La langue de bois : politiques coupables, médias complices?

Chronique de Djemila Benhabib


Invitée à m’adresser à un parterre d’universitaires en début de semaine dernière, la rencontre a pris fin sur mon expérience électorale. Dans une atmosphère des plus conviviales, entrecoupée de rires et de réflexions fort stimulantes, les participants m’ont pressée comme un citron, à la toute fin de notre échange.

Que faut-il savoir pour plonger dans le chaudron électoral pour une personne davantage ancrée dans la connaissance livresque? Peut-on être VRAI lorsqu’on est en politique? Est-il possible de rester fidèle à ses principes? Comment une personnalité à la recherche de la vérité, souvent rompue aux joutes partisanes les plus cruelles, devient-elle prompt à la manœuvre politique? Sort-on indemne d’une campagne électorale? Comment peut-on endurer les entourloupettes, les couleuvres, le quotidien difficile d’une vie publique loin de tout repos?

La rectitude politique

Camweb 3x18: Langue de bois par Camweb

Dans le flot de ces interrogations dont je n’ai évidemment pas toutes les réponses, je ne peux m’empêcher de penser aux conditions de l’exercice de la parole publique.
« La démocratie, c’est accepter et permettre la confrontation des idées ». Le faisons-nous vraiment ? Disons, qu’il y a des domaines dans lesquels cet exercice se fait sans trop de dégâts alors que dans certains autres, une pensée politiquement correcte avec ses clercs et ses suppôts s’érige en norme et disqualifie de facto toutes les autres postures.

Vous voulez abaisser les seuils d’immigration? Vous êtes forcément raciste. Vous craignez qu’une mosquée s’installe dans votre quartier? Vous êtes forcément xénophobe. Vous être contre le voile islamique? Vous êtes les deux.

C’est le jackpot!

Bref, si « vous pensez mal », vous êtes forcément un « phobe » de quelque chose.

Les effets de cette dynamique étaient encore perceptibles, jeudi dernier, alors que les déclarations de Pierre Karl Péladeau faisaient grand bruit. C’était une excellente aubaine pour Françoise David. Pour cette gauche, il suffit de trouver un bouc émissaire, une victime expiatoire rituelle, qu’on assassine sur la place publique en chantant ses propres louanges pour se faire passer pour la « mère Térésa » de la diversité. « Voyez comme nous avons raison de taper sur lui, nous qui sommes bien de gauche puisqu’il est de droite, lui ! »

Ah le vilain!

«Les éléments de langage en politique sont de... par liberation

Je trouve le procédé qui consiste à utiliser un «mot» ou une «phrase», souvent sorti de son contexte, pour éliminer quelqu’un, détestable. Je le dis d’autant plus volontiers que j’ai été moi-même victime de cette méthode.

L’appareil médiatique traque et affectionne les dérapages, réels ou supposés.

Dans ces conditions – rectitude politique et traque médiatique – il est difficile d’avoir des débats d’idées. La plupart des politiques ont appris à parler dans le vide pour ne pas se faire prendre au piège. Alors, on tourne en rond. On reste en surface. On ne va jamais au fond des choses.

On l’a bien vu, mercredi dernier, lors de ce fameux débat qui réunissait les candidats à la chefferie du Parti québécois, à l’université Laval. L’empressement d’Alexandre Cloutier de se dissocier des propos de son collègue faisait partie de « la construction du dérapage ». Comme les autres candidats ont abondé dans le même sens, le « dérapage » était donc assumé à travers la répétition, il ne restait qu’à le consommer en passant Pierre Karl Péladeau au tordeur.

Y avait-il dans ce constat partagé quelque chose que nous ne savions pas déjà? C’est-à-dire un empressement dans les rangs indépendantistes à faire aboutir leur option politique et leur difficulté à percer dans les communautés culturelles?

Si l’on ne peut même pas partager un constat, comment pouvons-nous avoir un débat? Justement, il n’y en pas. Dans un débat, il est normal qu’il y ait plusieurs sensibilités. Surtout, s’agissant de l’immigration, sujet tabou, par excellence. Et c’est bien dommage, d’ailleurs.

Mais qui s’en soucie ?


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8 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    29 mars 2015

    Merci pour l'ensemble de vos commentaires à la suite de cette réflexion. Je ne comprends pas très bien les propos de @SML au sujet du Coran. Ce n'est pas du tout le sujet de cette chronique. Mais vraiment pas. De plus le site Riposte laïque n'est pas du tout une référence en matière d'information. Un site qui trop souvent mêle musulmans et islamistes.

  • Archives de Vigile Répondre

    27 mars 2015

    Très bien expliqué. Un des problèmes existentiel du Québec. Le politiquement correct est une forme d'omerta institutionnalisée, camisole de force des canadien français.
    une technique pour museler l'adversaire et la parole des gouvernés, museler une ville, une région,ou un pays C'est un problème majeur pas juste au Québec, province de valais porteur d'eau Hydro électrique coloniale. Il faut reprendre la place qui nous revient ici mème chez nous. Dire la vérité à vos risque et péril dans tout les domaines, la police politique de la pensé veille au grain. L'omerta, museler la dénonciation d'abus pour continuer à abuser de quelqu'un on l"intimide de mille et une façons. Une perversion de la démocratie.

  • Chrystian Lauzon Répondre

    25 mars 2015

    Mme Benhabib,
    Si PKP avait dit: “Immigration ou moratoire? Voilà une question à 4 milliards $ de déficit budgétaire ou pas, un moyen libéral-fédéral de luxe pour détruire le Québec-français au lieu d’une épargne pour enrichir l’État!». Le débat de fond(s) était lancé POUR VRAI, froidement, logiquement, économiquement, contre le mirage d’austérité et l’illégitimité d’un déficit-zéro, concept pour nigauds payeurs-cochons; et contre le parti dit de l’ "Économie", libéraux et néolibéraux visant l’extermination du Québec-français par l’appauvrissement « ground zéro » d’un peuple contribuable entier. À ce niveau d'expression, pas de méprise possible sur une potentielle offense contre les immigrés.
    Le « parti » de l’économie, pour les libéraux, c’est prendre le parti des endetteurs perpétuels associés aux intérêts des banques monopolisantes prêteuses. Économie pour le Haut, appauvrissement pour le Bas et l’État de fait.
    Vivement un audit sur la dette pour justifier un ré-équilibre budgétaire fait à la source, impliquant le partage des profits bancaires avec l’État, profits faits d’une part sur le dos des petits épargnants et, d’autre part, sur celui des travailleurs créant le Trésor réel de l’État, revolé à chaque prétendue austérité à déficit-zéro cyclique de fausse justification, de Lucien Bouchard le pétroleux agent du privé multinational minier à Philippe Couillard l’abrité en paradis fiscal protecteur de l’enfer saoudien infiltré au Parlement de Québec.
    Pour reprendre votre question thématique, Mme Benhabib, dire le Vrai, dans le cadre du déclin de civilisation que nous vivons, signifié par l’ironie internationalement croissante (une adéquation faite par Hegel lui-même), c’est saisir que le Vrai passe toujours par ce penser (au moins intérieurement) : toute question trouve sa pertinence politique dans une différenciation de niveaux de sens. La capacité à percevoir ces divers niveaux, et choisir le meilleur, dans l’échange hic et nunc, fait signe d’une intelligence politique supérieure à la moyenne, assez appauvrie en général par l’éducation universitaire et le milieu de la correctitude démagogique, typique du politique, milieu et personnage cérémonial.
    Autrement dit, le Vrai ne s’aborde que par niveaux de sens nettement distingués et articulés : un métalangage minimal est nécessaire au "sens" critique et auto-critique pour qu’ils adviennent. Et de là prend force une crédibilité face à soi, à l’autre, auditoire populaire, politique ou médiatique. Aucun débat n’a vraiment lieu sans ce jeu de niveau et une volonté de maîtrise mis en branle et aucune intelligence ne peut y résister lorsqu'il s'exprime sans détour. Praxis est le mot-clé : le penser-pour-faire (impact, changer, advenir), non plus que pour dire ou pire « que (s’écouter) SE dire ».
    C’est à ce genre de défi, ce vrai débat à la chefferie que j’ai appelé dans mon dernier article paru sur Vigile (http://www.vigile.quebec/L-Independance-promue-a-vif-sous ), passé presque inaperçu, ne soulevant qu’un seul commentaire, d'une vigilienne complice de mon idée certes, mais solution qualifiée par elle d’improbable en fait, de par la résistance qu’elle soulèverait de la part des candidats eux-mêmes.
    Ce à quoi ne doit plus résister un indépendantiste ayant à cœur de sauver le PQ et de promouvoir la cause elle-même, c’est bien le réel, n’est-ce pas. Ce réel n’est pensable que dans un cadre républicain et laïque opposé à l’actuel libéralisme monarchique anglo-saxon neutraliste… fédéralisant par définition. Les vrais propos sur l’indépendance sont toujours d’ordre anti-systémique, jamais à contenus intra-statu quo d’administration socio-écologique (Ouellett) ou de pouvoir syndical accru (Céré-rapatriement exclusif de la caisse d’Assurance-chômage et souverainetés canado-québécoise d’association fédéralisante). Seuls les intérêts nationaux et d'État valent en rapport de force contre une régime systémique que l'on souhaite renverser, remplacer.
    Le vrai rapport de force indépendantiste priorise la brisure du contenant pour réaliser les contenus, non une soumission de ces derniers à une discussion fédérale-provinciale infinie de « bargaining power» favorisant le maintien du cadre actuel. Il y a entre les 2 registres, la différence du passé et la nécessité de la présence d’esprit de l'urgence nationale, la mort d’un parti et la relève d’une cause à sa hauteur révolutionnaire.
    Que de vrais débats aient lieu et les 5 candidats formeront un tout fortifiant pour le parti et les faussetés seront affichées publiquement : pédagogie spontanée, en simultanéité, directement adressée à la population et aux médias. À moins qu’il se trouve des faussaires pour vrai au PQ? Vivre est un risque, mourir une forte probabilité. Pas besoin d'être un éléphant pour comprendre ça! L'indépendance peut se vendre selon un calcul de précision, fait ouvertement sur tous les plans face au peuple en priorité, tout en fortifiant une foi rassembleuse, pas en semant le doute entre indépendantistes.
    Chrystian Lauzon

  • Archives de Vigile Répondre

    24 mars 2015

    Les 3 visages du Coran: origines, construction et remaniements d'un livre humain.
    https://www.youtube.com/watch?v=6uOKexZoeKM
    Interview de Leila Qadr pour son ouvrage "Les 3 visages du Coran" aux éditions de Paris (2014) co écrit avec Arrun Amine Saad Edine, faisant le point sur les dernières recherches historiques, archéologiques, scripturaires, expliquant la construction du Coran. La construction progressive du livre a compilé des bribes de la Bible, d'apocryphes chrétiens, de midrash juifs, de fabliaux tribaux. Chaque récit coranique trouve sa source dans des textes pré existants. Le nom de Muhammad (Le Loué) est présent seulement 3 fois sans parenthèses. Le Loué désigne dans la Bible le prophète Daniel entre autre...

  • Archives de Vigile Répondre

    24 mars 2015

    Il y a belle lurette que je n'ai pas écrit un petit commentaire sur Vigile. La raison est simple, mais en même temps dramatique. En fait, les sempiternels déchirements sur Vigile ont fini par avoir ma peau et m'éloigner. Ces déchirements je les voyaient partout dans les échanges souverainistes. Ainsi déchiré, nous ne progressons plus depuis belle lurette.
    J'ai écouté "Pas de midi sans info" jeudi passé à propos de la phrase "mal formulée" de PKP. Alexandre Cloutier s'est précipité comme un diable d'un bénitier pour ne pas être enfourché par le terrible mot "raciste". Cela m'a secoué passablement. Quant à Mme David, elle s'est surpassée dans la bêtise partisane. Des fois je me demande si PKP ne serait pas plus près du peuple que Mme David?
    Où s'en va la liberté d'expression quand des mots tout à fait fondamentaux dans le grand débat actuel (immigration, islam, laïcité...), doivent être fardés pour nous faire croire que tout va bien, que tout va s'arranger quand au contraire, il y a des risques majeurs de conflits partout dont chez nous?

  • Archives de Vigile Répondre

    24 mars 2015

    Pourtant, il faudra bien le faire un jour ce débat. Manifestement, PKP n'était pas prêt, et il a balbutié de vagues excuses.
    Nous sommes doublement piégé. Quand on explique à un anti-PKP qu'il a simplement fait un constat que toutes les données objectives peuvent confirmer, on se fait répondre: "Pourquoi alors s'est-il excusé?"

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    23 mars 2015

    Voilà. Un groupe ne réfléchit pas. Mais un dialogue existe entre Véronique Hivon et Sol Zanetti: deux partis qui ne s'entendent jamais. Mais il lui a proposé un café. Elle a répliqué un souper, avec les cousins. Elle a laissé tomber sa gang et il a accepté le souper. Ils ont jâzé 3 heures dans un resto près de l'Assemblée nationale. http://www.ledevoir.com/politique/quebec/435170/veronique-hivon-et-sol-zanetti-a-table-pour-le-pays Comme 2 porc-épics qui font l'amour, ils ont pris de grandes précautions. z'ont établi un point d'entente: des Actions de pays. Une pomme de discorde la mécanique référendaire. Ont convenu d'évoluer à partir de points communs, de toucher aux désaccords par la bande... et promettent de se revoir.
    Quand les indépendantistes s'entendront, on pourra mieux répliquer à ceux qui nous dénigrent.

  • Archives de Vigile Répondre

    23 mars 2015

    Djihad littéraire à l'Institut du Monde Arabe (Documentaire 2013)
    https://www.youtube.com/watch?v=B-qaYOD0Ydc
    Documentaire présentant les ouvrages de charia de l'Institut du Monde Arabe: Djihad contre les mécréants, assommer les moines, tuer les Juifs, lapider les fornicateurs, couper les tètes des apostats, violer les femmes captives issues du butin de guerre, la conversion ou la mort, interdiction d'édifier des églises, interdiction de faire sonner les cloches. L'islam classique en livres !
    Exclusif - En 1996, tous les pays arabes ont ratifié la charia !
    http://ripostelaique.com/exclusif-en-1996-tous-les-pays-arabes-ont-ratifie-la-charia/