La période de réchauffement

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Il n'a manifestement pas écouté le discours de PKP à l'UdeM

Il ne fait aucun doute qu’une véritable passion de l’indépendance anime Pierre Karl Péladeau. Son poing brandi durant la campagne électorale était peut-être maladroit, mais il traduisait parfaitement son sentiment.

On peut le comprendre de vouloir éviter le piège de l’échéancier référendaire, qui a toujours empoisonné la vie des chefs péquistes, mais il a bien compris que le PQ ne pourra pas se présenter devant l’électorat sans dire clairement s’il y aura ou non un référendum dans le premier mandat.

La souveraineté a beau être son « unique objectif », il ne voudra pas plus que ses prédécesseurs se lancer dans un référendum s’il n’a pas la conviction que les « conditions gagnantes » seront au rendez-vous. Il fera tout en son pouvoir pour les réunir, mais un échec ne peut être exclu.

À moins d’annoncer qu’il démissionnera plutôt que de diriger un « bon gouvernement » provincial, il devra expliquer ce qu’il fera pendant quatre ans, à part préparer un hypothétique référendum pour le mandat suivant. De leur côté, les progressistes du PQ, qui semblent prêts à l’élire en se bouchant le nez si la souveraineté est à la clé, devront aussi se demander s’ils pourraient vivre avec PKP sans référendum.


Jeudi, M. Péladeau a pris plaisir à entretenir les étudiants de l’Université de Montréal de sa période gauchiste à Paris. Il a été moins disert sur ses années à la direction de Québecor et a passé complètement sous silence les relations de travail exécrables qui les ont marquées. D’ailleurs, cela ne semblait pas intéresser les étudiants, qui ne l’ont pas questionné sur le sujet.

Le bilan de M. Péladeau est cependant trop lourd pour qu’on prenne pour argent comptant son soudain engouement pour le « modèle québécois » et son souci jusque-là inconnu de préserver le « filet social ». Il ne se fait pas prier pour dénoncer « l’austérité » imposée par le gouvernement Couillard et il conteste le sombre diagnostic sur l’état des finances publiques qu’a posé le vérificateur général, mais il refuse de dire si le retour à l’équilibre budgétaire devrait être retardé pour éviter que les plus démunis n’en fassent les frais.

Dans ses (très) brèves rencontres avec les journalistes, il ne lui est pas difficile de s’en tenir à des généralités. Il peut également faire la sourde oreille aux apostrophes des autres partis. Il sera plus délicat de servir les mêmes lieux communs aux militants péquistes qui assisteront aux débats entre les candidats au leadership.

À la notable exception de Jean-François Lisée, on ne peut pas dire que ses adversaires ont été très mordants jusqu’à maintenant. Le souci de ne pas écorcher le « sauveur », ou de ne pas déplaire au futur chef, ne devrait cependant pas priver non seulement les militants péquistes, mais aussi l’ensemble des Québécois des précisions qu’ils sont en droit d’attendre du grand favori.


La Charte de la laïcité a occupé trop de place dans l’espace public pour que M. Péladeau se contente de déplorer la fin prématurée du débat en commission parlementaire. Devant les étudiants de l’Université de Montréal, il a effleuré le sujet en évoquant « l’ouverture d’esprit des Québécois », mais la question est de savoir s’il est pour ou contre l’interdiction du port de signes religieux par les employés de l’État.

Il est facile de s’attirer la faveur des étudiants en faisant miroiter la gratuité scolaire. ll lui faudrait cependant préciser quel serait cet « encadrement » qu’il estime nécessaire. Jacques Parizeau a déjà dit qu’il est favorable à la gratuité, mais que cela supposerait que l’accès aux universités serait beaucoup plus restreint qu’il ne l’est actuellement.

Parce que son gouvernement était minoritaire, Pauline Marois avait renoncé à étendre les dispositions de la loi 101 au cégep, comme les militants péquistes l’avaient résolu au congrès d’avril 2011, ce que la CAQ n’aurait jamais accepté. M. Péladeau y est-il favorable ?

Si François Legault avait immédiatement saisi la balle au bond, les libéraux avaient été un peu bousculés par la sortie de Jean-François Lisée sur le conflit d’intérêt que crée le contrôle qu’il exerce sur l’empire médiatique de Québecor. Ils auraient préféré attendre que M. Péladeau soit élu chef avant d’entreprendre son procès. Ils ne voient conséquemment aucune urgence à trouver le forum approprié.

De Dakar, le premier ministre Couillard a indiqué qu’il entendait laisser au PQ tout le loisir de choisir son nouveau chef sans s’inviter lui-même dans le débat. C’est seulement ensuite que la vraie partie va commencer. M. Péladeau peut donc considérer les prochains mois comme une simple période de réchauffement. Il semble d’ailleurs en avoir grand besoin.


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