Au diable l'environnement et l'opinion publique

La stratégie de l’énergie canadienne est déjà en marche

Tout pour vendre le pétrole sale de l'Alberta

Tribune libre

La nouvelle de l'adhésion du gouvernement Couillard à la Stratégie canadienne de l’énergie nous a étonnés et déroutés. Et devrait nous inquiéter pour plusieurs raisons.

Comment ambitionner participer à des discussions sur une stratégie énergétique nationale lorsque le Québec n’a pas de stratégie partagée et acceptée par les Québécois? Il y a plusieurs types d’objections, des manifestations, de fortes inquiétudes, de la méfiance, des mises en garde d’experts sur plusieurs dossiers touchant ses ressources énergétiques. La Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse sont dans la même situation.

Pour ce qui est des dossiers nous pensons, entre autres, à l’exploration pétrolière sur l’île d’Anticosti, en Gaspésie, aux Îles de la Madeleine, la fracturation hydraulique, le projet Énergie Est de la compagnie TransCanada (deux fois plus gros que celui de Northern Gateway), le port pétrolier de Cacouna . Et n’oublions pas la privatisation (partielle) de Hydro Québec. (note 1).

Une nouvelle étoile s’aligne. La stratégie de l’énergie canadienne, n’est-elle pas une façon d’élargir le dossier de l’énergie en espérant qu’un plan d’ensemble, plus large sera plus acceptable pour les contribuables des provinces? On peut facilement anticiper que les discussions et négociations seront opaques au grand public et qu’on lui présentera, au moment jugé opportun, un «package deal» qu’ils ne pourront refuser.

Le moment opportun, il faut aligner les étoiles. Si les provinces n’ont pas de stratégie énergétique, les milieux d’affaires et financier en ont une. Ils veulent influencer ou mettre en place des éléments clés (étoiles), des incontournables pour profiter d’un contexte économique difficile qui obligeront les Québécois, bien malgré eux, à accepter ce qu’ils ne veulent pas. Un peu comme un promoteur astucieux qui conduit un fermier, en santé financière fragile, à vendre sa terre.

Quelques exemples d’éléments clés qui s’alignent pour créer le moment opportun?
-* Maintenir le Québec économiquement faible: accumulation des déficits budgétaires (note2), augmentation de la dette…La réciproque de l’affirmation récente de M. Stephen Jarislowsky au Journal de Montréal (note 3) appuie la force de cette faiblesse: pour éviter l’indépendance du Québec, assurons-nous qu’il soit bien endetté;
-* Dévalorisation du Québec. Par exemple, le Québec est sur le bien-être social, les Québécois ne produisent pas assez, c’est compliqué de faire des affaires au Québec, l’indépendance prend trop de place…
-* Rappeler la possibilité d’une décote des principales agences de notation de crédit. Et donc une augmentation du coût de financement;
-* Revaloriser l’image des pétrolières (embauche de porte-paroles crédibles);
-* Difficultés de mettre en place diverses initiatives (révision des programmes du Québec, réforme fiscale, hausse des tarifs de plusieurs services, réduction d’aides à certains organismes…) pour rétablir la santé financière du Québec ;
-* Négocier une stratégie canadienne de l’énergie. Ce qui pourrait inclure une privatisation de Hydro Québec:
-* Une économie mondiale fragile. La croissance du PIB ne sera pas au rendez-vous, probablement une baisse. Les revenus et l’emploi en souffriront;
-* Revaloriser l’image des pétrolières;
-* Des services aux contribuables qui diminuent (santé, éducation, routes…)

Et le scénario devient évident. Imaginons le discours de notre premier ministre supporté par ses experts :

Chers contribuables. Depuis quelques mois nous avons mis beaucoup d’efforts dans le but d’améliorer notre situation financière. Malheureusement l’examen des programmes, des processus et des structures, la renégociation du partage fiscal fédéral, le contexte économique …ne nous permettent pas de dégager les sommes requises. Nous n’avons d’autres choix, en l’absence de hausses d’impôt de :
-* Accélérer le développement du plan Nord;
-* De privatiser une partie de Hydro Québec;
-* De privatiser la SAQ;
-* De privatiser une partie de notre système de santé;
-* De confier l'entretien & la gestion de certaines grandes artères de notre réseau routier au secteur privé. Une méthode de péage juste devra être approuvée par le gouvernement, tout comme le péage sur les ponts ;
-* Conclure l’entente sur la stratégie énergétique du Canada. La Colombie-Britannique & la Nouvelle-Écosse ont accepté l’entente. L’entente couvre l’exploration pétrolière sur l’île d’Anticosti, en Gaspésie, aux Îles de la Madeleine, projet Énergie Est de la compagnie TransCanada , celui de Northern Gateway et le port pétrolier de Cacouna;
-* Intégration formelle du Québec à la fédération canadienne;
-* Etc…

Vous noterez la concordance de cette simulation avec le discours de M. Couillard (note 4) à la sortie de son caucus d’aujourd’hui (vendredi le 5 septembre) & de la plate forme du Parti progressiste-conservateur du Nouveau-Brunswick (note 5) présentée ce même vendredi.

Quand même bizarre, l’écart entre les riches et les pauvres s’accentue (comme c’est le cas à l’échelle planétaire) et le Québec s’endette et s’appauvrit! Si certains indépendantistes visent un référendum en 2025, il est probable qu’à ce moment ce sont les fédéralistes qui vont demander au Québec de quitter le Canada, les richesses du Québec étant bien menottées par des ententes, des décisions irréversibles. La réciproque d’une autre affirmation récente (note 6) de M. Stephen Jarislowsky soutient ce scénario : Si le Québec est beaucoup plus pauvre que n'importe quelle autre province du Canada, alors pourquoi les autres provinces partageraient avec le Québec. Elles gardent tout l'argent pour elles-mêmes!

Note 1. Le rapport d’experts sur l’état des finances publiques du Québec de M. Godbout et M.Montmarquette avril 2014 «Dans l’éventualité où l’examen des programmes, des processus et des structures ne permettrait pas de dégager les sommes requises en matière de contrôle des dépenses, le gouvernement n’aurait pas d’autres choix, en l’absence de hausses d’impôt, que d’envisager de vendre des actifs. Les revenus touchés par la vente de ces actifs seraient nécessairement versés au Fonds des générations. La vente des actifs permettrait donc de réduire la dette. À titre d’exemple, le gouvernement pourrait songer à ouvrir jusqu’à 10 % du capital de la Société des alcools du Québec ou d’Hydro-Québec aux Québécois.

Note 2. http://www.vigile.net/La-dette-publique-du-Quebec-266-G.

Note 3. Affirmation de M. Stephen Jarislowsky “Si le Québec est plus riche que la Suisse, je serai indépendantiste”, d'avancer ce dernier».
http://fr.canoe.ca/infos/quebeccanada/archives/2014/08/20140818-214710.html

Note 4 http://ici.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2014/09/05/005-couillard-bilan-caucus-charlevoix.shtml.

Note 5 http://ici.radio-canada.ca/regions/atlantique/2014/09/05/001-plateforme-electorale-progressistes-conservateurs.shtml.

Note 6. Affirmation de M. Stephen Jarislowsky “ «Si on est beaucoup plus riche que n'importe quelle autre province du Canada telle que l'Alberta, on garde tout l'argent pour soi-même». http://tvanouvelles.ca/lcn/infos/national/archives/2014/08/20140818-191801.html


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1 commentaire

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    7 septembre 2014

    Créer le moment opportun...
    Une thèse de doctorat ne serait pas plus convaincante!
    Mais comment passer cette info auprès de la population indolente? Ce gouvernement Couillard vient d'être élu majoritaire! Pouvons-vous toujours en imputer la tricherie électorale?
    Que reste-t-il des descendants de Nouvelle-France?