Le 14 juillet 2019, j’ai assisté à la projection de Midsommar/Solstice d’été, un film d’horreur étasunien, réalisé par Avi Aster, mettant en scène une secte suédoise. Avant cette date, j’avais tendance à utiliser ces mots en réaction aux activités et comportements de partis politiques, gouvernements, médias et entreprises: une crisse de secte. Par la suite, ces quatre mots ont été remplacés par plus de 40 pages qui étaient en lecture et correction, avant que l’Organisation mondiale de la santé ait décrété, le 11 mars dernier, que l’épidémie de la COVID-19 s’était transformée en pandémie.
C’était hier. Un passé, pas si lointain, qui fut marqué par de nombreuses critiques concernant l’identité québécoise. Nous n’avons qu’à penser à toutes les fadaises qui ont été dites pour attaquer les protecteurs de la loi 21 sur la laïcité et le racisme systémique d’anglo-montréalais. Le mal est fait et malgré l’isolement, je crois que ce que nous vivons va donner un caractère plus inquiétant à mes propos. Pour le reste, cela dépendra de l’actualité du moment présent et de notre capacité à nous informer librement, en évitant de nous enfoncer dans des propagandes. Soyons dans la réalité. Même si des licornes, des schtroumpfs ou des farfadets nous répètent que «ça va bien aller», notre situation reste la même qu’avant l’invasion du méchant virus: nous sommes asservis à une secte malveillante. Je ne vous demande pas de me croire. Je dois simplement prendre le temps de vous convaincre. À cette fin, je dois commencer par préciser que nous devions éviter de comparer notre réalité à un film d’horreur. En même temps, il me semble inconcevable de résister à la tentation lorsque des réalisateurs s’inspirent de l’actualité pour pondre des œuvres éclairantes. Je pense ici à Z (1969) de Costa-Gavras, Les Ordres (1974) de Michel Brault (1928-2013), I... Comme Icare (1979) de Henri Verneuil, Octobre (1994) de Pierre Falardeau (1946-2009) ou encore La Mécanique de l’ombre (2016) de Thomas Kruithof.
Avec Solstice d’été, Avi Aster se sert d’une secte pour nous présenter les étapes que nous franchissons pour nous soumettre à une autorité globale. Un sujet qui n’a assurément pas d’intérêt pour les disciples de la bonne pensée, car cela implique des liens avec des dogmes ésotériques qui dictent notre comportement. En premier lieu, cela passe par la SÉDUCTION. Par la suite, des DIVISIONS et des marques d’INTOLÉRANCE se manifestent pour amener les disciples rebelles à se soumettre. Une opération de DÉPERSONNALISATION qui évolue vers le droit de les SACRIFIER.
Le film
Débutons par une présentation sommaire du film. Solstice d’été relate l’histoire de sept jeunes adultes, plus précisément Dani et Christian, un couple au bord de la rupture, ainsi que Josh, Mark, et Pelle, un proche de la secte. Tous rejoint par Connie et Simon, pour assister aux célébrations solaires d’une secte suédoise. Après qu’ils eurent roulé sur une longue route paisible qui traverse une forêt splendide, ils se retrouvent entourés de fleurs magnifiques, à profiter du soleil. Arrive un inconnu. J’anticipe alors un massacre, du sang, quelque chose d’horrible qui me ferait claquer des dents. Il s’agit seulement d’une connaissance de Pelle qui, plutôt que de leur proposer un deux litres de cola et de la pizza, comme le ferait un Canadien civilisé, leur offre des champignons dont la présence de psilocybe provoque des hallucinations et des rires qui font penser à Valérie Plante, la mairesse de Montréal.
C’est la grande SÉDUCTION. La chance de vivre le bonheur total, dans un endroit paradisiaque. Par la suite, les amis cheminent jusqu’à un village ou près de soixante personnes se regroupent entourées de runes. Il s’agit d’un alphabet à l’origine de l’écriture celte, la plus ancienne calligraphie du nord de l’Europe, à laquelle on attribue des propriétés magiques. Il doit bien y avoir un hystérique dans le lot qui va commettre quelques meurtres lors d’une psychose! Oublions l’horreur. Les personnages du film sont tous gentils et accueillants.
Heureusement, la bonne humeur finit par se tasser, lorsqu’on découvre que la secte DIVISE les couples. Rien de trop troublant. C’est seulement le lot de Connie et Simon ainsi que Dani et Christian. Mais encore, la clique celte est INTOLÉRANTE. Mark doit en payer le prix pour avoir uriné sur la souche d’un arbre sacré alors que Josh a osé photographier le livre des runes, malgré l’interdiction. La secte pratique aussi la MAGIE. Quelqu’un a déposé un talisman sous le lit de Christian. À cela s’ajoute un étrange breuvage orange qui lui est servi, plutôt que le jaune réservé aux autres convives. La raison? Christian est l’heureux élu qui devra copuler avec une jeune femme, dont il connaît à peine le nom. Les disciples pratiquent aussi passionnément ce que je qualifie de RITUEL D’ACCOMPAGNEMENT. Il s’agit de gestuelles et borborygmes collectifs utilisés pour de nombreuses occasions. Des pratiques qui me rappelent Le Shower de bébé de l’humoriste Stéphane Poirier[1].
La première manifestation de cet attroupement vise à soulager la souffrance d’un sacrifié qui gît sur le sol, démembré. Ce personnage est un des SACRIFICES humains qui a terminé son cycle de vie de 72 ans, composé de quatre périodes de 18 ans associés aux quatre saisons. Et comme il risque d’agoniser pendant quelques minutes, la secte décide de sortir un marteau aux proportions démesurées pour écraser sa tête. Vous trouver ce geste horrible? Pas vraiment! Il répond simplement à l’idéologie dominante de la PARITÉ en passant des mains d’un homme vers celles d’une femme... jusqu’à ce que la mort s’en suive. Pour les symboles, la magie et les sacrifices, ces thèmes trop complexes pour être abordés en quelques lignes.
On apprend par la suite que les septuagénaires ne sont pas les seuls à payer de leur vie. Christian se retrouve aussi parmi les sacrifices. Il fallait s’y attendre. Il n’a rien du disciple idéal. Il est un marginal qui boit un jus orange plutôt que jaune. Il copule aussi avec le modèle suédois en plus de recevoir de l’aide de la communauté, afin de stimuler sa libido. Dani, la seule qui peut le sauver, a remplacé ses vêtements par ceux de la secte. Que risque-t-il de se produire? Christian est un mâle hétérosexuel, plutôt solide et indépendant, alors que Dani est une femme fragile qui rêve de s’accrocher à quelque chose de tangible, a la suite du suicide de sa sœur qui a entraîné ses parents vers la mort. Elle sait aussi que sa relation avec Christian se gâte. Cela provoque une crainte de l’autre et la rend propice à commettre des gestes qu’elle n’aurait osé imaginer.
Le Canada: une crisse de secte
C’était le film. Je peux maintenant traiter de mes réactions. Je suis sorti de la salle de projection en comparant le Canada à une secte malveillante qui s’aligne sur les méthodes classiques de recrutement sectaire. Un clan qui ouvre ses portes pour accueillir de nouvelles têtes. Une secte qui passe en mode de séduction pour les amadouer et opte ensuite pour la division et l’intolérance afin de réunir ses disciples autour d’un ennemi commun. Oublions les assassins en Colombie-Britannique de nombreuses Amérindiennes. Avant la pandémie, l’adversaire était Québécois. Et comme le Canada est gentil, plutôt que nous sacrifier, il nous offrait la chance de sauver notre âme en remettant en question nos repères identitaires. Dit autrement, si être un bon Canadien c’était pouvoir suivre une longue route qui mène vers un monde merveilleux plein de fleurs et de soleil, pour un Québécois, la même route menait à la mort.
Pour conséquence, avant la pandémie nous étions de plus en plus nombreux à croire que notre société faisait un mauvais voyage sur psychotrope, guidé par une confrérie d’hallucinés qui nous imposait la morosité universelle, une incompétence presque surnaturelle, pendant qu’un taux alarmant d’enfants pensait au suicide et que d’autres se disaient victimes d'une «angoisse climatique». Une communauté, dont l’encadrement juridique permettait d’utiliser la grosse masse paritaire pour enfoncer le clou de la bêtise. Cette foutue impression de vivre dans une immense structure de croyances qui ordonne une adaptation à quelque chose qui nous détruit de l’intérieur.
Ce mal provoque autant de réactions qu’il y a d’individu. Certains tentent de répondre aux standards de la concurrence, d’autres se donnent corps et âme à une cause, et encore, il y a celles et ceux qui utilisent le marteau du pouvoir pour asservir les gens ou simplement nuire à leurs libertés.
Pendant ce temps, un langage sectarisme s'impose. Ainsi, on insiste pour utiliser le mot «mondialisation» pour traiter de l’ouverture des marchés et de la libre circulation des biens, en évitant le terme «mondialisme», plus lié à une doctrine qui tend à redéfinir notre identité, nos opinions et nos habitudes de vie en fonction de la marchandise. Pour les borborygmes collectifs qui ressortent des rituels d’accompagnements, ils sont de simples caricatures d’un phénomène que je qualifie de langage associatif inculqué.
Depuis quelques années, ce langage associatif inculqué nous associe à des «racistes», des «islamophobes», des «haineux», des «nazis», des «extrémistes de droites» et des individus qui font de «l’appropriation culturelle» et votent pour des partis politiques qui «divisent la population» et torturent des groupes religieux. De l’intolérance et des hurlements collectifs pour dresser la longue liste de personnes qu’on devrait frapper avec le marteau paritaire, s’ils refusent de devenir de gentils Canadiens. Un langage associatif inculqué qui est la version moderne du «réflexe de Pavlov» en lien avec le «chien de Pavlov», terme lié à un conditionnement de l’esprit qui fut expérimenté par Ivan Petrovitch Pavlov (1849-1936), un physiologiste et médecin russe.
La description la plus efficace que je connaisse vient de propos de Stello. Il s’agit d’un personnage emprunté à Alfred Victor de Vigny (1797-1863), un auteur et poète français qui écrivit Stello en 1832 et qui fut réactualisé en 2019 dans le cadre Des Consultations du DR. Noir en réaction aux rituels d’accompagnement qui se multiplient dans notre espace public. Voici:
Cette accusation d’extrême droite, de nazis et de haineux est une arme aveuglément déployée contre toutes autres idées que les valets de l’anti-pensée globale veulent imposer. C'est-à-dire, à la manière du réflexe de Pavlov, c’est l’incapacité de verbaliser un désaccord raisonnable, d’exprimer des idées cohérentes, d'expliciter les causes, comme les conséquences des choix politiques que l’on défend aveuglémen. C’est un argument déjà préparé d’avance pour museler et discréditer les individus qui sont conscients d’un certain nombre de vérités et qui désire les communiquer publiquement. Il fait partie du réservoir d’arsenaux, de fausses rhétoriques bas de gamme, dont usent, à chaque fois et gratuitement, les carriéristes de la pensée correcte, les esclaves de la médiocrité, les porte-étendard de l’insignifiance[2].
Au Canada, nous encourageons cette incapacité à verbaliser un désaccord raisonnable, à exprimer des idées cohérentes et à expliciter les causes en distribuant des biscuits aux chiens de Pavlov. Des rituels d’accompagnement qui imposent lentement l’idée que la nation est dépassée si elle s’oppose à la perte d’identité qui se conjugue avec le mondialisme. Heureusement, pour éviter qu’on se soumette à cette secte de tarés, on peut espérer en l’éducation. Malheureusement, le savoir devient un concept dépassé qui répond au langage associatif inculqué. Pour conséquence, alors que plusieurs grands médias traînent la patte, les enseignants dignes de ce qualificatif sont de plus en plus intimidés, injuriés et menacés, pendant que d’autres, les professionnels de l’endoctrinement, encouragent les déviances du troupeau en créant des rumeurs pour atteindre la réputation d’individus, parfois même en se présentant comme des âmes charitables, pacifiques et bienveillantes. L’art d’accuser des personnes d’avoir uriné sur la souche de l’arbre ou photographié le livre sacré des runes.
Cette carence de l’esprit profite à une fissure de l’histoire. Ainsi, dans le bon et gentil Canada, la nation québécoise ne peut plus débattre sans se faire invectiver. On réussit, sans trop de peine, à transformer la démocratie à une opération de renversement des valeurs qui laisse l’impression que la gauche est devenue le nid du langage associatif inculqué, ou du moins, qu’elle ne possède pas les capacités pour lutter contre la secte. Bien sûr, lorsqu’on observe le déclin, on aimerait s’inventer des histoires pour l’expliquer. Il y en a qui s’imagine une extrême droite qui tenterait de perturber les fréquences cérébrales des citoyens en piratant les médias, alors que c’est seulement la bêtise qui s’étend plus vite que la sagesse en tirant sa sève d’un individualisme extrême qui a pour modèle celui du déclin des valeurs nationales, des libertés et de la démocratie.
Alexandre Soljenitsyne (1918-2009), un célèbre écrivain russe dont j’ignorais l’existence avant août 2019, critiquait sans gêne, dès 1978, la «trop grande importance accordée aux droits individuels», ce qui aurait pour effet de ne pas pouvoir «sacrifier son petit confort et ses sacro-saints droits pour défendre le bien commun»[3]. Une société qui rend impensable toute volonté d’améliorer la qualité de vie de la collectivité, car cette ambition serait rapidement contestée par des milliers d’individus. Pour conséquence, ce type qui fut condamné au Goulag durant huit ans, pour avoir critiqué le régime de Staline dans une lettre, alors qu’il se battait contre les nazis, fut ensuite la victime de progressistes étasuniens qui ont joué avec le langage associatif inculqué en l’accusant d’être un antisémite, un chrétien orthodoxe et de partager sa critique du régime communiste des extrémistes de droites russes.
Contre nous
Aujourd’hui, ce cercle d’initiés multiplie les associations mensongères dans l’intention de nuire. Pour conséquence, ne me demandez pas de jouir de la vie, d’éviter d’angoisser et de devenir un gentil Canadien. Mon identité me condamne, dès ma naissance, à me retrouver sur la liste de personnes à sacrifier. Et quelque chose me dit que ce n’est qu’un début. La raison est simple. Ici et maintenant, nous pouvons passer des années sur un banc d’école, sans acquérir l’essentiel, connaître sa langue et son histoire. On peut accéder à un nombre faramineux d’œuvres artistiques, souvent redondantes, corporatistes, sans lustres ni contestations, servant la plupart du temps à avaler la communauté locale, pour engraisser la culture anglo-saxonne.
La secte adore. Cela gonfle le nombril de JE dans l’intention d’en faire des étendards de l’opinion publique. Braquer les projecteurs sur les chiens de Pavlov, pour nous dire que la raison n’est plus essentielle. Il suffit de crier, hurler et s’agiter pour créer une vague morale et ensuite exposer le trou de son bas ventre aux médias. On s’offre ainsi la boisson orange exclusive pour élever le JE par le soutien de la division, l’intolérance et les rituels d’accompagnement. Et lentement, on devient la pute du relativisme qui propose l’idée qu’on devrait utiliser le marteau paritaire en fonction de nos convictions. C’est ainsi que des sanctions se décident, dépendant si la victime est membre du Parti communiste ou un ouvrier des goulags, un Canadien ou un Québécois, un élu qui prône la désobéissance civile ou un citoyen qui devient sa victime, une grande gueule qui s’exprime sur la Toile ou un serf de la secte qui utilise les fréquences hertziennes que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) lui prête pour étendre le culte.
Le Canada est une secte malveillante qui œuvre au sein d’une confrérie qui s’étale sur tout le globe. Je le constate en observant nos symboles qui disparaissent, pour être remplacés par ceux de la secte. Ils sont là, autant pour signer l’identité d’une nation que pour souligner les activités et possessions de la secte. Parmi les exemples, nous avons la souche de l’arbre associée aux ancêtres ainsi que le livre sacré. Il y a aussi des symboles qu’on extirpe d’une lointaine tradition pour exprimer des liens historiques ou des attributs identitaires, dont les runes celtiques, que seul Ruben, le taré de la secte, possède l’autorité pour y ajouter des informations.
Ces symboles se sont étendus sur le monde lors de la plus mémorable ère de séduction que nous ayons vécue, plus précisément les années 60 qui furent marquées, au Québec, par la Révolution tranquille. Par la suite, nous sommes entrés dans une époque de dépression sociale jalonnée par un effacement incessant et progressif du NOUS. Une époque de perte de repères identitaires qui nous transforme au point d’oublier que les symboles sont indissociables de la langue et de la culture d’un peuple. Et après.... On se retrouve à la deuxième partie dans moins de 72 heures.
Références
- ^ Stéphane Poirier à son premier shower de bébé propose une version humoriste du rituel d’accompagnement.
- ^ Stello, Les Consultations du Dr. Noir.
- ^ MARTINEAU Richard, Le triomphe de la médiocrité, Journal de Montréal, le 10 août 2019.
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