vitesses, selon la protectrice du citoyen.
Commentaire : À cela j’ajouterais, et au bénéfice du privé. Il faut alors se demander quel est l’avantage pour le secteur privé de contribuer "honnêtement" à réduire l’accessibilité. N’est-il pas en conflit d’intérêts!
Le ministre Hébert
Il y a un problème « inacceptable » de médecine à deux vitesses au Québec et il faut le régler.
Commentaire : Faut-il attendre un rapport pour réaliser cette désolante situation, qui est inévitable de par sa conception. Voilà un exemple de ce que la classe moyenne ne voulait pas, mais que notre élite (politique, économique, intellectuelle, scientifique, professionnelle) a réussi, en accélérer, à implanter de façon unilatérale
et ... bien orchestrée. Quelle tristesse.
Selon lui, l'accès au système de santé doit être déterminé par la carte d'assurance-maladie et la priorité clinique, et non par ce qu'on a « dans ses poches ou dans son compte de banque ».
Commentaire : Voyons si les actions seront à la hauteur des paroles.
Le journaliste : Il a été très prudent sur les causes de l'émergence de la médecine à deux vitesses, évitant une réplique partisane qui aurait fait porter le blâme au précédent gouvernement libéral, qui a balisé et limité le recours aux cliniques privées.
Commentaire : La cause est pourtant simple : de penser que la privatisation contribue à améliorer le système de la santé est une illusion véhiculée par les tenants de la privatisation. Clairement elle est sans fondement : comment imaginer augmenter les services de santé sans augmenter les ressources (humaines, technologiques…) à la base du système?
De l'avis du Dr Hébert, ce sont les « déficiences du système public » qui expliquent les problèmes d'accès. Si on améliore l'accès en radiologie, en première ligne et à certains services comme la coloscopie, le système public sera plus performant, et le recours aux cliniques privées sera superflu, a-t-il détaillé.
Commentaire : Alors, pourquoi ne pas « déprivatiser » le système de la santé?
Le journaliste : le ministre a tourné les talons quand il a été questionné sur la responsabilité du gouvernement libéral précédent.
Auparavant, il a fait ressortir que son plan dévoilé dimanche s'attaquait précisément aux problèmes d'accès à la première ligne soulevés dans le rapport du Protecteur du citoyen.
En vertu du plan péquiste, 750 000 Québécois de plus auront accès à un médecin de famille d'ici à deux ans.
Commentaire : Avec ce rappel M. Hébert évite le fond de la question et les autres conséquences de la privatisation du régime :
• Donner accès à un médecin pour 750,000 Québécois c'est excellent, mais ce n'est pas cela qui éliminera le système à deux vitesses, l'injustice qui l’accompagne & l'escalade des coûts évidente engendrée par une compétition non comparable. M. Hébert essai t-il de « légitimiser » la privatisation du système de santé?
• Et les autres problèmes que crée la privatisation du régime de santé, M. Hébert n’en parle pas : les impacts de la compétitivité sur les salaires, les services à haute rentabilité (chirurgie d’un jour…), répétitifs, en forte demande que le privé s’accapare, délaissant les services & les soins à coûts élevés, les grandes infrastructures (les hôpitaux..), les recherches, le coût de formation des infirmières... au secteur public.
Conclusion
Je crois qu’il n’est pas trop tard pour « déprivatiser » notre système de santé. Par contre, mon interprétation des commentaires fluides, sans conviction du ministre M. Hébert me porte à croire que cela n’est pas son intention. L’énoncé général sur l’aspect public-privé du système de la santé du programme du PQ laisse une grande place aux nuances et au lobbying du privé :
« Pour préserver un système de santé publique universel, performant, accessible et qui offre des services de qualité, le Québec devra relever plusieurs défis importants au cours des prochaines années et il doit être clair que la solution passe par une efficacité accrue et une consolidation des services publics et non par un recours au privé. Le tout, en évitant le recours aux mesures coûteuses que sont l’achat de services à des centres médicaux spécialisés privés, aux agences privées de placement de personnel, aux partenariats public-privé et à la sous-traitance ».
Il faut également noter que le programme du PQ ne comprend pas d’action concrète relativement à son énoncé général sur la préservation du caractère public du système de la santé.
Le programme de Québec Solidaire est par contre plus clair sur le sujet :
"des mesures concrètes pour mettre fin à la privatisation dans le système de santé".
De côté de la CAQ, il propose de faire des tests pour évaluer la contribution du secteur privé. À mon avis voilà une grande porte aux interminables évaluations biaisées, nuancées et au lobbying du privé. Une telle approche ne fera que complexifier le système, et offrir une multitude d’échappatoires au privé.
Option nationale souhaite réaffirmer le caractère public et universel du système de santé québécois. La participation du secteur privé sera limitée. Voilà une ouverture inquiétante.
Le Parti Québécois a une belle opportunité pour démontrer son engagement aux valeurs que sont l'universalité et d'équité aux soins de santé et d'affirmer concrètement ce qui le différencie du PLQ. Ces valeurs sont chères & personnelles aux Québécois. Cela fait partie de notre culture. Le PQ devrait défendre ses valeurs avec la même énergie et détermination qu’il a pour la langue.

Par manque de courage et de conviction, le PQ pourrait, tout en laissant croire à l’universalité, règlementer le secteur privé. Cela ne ferait que complexifier un système déjà complexe. Cette nouvelle complexité offrira des échappatoires légales, mais injustes. Si la trajectoire la privatisation n’est pas changée rapidement, nous atteindrons un point de non-retour. C’est là un héritage que le PQ ne peut nous laisser.
Michel Aubin
Cultivateur
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