Le 8 mars, Journée internationale des droits de la femme, le prestigieux New York Times n’a rien trouvé de mieux pour illustrer la terrible oppression des femmes que de donner la parole à quatre femmes qui sont « victimes » de la vilaine, vilaine loi 21.
Le reporter du NYTimes au Québec, Dan Bilefsky, ne donne la parole qu’à une personne en faveur de la loi 21 alors qu’en théorie un reportage devrait présenter les deux côtés d’une polémique.
Trois lignes seulement pour donner la parole à Radhia Ben Amor, coordonnatrice de recherche, à l’université de Montréal, qui affirme qu’elle a quitté la Tunisie pour vivre dans un pays plus laïc. « Je ne me sentirais pas confortable d’être face à une juge ou une avocat en cour qui porterait le hijab parce que je m’inquièterais de leur neutralité ».
C’est tout.
Monsieur Bilefsky écrit : "Some feminists in Quebec support the ban, arguing that keeping religion out of public life can help further women’s rights." Mais il n'interviewe aucune de ces féministes !Il ne donne pas la parole à des femmes de l’AQNAL , pas de micro tendu à PDF, ni aucun organisme regroupant des femmes qui sont en faveur de la loi 21.
Par contre, quatre témoignages très « human interest » avec des femmes qui se disent victimes de la loi... sans qu’à aucun moment le journaliste ne vienne apporter des contre-arguments (comme par exemple, la loi de l’État a préséance sur la loi de Dieu).
Le problème, c’est que Bilefsky reprend le témoignage d’Amrit Kaur, cette enseignante sikhe portant le turban, en refaisant les mêmes omissions que le fameux reportage biaisé que lui avait consacré Radio-Canada. Vous vous souvenez, l’enseignante qui avait « fuit » la loi 21 ?
Au moins Radio-Canada avait eu la décence de corriger le tir (après mes interventions et celles de Mathieu Bock-Côté). Mais pourquoi le NYTimes reprend-il ces informations incomplètes ?
On présente Amrit Kaur ainsi : « A Sikh teacher with a turban moved about 2,800 miles from Quebec to Vancouver, calling herself a “refugee in her own country.” » « Une enseignante sikhe portant le turban a traversé 2 800 miles du Québec à Vancouver, et se qualifie de réfugiée dans son propre pays ».
Voici les différents problèmes avec le reportage du NYTimes :
1-Le NYTimes ne souligne pas qu’Amrit Kaur peut sans problème enseigner dans n’importe quelle école privée au Québec, la loi 21 ne s’appliquant qu’aux écoles publiques. Et ne précise pas qu’en Colombie-Britannique, elle travaille dans une école privée. Elle affirme devoir s’exiler à 2800 miles du Québec pour se trouver du travail, mais le reporter ne souligne pas qu’elle n’avait pas à s’exiler ... puisqu’elle pouvait trouver du travail ici au privé.
2-Le NYTimes écrit : « The ban on religious symbols passed the day that Amrit Kaur, a Sikh who wears a turban, graduated from teachers college. So she moved to the other side of the country ». Le reporter affirme que la loi 21 est passée au Québec le jour même où Amrit Kaur a obtenu son diplôme d’enseignante... mais ne mentionne nulle part qu’elle étudiait en Ontario ! Il fait donc croire à ses lecteurs qu’il y a une suite logique entre la loi 21 et sa décision de partir à l’autre bout du pays... alors qu’elle est diplômée de l’Ontario... où la loi 21 ne s’applique pas ! Et on passe bien sûr sous le tapis le fait qu’elle est déjà loin du Québec... vu qu’elle a passé des années d’études dans une autre province !
Dan Bilefsky, auteur de l’article, omet de mentionner que Mme Kaur est vp de l’organisation mondiale des sikhs . Pourtant, une simple recherche sur google l’aurait mené à cette info : https://www.facebook.com/watch/?v=307719773254899
En contraste avec ce reportage biaisé du NY Times, voici les modifications qui ont été apportées par Radio-Canada, à l’époque, à son propre reportage biaisé, après nos différentes interventions : « La version originale du texte mentionnait que Amrit Kaur est vice-présidente pour le Québec de l'Organisation mondiale des sikhs du Canada. Nous avons cependant précisé que l'organisme a ajouté sa voix à la contestation de la loi 21 devant les tribunaux. Il a également été précisé que la loi n’aurait pas interdit à Mme Kaur d’enseigner au Québec mais dans un établissement privé. »
Un autre problème avec le texte du NYTImes. Pourquoi ne pas avoir mentionné que les institutions d’enseignement au Québec ne recensent aucun cas de profs ayant quitté à cause de la loi 21 ?
Pourtant, Radio-Canada avait fait rajouter cette information dans les modifications à son propre reportage : «Dans les deux institutions (Université de Montréal et Université Laval ), on ne recense pas de cas connus de diplômés en sciences de l'éducation en 2019 qui ont quitté le Québec pour se soustraire à la loi 21.»
Cela remet le cas, isolé, de Mme Kaur, en perspective, non ?
Le NYTimes écrit: « She said the suggestion by supporters of the bill that her turban would make her indoctrinate children was misguided. “It is the state that is imposing secularism as a religion on me,”
Monsieur Bilefsky lit-il Le Devoir ? https://www.ledevoir.com/politique/quebec/574072/loi-sur-la-laicite-de-l-etat-des-educatrices-voilees-ont-fait-du-proselytisme
Est-il au courant des deux affidavits déposés en Cour dans le cadre des contestations de la loi 21 ? « Deux mères montréalaises affirment que des éducatrices voilées ont fait pression sur leurs filles pour qu’elles adoptent elles aussi des pratiques musulmanes » ?
En donnant la parole, à quatre contre un, à des opposants à la loi 21, en laissant entendre que la loi 21 vise spécifiquement les femmes, en ne donnant pas un portrait complet de l’enseignante sikhe, le NYTimes a présenté un reportage biaisé.
Que fera le gouvernement Legault pour défendre la réputation de la province et de sa loi sur la laïcité ?