La guerre est perdue : L'Occident est tombé dans le piège des terroristes

Politique étrangère et Militarisation du Canada

Paris - Il y a un mois, les Canadiens apprenaient avec stupéfaction que des islamistes nés au pays fomentaient une série de coups d'éclat, dont la décapitation du premier ministre, Stephen Harper. Ces 17 jeunes musulmans ne se sont jusqu'ici réclamés d'aucune organisation terroriste. La preuve, selon plusieurs experts et analystes, que la descendance d'Al-Qaida transcende maintenant ben Laden.
Malgré les dénégations officielles, provenant en particulier de la Maison-Blanche, la "guerre globale à la terreur" est à toutes fins utiles perdue, constatent plusieurs experts, dont deux anciens directeurs de la CIA.
En dépit des arrestations de terroristes, de l'organisation de scrutins libres en Irak ou en Afghanistan, du démantèlement de réseaux et de filières, de la mort d'Abou Moussab Al-Zarqaoui, le monde est moins sûr qu'il ne l'était le 10 septembre 2001 et une nouvelle attaque d'envergure contre l'Amérique ou ses alliés est inévitable, ajoutent-ils.
Experts américains interrogés
Le mois dernier, le prestigieux magazine US Foreign Policy a pris l'initiative, avec un groupe de réflexion de Washington, d'interroger sur ce sujet 116 des experts américains les plus réputés, en prenant garde d'équilibrer leur liste entre conservateurs et démocrates.
Parmi eux, un ancien secrétaire d'État, deux anciens directeurs de la CIA et tout ce que les États-Unis comptent d'analystes de renom.
Résultat : ils estiment à 84 % que leur pays est en train de perdre la "guerre au terrorisme, à 86 % que le monde est aujourd'hui plus dangereux" et plus de 8 sur 10 estiment qu'une nouvelle attaque majeure est probable au cours de la prochaine décennie.
"Nous sommes en train de perdre la guerre contre la terreur parce que nous traitons les symptômes et pas les causes", commente Anne-Marie Slaughter, qui dirige à Princeton la Woodrow School of Public and International Affairs. "Notre croyance dans le fait que l'idéologie fondamentaliste islamiste a remplacé le communisme comme ennemi principal correspond exactement à la vision du monde d'Al-Qaida".
Pour Leslie Gelb, président du prestigieux Council on Foreign Relations, la quasi-unanimité du groupe de discussion est attribuable au fait "qu'il est clair pour presque tout le monde que Bush et son équipe ont une conception totalement irréaliste de ce qui peut être accompli par l'emploi de la force militaire".
En France, le concept même de "guerre à la terreur" est remis en cause.
Mal parti depuis le début
"C'était mal parti depuis le début : "guerre à la terreur", c'est aussi ridicule que "guerre à la colère"! On ne fait pas la guerre à la terreur, on fait la guerre à des gens", assure Alain Chouet, ancien cadre de la DGSE (renseignements extérieurs). "Les Américains sont enkystés dans ce concept de war on terror depuis le 11 septembre, donc ils ne posent pas les bonnes questions. Ils ne risquent pas d'avoir les bonnes réponses.
"Vous pouvez toujours massacrer des terroristes, il y en a un réservoir inépuisable", poursuit-il. "Il ne faut pas s'attaquer aux effets du terrorisme mais aux causes : l'idéologie wahabite, l'Arabie Saoudite et les Frères Musulmans. Mais ça, on ne veut pas y toucher.
"Ils ont fait de l'Irak un nouvel Afghanistan. Rajoutez à cela Guantanamo, qui est grotesque et ne sert à rien mais fournit des prétextes, Abou Grhaib et toutes les exactions d'une armée en campagne... Ils sont tombés dans le piège classique tendu par les terroristes : vous amener à taper à côté."
Directeur, de 1996 à 1999, de "l'unité ben Laden" à la CIA, Michael Scheuer est aussi catégorique : "Il est clair que nous perdons. Le seul allié indispensable d'Al-Qaida, c'est la politique étrangère américaine envers le monde islamique !"


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