Jean-Simon Gagné - (Québec) Il y a quelque chose qui s'est brisé dans la belle mécanique du gouvernement Charest.
On ne sait pas exactement quoi. On ne sait pas trop quand ça s'est produit. Mais tout le monde aperçoit les vis et les écrous qui tombent sur le plancher.
Tout le monde, sauf Jean Charest et ses ministres. «La machine baigne dans l'huile», chantent-ils en coeur(sic). Et tant pis si leurs voix sonnent aussi juste que celles d'un groupe de perroquets atteints de laryngite, après un séjour prolongé dans un congélateur.
Ne souriez pas. Même les tours de passe-passe du premier ministre n'ont plus le lustre d'antan. Sans doute parce que M. Charest utilise toujours la même technique de diversion, comme un acteur qui n'aurait qu'une seule mimique à son répertoire.
Vous n'avez pas remarqué? Chaque fois qu'on lui pose une question embarrassante, M. Charest s'esquive en pointant dans la direction inverse.
Si Pauline Marois accuse le Parti libéral d'entretenir des liens trop étroits avec la FTQ, M. Charest reproche aussitôt à la chef du PQ d'avoir prononcé un discours à un congrès du syndicat.
Même chose quand l'ancien ministre Marc Bellemare accuse M. Charest de mentir à propos des liens entre le financement du Parti libéral et l'industrie de la construction. Le premier ministre contre-attaque en s'étonnant que l'impertinent refuse de témoigner devant le Directeur général des élections.
C'est la technique du gars dont la grange a pris feu, et qui suggère à tout le monde d'aller vite faire un tour chez le quatrième voisin, juste au cas où il s'y déroulerait un événement plus spectaculaire...
À l'automne 2008, le premier ministre présentait son Plan Nord comme la plus grande invention depuis l'eau chaude. Moins d'un an plus tard, on apprenait qu'il s'agissait d'une vulgaire stratégie publicitaire.
Plus récemment, l'achat par Hydro-Québec des principaux éléments d'Énergie Nouveau-Brunswick avait des allures de transaction du siècle. Une affaire rentable «dès la première année». «Une preuve que le Canada fonctionne», disait un Jean Charest proche de l'extase.
Tout ça pour déclarer que l'entente présentait un risque «trop élevé», à peine quelques mois plus tard.
Par moments, M. Charest et ses ministres ressemblent à des illusionnistes qui n'arrivent plus à retrouver leur chemin parmi tous les miroirs qu'ils ont installés.
Ces jours-ci, il faut entendre la ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne, défendre les changements apportés en catimini au calendrier scolaire. Surtout, ne dites pas que la manoeuvre visait à accommoder six écoles privées juives orthodoxes, comme le suggèrent des documents obtenus par La Presse Canadienne. La ministre vous pourfendrait comme le dernier des scélérats.
Dans le manuel d'arithmétique du gouvernement Charest, deux demi-mensonges égalent parfois une vérité. Ou est-ce plutôt deux demi-vérités qui finissent par égaler un mensonge?
Finalement, on peut se réjouir que le gouvernement n'ait pas encore déclenché une enquête publique sur l'industrie de la construction.
Au rythme où vont les choses, il faudra aussi enquêter sur les coïncidences qui pullulent dans le petit monde des garderies...
Comment expliquer qu'un grand nombre d'administrateurs de garderies sentent un besoin irrépressible de contribuer à la caisse libérale? Ou qu'une demi-douzaine d'anciens membres de l'exécutif libéral de Lafontaine - la circonscription que représente le ministre de la Famille, Tony Tomassi - se soient lancés dans le domaine des garderies?
Docteur, est-ce contagieux? Pourquoi ces gens n'ont-ils pas investi dans l'embouteillage de bière de racinette ou dans la production de dés en minou? Est-ce qu'on devient administrateur de garderie parce qu'on est membre du Parti libéral ou est-ce qu'on devient libéral parce qu'on est administrateur de garderie?
L'autre jour, j'écoutais Jean Charest expliquer que le système de santé va mieux et que le gouvernement du Québec «bouge».
Soudain, j'ai compris. Le Québec de Jean Charest, c'est comme la colline magnétique, au Nouveau-Brunswick. Quand vous êtes immobile, vous avez l'impression d'avancer. Et quand vous reculez, vous avez l'impression d'être immobile.
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