Le Canada anglais se défoule sur le dos du Québec

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Francophobie et Quebec bashing - 2008

Alexandre Shields - Le psychodrame politique qui secoue Ottawa a continué d'alimenter les débats dans le Canada anglais hier, où les attaques dirigées contre les «séparatistes» ont pullulé sur différentes tribunes. Les opinions ont par ailleurs semblé très partagées sur la décision de proroger les travaux aux Communes jusqu'à la fin de janvier, chaque camp y allant de ses rassemblements un peu partout au pays.
Si la chef péquiste Pauline Marois se disait hier convaincue que la situation qui prévaut sur la colline parlementaire serait bénéfique pour le mouvement souverainiste, chose certaine elle a alimenté le ressentiment envers le Québec. Ainsi, plusieurs ont écorché les «séparatistes» sur divers forums de discussion, dont bien sûr des blogues conservateurs, mais aussi des sites comme ceux du Calgary Herald, de la CBC, de l'Edmonton Sun, du Globe and Mail, etc.
La plupart s'en sont pris au Bloc québécois. Un internaute, félicitant la décision de la gouverneure générale de suspendre les travaux aux Communes sur le site du Calgary Herald, a d'ailleurs pressé le premier ministre Stephen Harper de tenir un «référendum» sur la légitimité du Bloc en tant que parti fédéral. Un point de vue partagé par bien d'autres, surtout dans les fiefs conservateurs. Ce clavardeur se dit même prêt désormais à voter pour «exclure» le Québec du Canada.
D'autres, saluant la décision de Michaëlle Jean tout en redoutant que cela ne fasse que retarder un éventuel vote de défiance de l'opposition, ont repris à leur compte les arguments déjà évoqués par le premier ministre pour discréditer la coalition. Plusieurs ont donc accusé la coalition formée par les libéraux et les néo-démocrates de vouloir à tout prix usurper le pouvoir acquis dans les urnes par les troupes de M. Harper. Et on a, encore une fois, évoqué le pacte avec une formation «qui veut détruire le pays». Tout cela au nom d'une province «qui obtient toujours tout ce qu'elle veut», écrivait un lecteur du Globe sur le site du forum de discussion du quotidien.
Ce sentiment de frustration des partisans conservateurs a provoqué ces derniers jours, à Calgary, la formation d'un nouveau groupe prônant rien de moins que le départ de la Saskatchewan, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique de la fédération canadienne. Difficile, cependant, de connaître pour l'instant l'ampleur du mouvement.
Le premier ministre de l'Alberta, Ed Stelmach, s'est dit soulagé de la prorogation, invitant M. Harper à écouter attentivement les premiers ministres provinciaux lors de la rencontre qu'il a convoquée le 16 janvier prochain. Selon lui, ce sera l'occasion de développer un plan pour que le pays puisse traverser la crise économique. Avec les conservateurs au pouvoir, a-t-il souhaité.
Les adversaires des conservateurs se sont eux aussi fait entendre. Réagissant aux derniers développements de la crise politique fédérale, des internautes ont attaqué la crédibilité du chef conservateur, qui ferme le Parlement pendant plusieurs semaines alors qu'une crise économique menace les Canadiens. Surtout, on insiste un peu partout sur le fait que les troupes de M. Harper ont reçu l'appui d'à peine 37 % des électeurs aux dernières élections, ce qui est loin de représenter une majorité de votes.
Et à propos de la légitimité du parti de Gilles Duceppe, le Globe and Mail rappelait hier que les députés bloquistes «sont les représentants légitimes d'un grand nombre de Canadiens qui vivent au Québec». Des représentants, soulignait le quotidien torontois, qui ont participé à des débats importants sur des questions comme les changements climatiques ou la guerre en Afghanistan.
Manifestations à venir
Des manifestations «anticoalition» sont en outre prévues demain dans 11 villes canadiennes, au même moment où des rassemblements favorables au renversement des conservateurs se tiendront elles aussi un peu partout au pays. Certaines se sont déjà tenues hier, après l'annonce de la décision de la gouverneure générale, et d'autres doivent avoir lieu aujourd'hui.
Cette crise semble effectivement diviser le pays, selon ce qui ressort d'un sondage Léger Marketing mené sur Internet pour le compte de Sun Media et rendu public hier. Les provinces de l'Ouest réclament de nouvelles élections dans une proportion de 71 % plutôt que de voir une coalition au pouvoir à Ottawa. Le pouls des électeurs est différent dans les Maritimes, où 48 % des gens sondés soutiennent la coalition des partis d'opposition. Au Québec, cette proportion grimpe à 58 %.
De plus, 53 % des répondants sont «mal à l'aise» à l'idée que la gouverneure générale du Canada, Michaëlle Jean, ait le dernier mot en ce qui a trait à l'avenir du gouvernement conservateur minoritaire de Stephen Harper, d'après ce coup de sonde mené les 2 et 3 décembre auprès de 2226 Canadiens.
À l'échelle nationale, si le gouvernement conservateur était défait par les partis d'opposition lors d'une motion de défiance, 40 % des répondants voudraient un gouvernement de coalition, 43 % souhaiteraient de nouvelles élections et 17 % ne savent pas quelle option ils préféreraient.


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