La police de Montréal veut «briser la culture du coulage»

Un haut gradé du SPVM, enregistré sans le savoir, a promis d’identifier ceux qui parlent aux journalistes

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Le coulage à l'intérieur du SPVM






Enregistré à son insu lors d’une réunion au mois d’avril, un des bras droits du chef de police de Montréal a lancé à ses collègues un mot d’ordre sans équivoque: la chasse aux sources journalistiques est ouverte.


Félix Séguin et Jean-Louis Fortin




Qui, au sein du Service de police de la ville de Montréal (SPVM), parle aux médias sans l’autorisation de son patron? Quels enquêteurs révèlent des informations qui peuvent être gênantes pour la police, mais qui aident à comprendre ce qui s’est véritablement passé?




Notre Bureau d’enquête a appris que l’assistant directeur Mario Guérin, membre de l’état-major dirigé par Philippe Pichet, s’est adressé à une cinquantaine de hauts gradés du SPVM le 26 avril dernier pour signifier que ce genre de comportement ne serait plus toléré.




Cette rencontre se déroulait derrière des portes closes au Riviera, un complexe de salles de réception à Anjou. Ce que l’assistant directeur Guérin ignorait, c’est qu’un des membres de son état-major, outré par ce qu’il entendait, avait le doigt sur l’enregistreur à ce moment.




« Philippe va avoir le lead »




«Il faut poser des actions pour que les acteurs impliqués [dans le coulage] sentent que ça nous préoccupe» l’entend-on dire dans la bande audio dont nous avons obtenu copie.




«Si ça prend des déplacements [de personnel], c’est Philippe [Pichet] qui va avoir le lead là-dedans», promet-il ensuite.




Mario Guérin n’avait pas digéré certains reportages portant sur les événements qui s’étaient déroulés une vingtaine de jours plus tôt, alors qu’une soixantaine de jeunes avaient saccagé le poste de quartier 39 de Montréal-Nord.




Des médias avaient révélé que la police avait laissé aller la casse sans procéder à des arrestations, pour éviter que la situation s’envenime. La stratégie policière avait été critiquée par des analystes.




«C’est un journaliste qui a communiqué avec un de nos relationnistes média et il mentionne avec une précision incroyable des détails sur le nom des sujets arrêtés ou non arrêtés. (...) Ça veut dire que le journaliste a une information des plus privilégiée d’une personne très très très près des opérations», s’est indigné Mario Guérin en parlant à ses collègues.




«Il faut briser la culture du coulage. (...) Ça va prendre deux ans, mais va falloir tous briser cette culture-là», a scandé l’assistant directeur.




Les méthodes d’enquête interne du SPVM font la manchette depuis lundi, alors que le quotidien La Presse a révélé que la police avait espionné le cellulaire de son journaliste Patrick Lagacé. Mardi, Le Journal révélait que trois autres reporters, soit Félix Séguin de notre Bureau d’enquête, Monic Néron du 98,5FM, ainsi que le journaliste indépendant Fabrice de Pierrebourg, ont aussi été ciblés par des enquêtes pour identifier leurs informateurs au sein du SPVM.


 





Ce qu’a dit l’assistant directeur Mario Guérin derrière des portes closes





«Pour le coulage aux médias d’information, on a deux choix. On a le premier choix de dire c’est normal, c’est la nouvelle génération, sont plogués sur internet. »




«Ce qui est le plus anormal, c’est que nous comme direction qu’on fasse rien [sur le coulage] parce que c’est rendu une culture. »





«Il faut poser des actions pour que les acteurs impliqués [dans le coulage] sentent que ça nous préoccupe. »




«Les intervenants de premières lignes seront rencontrés, chacun. »





«S’il y a encore du coulage, que ça soit dans n’importe quelle division, on va convoquer les cadres de la division concernée. On va descendre sur le terrain et on va aller voir qu’est-ce qui s’est passé. »




«Il faut tenter de trouver la faille. »­







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