Vendredi, le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, prononçait une allocution sur la souveraineté du Canada sur l'Arctique. Quelques heures plus tôt, Moscou annonçait son intention de militariser sa zone arctique. Simple hasard? Comme l'aurait dit Marshall McLuhan, «the medium is the message». Le ministre ne s'y est pas trompé. Sa réponse: le Canada ne se laissera pas intimider!
Le geste de Moscou n'est pas étonnant. Depuis déjà longtemps, la Russie affirme sa volonté d'exploiter les ressources de l'Arctique. En 2007, un de ses sous-marins plantait par 4000 mètres de profondeur un drapeau sous le pôle Nord. Elle soutient que la dorsale de Lomonossov est une extension de son plateau continental. Si cela était démontré, cela lui permettrait d'exploiter un territoire que le Canada croit lui appartenir.
Après avoir dit que le gouvernement Harper sera intraitable avec tous ceux qui ont des visées sur l'Arctique canadien, le ministre Cannon précisait que le Canada privilégierait la voie diplomatique. Quoi d'autre en effet! Ce ne sont pas les sous-marins canadiens qui peuvent assurer la souveraineté dans les eaux arctiques. Ils ne sont pas faits pour ces missions et, de toute façon, ils sont tous en rade. Ce ne sont pas non plus ses brise-glace. Le Canada n'en aura de classe arctique que dans plusieurs années.
Le Canada a beaucoup tardé avant de prendre au sérieux l'enjeu de sa souveraineté sur un désert de glace qui représente tout de même 40 % de son territoire et recèle des richesses innombrables. Il y a eu quelques sursauts, comme en 1984 lorsque le brise-glace américain Polar Ice fit une traversée du passage du Nord-Ouest. Le premier ministre John Turner avait réagi en annonçant la construction d'un brise-glace pour surveiller ces eaux. L'alerte passée, le projet fut oublié.
Le gouvernement Harper est plus sérieux. Il a pris plusieurs mesures, dont le renforcement de la présence militaire, la construction d'un port et la création d'une station de recherche dans l'extrême Arctique. Le geste le plus important est la cartographie du plateau continental de l'Arctique qui permettra d'asseoir les prétentions canadiennes, ce en quoi la Russie est largement en avance. L'enjeu est important. Outre l'accès à des ressources pétrolières et gazières sous-marines, il en va du contrôle de la navigation qui deviendra possible dans cette zone qu'emprunteront de nombreux navires une fois les glaces disparues.
Ottawa croit trop facilement qu'il suffira d'affirmer son bon droit pour le faire reconnaître en vertu de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer. À cet égard, son seul allié possible est les États-Unis. Il vaudrait la peine de régler ou de mettre de côté le contentieux qui l'oppose à Washington sur les limites territoriales dans la mer de Beaufort pour adopter une approche commune. La création d'une commission mixte canado-américaine que suggérait dans nos pages la semaine dernière un groupe d'universitaires est une voie que les deux gouvernements devraient explorer. Il n'y aurait pas de meilleure réponse à donner à Moscou.
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