Le favori du Québec

Course à la chefferie du PLC


À en juger par l'atmosphère au congrès de l'aile québécoise du Parti libéral du Canada, samedi dernier, c'est Michael Ignatieff qui sera le favori du Québec au congrès de novembre qui élira le prochain chef du parti.
Non seulement les deux tiers des délégués se sont-ils alignés sur la position constitutionnelle de M. Ignatieff, soit la reconnaissance de la " nation québécoise ", mais ils ont copieusement hué les Bob Rae et les Stéphane Dion, lorsque ces derniers l'ont attaqué dans leurs interventions.
Cela correspond d'ailleurs au décompte de l'orientation des délégués, qui montre que M. Ignatieff sera le choix d'une majorité au premier tour, avec 37,6 % des délégués, alors que seulement 29,3 % des délégués opteront pour M. Dion, le seul Québécois de la course, et 23,4 % pour M. Rae, qui bénéficie pourtant de l'appui du clan Chrétien.
Déjà, la semaine dernière, un sondage du Strategic Council publié dans le Globe and Mail laissait effectivement entrevoir que M. Ignatieff serait le plus populaire des candidats au leadership dans la population québécoise, mais par très peu de points. Compte tenu de la marge d'erreur, les trois principaux candidats pourraient être à égalité dans le grand public.
Ce qui ressortait surtout du sondage, c'est qu'au Québec, contrairement au reste du Canada, n'importe lequel des trois principaux candidats (Ignatieff, Rae et Dion) serait considéré comme un " meilleur premier ministre " que Stephen Harper. Cela illustre, si besoin était, la chute catastrophique des conservateurs au Québec.
En dehors du Québec, toutefois, c'est à Bob Rae que le même sondage donne l'avantage. Contre Stephen Harper, qui reste le chef le plus populaire dans l'ensemble du Canada et en Ontario, c'est M. Rae qui ferait la meilleure bataille. Contrairement à ce qu'on prévoyait, l'ancien premier ministre ontarien fait bonne figure dans la province qu'il a pourtant menée au bord de la faillite. M. Rae y récolte 29 % des appuis, contre 22 % à M. Ignatieff et 21 % à M. Dion.
Il faut toutefois se garder de prendre ce sondage au pied de la lettre. Comme l'échantillon n'était que de mille répondants pour l'ensemble du pays, il s'ensuit que les données régionales sont basées sur un échantillon trop faible pour être vraiment crédibles. Néanmoins, tout cela illustre des tendances.
L'excitation qu'a suscitée le virage " nationaliste " du PLC dans la classe politico-médiatique réussira-t-elle à redonner un souffle de vie au parti? Chose certaine, il se trouve à l'heure actuelle dans un état presque moribond. La participation au choix des délégués au congrès de leadership en a fourni une éloquente illustration.
Selon une enquête de Graeme Hamilton, le correspondant du National Post au Québec, seulement 6500 libéraux ont participé au choix des délégués au congrès- soit 17 % des 38 000 personnes qui sont théoriquement membres de l'aile québécoise du PLC.
Dans le comté d'Abitibi-Baie-James-Nunavik-Eeyou, les 14 délégués pro-Rae ont été élus par... deux membres de la base! Dix-huit électeurs ont participé au choix des délégués dans Repentigny; 21 dans Verchères-Les Patriotes; 22 dans la Beauce, 42 dans Beauharnois-Salaberry, 45 dans Compton-Stanstead, 57 dans Trois-Rivières et 94 dans Notre-Dame-de-Grâce-Lachine, qui est pourtant l'un des rares bastions qui restent au PLC.
Selon les règlements du parti, chaque comté peut déléguer au congrès 14 représentants, indépendamment du nombre de militants de la base qui ont participé à l'élection des délégués.
Ces chiffres (que les autorités du parti refusent de confirmer, alléguant que c'est une affaire " interne ") jettent d'emblée un certain discrédit sur la qualité démocratique de la représentation québécoise au congrès.
Cela est d'autant plus insultant pour les associations de comté qui marchent bien, dans d'autres provinces, que tous les délégués québécois pourront facilement assister au congrès qui aura lieu à Montréal, alors qu'il n'est pas évident que tous les délégués de l'Ouest et des Prairies pourront s'y rendre. (La caisse du PLC est vide, et les délégués doivent assumer une partie des dépenses de voyage et le coût de l'inscription.)
Le directeur de campagne de Gerard Kennedy, un ancien ministre ontarien relativement populaire au Canada anglais mais pratiquement sans appui au Québec (la raison principale étant qu'il ne parle pas français), ne cachait pas son mécontentement devant le peu de représentativité réelle qu'auront bien des délégués québécois: " Dans la région métropolitaine de Toronto, disait-il au reporter du Post, Kennedy a eu plus de votes chez les membres que n'importe quel autre candidat dans les comtés du Québec! "


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