Le rôle nécessaire du Bloc

L'indépendance se fera partout où nous serons

Tribune libre

Dans cet article, je réfute l’idée largement répandue selon laquelle le Bloc n’a plus sa place, puisque « l’indépendance ne se fera pas à Ottawa, mais à Québec ». Je montre, entre autres, que l’élection de 40 députés du Bloc permettrait de récupérer du fédéral une quinzaine de millions de dollars par année, soutenant ainsi, directement et indirectement, le mouvement indépendantiste.

Les premiers à remettre en cause la pertinence du Bloc Québécois sont le plus souvent nos adversaires provincialistes. Ils prennent un malin plaisir à le faire, puisqu’ils savent, eux, à quel point une députation forte du Bloc peut contribuer au succès du mouvement indépendantiste. C’est ce que je chercherai à montrer ici.

Du côté indépendantiste, on a fini par se laisser raconter, de guerre lasse, que l’indépendance ne se ferait pas à Ottawa. On oublie probablement que le Québec se trouve à Ottawa bien malgré lui. Nous y envoyons quelque 45 milliards de dollars par année en impôts. Cet argent, c’est nous.

Jacques Parizeau s’est déjà vanté sans malice d’avoir passé sa vie à utiliser des fonds publics pour faire la promotion de l’indépendance. En disant cela, il répondait aux hésitations timorées de ceux qui craignent encore, dans les partis souverainistes, de s’engager à faire la promotion de l’indépendance nationale en mobilisant l’appareil d’État. À y regarder de plus près, on constate que le mot de Parizeau ne pouvait tomber mieux. En effet, le gouvernement fédéral dépense une fortune pour faire la promotion du « fédéralisme ». Pensons seulement aux 332 millions de dollars qui sont disparus pendant le scandale des commandites. Ou encore, au budget de près d’un milliard par année de la SRC, dont la mission avouée est de « promouvoir l’unité canadienne ». Sans oublier les chaires de recherche du Canada, qui ont pour effet de museler la recherche universitaire qui pourrait apporter de l’eau au moulin du discours indépendantiste. Il existe bien d’autres exemples.

Là où le Bloc peut se montrer le plus efficace, c’est en utilisant la multitude de ressources dévolues aux élus fédéraux pour faire le pont entre la défense des intérêts du Québec et la défense de sa souveraineté nationale, qui sont en fait la même chose. L’avantage considérable dont jouit le Bloc à cet égard, c’est qu’il ne gouvernera jamais. L’intégrité de son image et la cohérence de son discours risquent moins de pâtir des choix déchirants qu’imposent aux partis provinciaux la gestion quotidienne des affaires. Cela lui offre en prime l’occasion de rassembler plus facilement divers indépendantistes, et de faire du parti un véhicule exemplaire de la démocratie militante.

Concrètement donc, qu’est-ce que le Bloc peut apporter au mouvement indépendantiste ? Premièrement, il faut savoir que le CRTC impose aux bulletins de nouvelles des grands diffuseurs des règles d’équilibre dans la couverture de la politique. L’espace accordé à une formation politique doit refléter son poids électoral réel. Les votes pour le Bloc obligent donc les médias à consacrer du temps d’antenne au discours indépendantiste : il suffit de s’en servir le plus adroitement possible.

Puis il y a l’argent, nerf de la guerre en politique. Le gouvernement canadian subventionne la députation d’un parti politique, et assure une partie de son financement.

Les budgets parlementaires

En faisant élire 12 députés, le Bloc gagnerait 1 681 858 $ en budgets parlementaires annuels de toute sorte. S’il en faisait élire 40, le montant grimperait à 3 746 489 $. Ces sommes, bien entendu, doivent être dépensées en suivant certaines règles de rigueur et d’éthique. Il s’agit quand même de montants considérables qui permettent à une multitude d’employés à temps plein de libérer les députés et les militants d’une quantité de tâches et de se concentrer sur les relations avec les citoyens. Notons qu’il faut élire au moins 12 députés pour avoir droit à ces subventions.

Les allocations aux députés

Chaque député dispose d’un budget annuel de 284 700 $. Ce budget lui permet de maintenir un lien direct avec la population, d’embaucher des aides et d’assurer la présence d’un discours indépendantiste à l’échelle locale. Avec 12 députés, le Bloc récolterait donc 3 416 400 $ de plus. Avec 40 députés, la somme s’élèverait à 11 388 000 $.

Les contributions politiques

Le gouvernement canadian offre un crédit d’impôt couvrant 75 p. cent du montant d’une contribution politique. Si vous donnez 100 $ au Bloc, vous ne déboursez en réalité que 25 $. Le fédéral vous en remet 75. Par son existence, donc, le Bloc oblige le gouvernement canadian à financer le mouvement indépendantiste !

Devant ces chiffres, il ne faut donc pas se surprendre que les provincialistes passent leur temps à remettre en cause la pertinence du Bloc. Ils le font si bien qu’ils arrivent à convaincre même les indépendantistes. « L’indépendance ne se fera pas à Ottawa. » Combien de fois entendrons nous encore ce malheureux malentendu ? Il importe, premièrement, de comprendre l’importance des sommes en jeu. Il faut, ensuite, se libérer de cette attitude craintive qui hésite à parler ouvertement de l’utilisation des fonds publics pour promouvoir l’indépendance. C’est ce que toutes les nations normales font. Pensons seulement à Stephen Harper qui claironne sur toute les tribunes son intention de dépenser une dizaine de milliards afin de « protéger la souveraineté canadienne sur l’Arctique. » Tant que nous n’apprendrons pas à être aussi souverainistes que nos voisins canadian, ils se feront un grand plaisir de demeurer nos suzerains.


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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    26 septembre 2014

    @M. Allinger:
    "N’y a-t-il pas un 2$ accordé pour chaque vote ?"
    Ce financement public prendra fin le 1er Avril 2015: http://fr.wikipedia.org/wiki/Financement_des_partis_politiques_au_Canada
    Je cite: "Malgré l'opposition de tous les autres partis, l'élimination graduelle de cette allocation est votée avec l'adoption de la loi C-13 en décembre 2011. Le montant accordé par vote commencera à diminuer le 1er avril 2012 et sera complètement éliminé après le 1er avril 2015".

  • François A. Lachapelle Répondre

    26 septembre 2014

    Excellente démonstration de Philippe Cloutier de la nécessaire présence du Bloc québécois sur la scène politique fédérale. Il ne faut surtout pas répéter la grave erreur du Parti québécois à l'élection du 7 avril 2014 de ne pas présenter un candidat dans le comté de Lapinière. Tout le terrain doit être occupé.
    En plus de rappeler qu'il faut détricoter un mot d'ordre "fédéraliste" à savoir que "l'indépendance de se fera pas à Ottawa", il explique que l'argent du fédéral doit être utilisé pour promouvoir l'avènement du Pays du Québec. Concernant la présence du Bloc québécois à Ottawa, cela correspond à l'avant-garde de la future équipe de diplomates québécois à l'oeuvre dans le monde dont à Ottawa.
    En sous-titre, "l'indépendance se fera partout où nous serons" est très vrai. Puisque que chaque vote compte et qu'un vote peut départager le ou la député éluE, il faut présenter des candidats partout au Québec et même choisir des comtés hors-Québec où des francophones pourraient voter pour le Bloc.

  • Archives de Vigile Répondre

    23 septembre 2014

    À la santé des Citoyens du Québec, du Bloc et de son Chef !
    Nous, Citoyens !
    Hasardeux de s’exprimer, de s’exposer à la critique, de présenter ses idées, de « vivre sa liberté publiquement ». Que se cache-t-il au juste derrière l’engagement politique? Une conviction profonde et la volonté de contribuer à l’émancipation de notre collectivité, ou un tremplin pour accéder à une aristocratie corrompue qui paralyse nos institutions démocratiques et détourne notre patrimoine loin de nos intérêts collectifs.
    Lorsque j’ai renouvelé ma carte du Bloc Québécois pour 12 mois en avril dernier, je ne savais pas à quel point cette adhésion marquerait mon engagement citoyen et stimulerait mon intérêt à servir plus adéquatement notre collectivité.
    En janvier 2014, se tenaient à Sherbrooke les « États généraux » sur le statut politique du Québec. À cette occasion, j’ai acquis la conviction profonde que l’avenir du peuple québécois se fragilise à mesure que les gouvernements du Québec et du Canada se succèdent. La publication prochaine du rapport de notre ami Sébastien Ricard en fait clairement la démonstration.
    En plein cœur de cet hiver 2014, les rumeurs d’élection au Québec sont dans l’air. Une multitude de décisions et d’actions du gouvernement de Stephen Harper hypothèquent dangereusement la vitalité des régions du Québec et son identité. J’étais profondément indigné! (J’y reviendrai…)
    Au cœur de la tourmente, j’ai approché Gilbert Paquette pour lui demander de se présenter à la tête du Bloc. Fort de ses nombreuses expériences politiques et de la vision qu’il a peaufinée au fil des ans, je voyais en ce patriote, l’homme de la situation. Il m’apparaît évident qu’il nous invite à conquérir pacifiquement ce qui nous appartient de droit.
    La souveraineté du peuple étant le fondement d’une démocratie, il est essentiel que la population en prenne conscience et qu’elle exerce son pouvoir. L’affirmation de notre souveraineté est un projet rassembleur, intergénérationnel et interethnique, rempli d’espoir pour tous les occupants du territoire québécois.
    Aujourd’hui, il me semble évident que les 18-35 ans veulent à leur tour plus de liberté, mais je crois que ce qu’ils veulent surtout, c’est une véritable DÉMOCRATIE. Cette génération s’emploie à chercher la cause des causes de l’enlisement politique et social qui gangrène notre nation depuis trop longtemps. Désolé de vous le dire, suite à la Révolution tranquille, les 40-55 ans n’ont pas su porter le flambeau de l’affirmation nationale.
    Cette fin de semaine, l’événement « destiNation » a révélé que nos aspirations individuelles concordent avec notre désir collectif de liberté.
    Les Ateliers Constituants « des Québecs » (ACQ) offrent une occasion exceptionnelle de retisser les liens entre les générations, les communautés culturelles et les Premières Nations en définissant ensemble nos valeurs communes.
    Il appartient aux citoyens d’établir le fondement législatif de notre société à venir. Cet engagement citoyen est la clef de notre accomplissement collectif.
    Le temps est maintenant venu d’inviter les citoyens de toutes allégeances de se joindre à nous.
    Merci de faire circuler sur tous les murs et de partager ce document à vos réseaux !
    Au Bloc et à son Chef !
    Personnellement, lorsque je regarde et que je constate la duplicité de certaines personnes qui gravitent encore près des postes de pouvoir, je peux affirmer que le carriérisme en politique est une des principales causes du marasme économique et identitaire dans lequel le Québec s’enlise.
    La structure politique imposée depuis des siècles aux Québécois n’a rien de démocratique et conduit notre collectivité, son patrimoine et son territoire à l’effritement. Politiciens et politiciennes de carrière n’avez-vous pas entendu les leaders du printemps 2012, ces jeunes qui veulent embrasser le Nouveau monde?
    Les principes du gouvernement représentatif imposé depuis 1867 au détriment du peuple québécois favorisent l’opportunisme, le carriérisme, l’égoïsme et corrompt les mieux intentionnés. Les vices de ce système de représentation infecte affectent la préservation du bien commun et atomisent nos communautés.
    Dans cet esprit, je garde l’espoir que Mario Beaulieu exercera le leadership indispensable pour faire du Bloc Québécois le fer de lance de notre réforme démocratique. Mais, il appartient d’abord et avant tout aux Québécoises et aux Québécois de tous les horizons d’en prendre conscience et d’exercer leur citoyenneté. Le temps d’agir comme simple électeur est révolu.
    Il est à mon sens primordial que les députés du nouveau Bloc Québécois soient redevables à leurs bases militantes ainsi qu’à leur programme afin d’enclencher cette évolution démocratique.
    J’invite de ce fait, le chef du Bloc, à actualiser les points 5 et 7 de l’ébauche originale qui a mené à la création de son parti et à prendre part aux Ateliers Constituants «des Québecs» à titre de citoyens engagés.
    « 5. Les députés du Bloc Québécois ne sont pas astreints à une discipline de parti et ils exercent d’une façon libre leur droit de vote à la Chambre des communes.
    7. Dans tous les cas nous respecterons et appliquerons intégralement les principes fondamentaux de démocratie, d’équité et de responsabilité sociale. Nous lutterons contre la discrimination sous toutes ses formes, tout en affirmant un préjugé favorable envers les personnes les plus démunies de notre société. »
    Pour en savoir plus sur les Ateliers Constituants « des Québecs » (ACQ) :
    https://www.facebook.com/pages/ACQ/1474240872852481?fref=ts
    Avant de « cocher oui ou cocher non », nous devons d’abord nous entendre sur la voie à suivre pour arriver à destiNation. La souveraineté du peuple constitue le fondement de la Nation.
    Levons-nous ensemble pour vivre une authentique démocratie!
    Alain M. Bergeron en collaboration avec Danielle Gagnon et Daniel Charrette Militants et Citoyens constituants à l’Assemblée constituante provisoire du Québec
    (ACQ) https://www.facebook.com/ConstituanteQuebec

  • Stefan Allinger Répondre

    23 septembre 2014

    N'y a-t-il pas un 2$ accordé pour chaque vote?
    Que pensez-vous de la stratégie voulant que le Bloc présente des candidats partout au Canada?
    Des milliers de québécois habitent hors-Québec et plusieurs canadiens anglais souhaitent le départ du Québec. Ceux-ci feraient augmenter le pourcentage de vote et le financement accordé.
    Le Bloc peut surprendre et offrir un visage nouveau aux canadiens. Pourquoi ne pas occuper tout le terrain?
    Je me propose comme candidat à Vancouver.