La famille libérale

Après des années de relations acrimonieuses, la paix semble enfin revenue dans la grande famille libérale.

Élection fédérale 2009

Même si Jean Charest et Michael Ignatieff n'ont pas beaucoup d'affinités sur le plan personnel, le départ de Stéphane Dion, puis l'arrivée au PLC de l'ancien ministre Jean-Marc Fournier et de l'ancien président du PLQ, Marc-André Blanchard, ont créé un climat plus amical.
M. Charest sait très bien que le Parti conservateur n'a plus grand-chose à voir avec celui dont il était jadis le chef. S'il a pu entretenir un temps le rêve d'un retour à Ottawa, ce n'est plus le cas.
Il reste cependant à voir jusqu'à quel point le premier ministre voudra manifester sa préférence pour un gouvernement Ignatieff durant la prochaine campagne fédérale. L'an dernier, M. Charest avait multiplié les attaques contre les conservateurs, mais il faut bien reconnaître que M. Dion n'avait pas fait grand-chose pour s'attirer des bonnes grâces.
Le dernier sondage Léger Marketing-Le Devoir accorde 30 % des intentions de vote au PLC au Québec. C'est nettement mieux que les 23 % obtenus la dernière fois, mais cela n'en constitue pas moins un recul de cinq points depuis juin et seulement 14 % des personnes interrogées accordent leur plus grande confiance à M. Ignatieff, loin derrière Gilles Duceppe (32 %) et Jack Layton (23 %). Le chef libéral fait à peine mieux que Stephen Harper (12 %).
Si le PLC peut raisonnablement espérer faire quelques gains au Québec, M. Charest lui faciliterait certainement la tâche en donnant un petit coup de pouce, préférablement un gros. Encore faudrait-il que M. Ignatieff lui donne une raison de se mouiller. S'il s'agit simplement de traduire le désabusement des Québécois à l'égard des conservateurs, le Bloc québécois fait parfaitement l'affaire.
Une certaine communauté de valeurs plaide en faveur des libéraux, mais quelque chose d'un peu plus positif inciterait sans doute le premier ministre à exprimer ses sentiments plus ouvertement. Pour le moment, on sait seulement que l'élection d'un gouvernement libéral entraînerait la fermeture des mines d'amiante.
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Jeudi, le ministre des Affaires intergouvernementales, Claude Béchard, a invité Stephen Harper à donner de la crédibilité à ses futures promesses électorales en faisant un geste avant le lancement officiel de la campagne, par exemple verser au Québec l'équivalent de ce qu'a reçu l'Ontario pour avoir harmonisé sa taxe de vente à la TPS fédérale, ce qui représenterait 2,6 milliards de dollars.
Il est vrai que les campagnes électorales ont souvent pour effet de stimuler une générosité qui tarde autrement à se manifester, mais M. Ignatieff n'a encore donné aucune indication qu'il serait plus ouvert aux revendications québécoises que M. Harper.
À la Chambre des communes, les libéraux ont voté pour la motion présentée par le Bloc québécois, qui réclamait une juste compensation pour le Québec, mais ses adjoints ont expliqué qu'il s'agissait simplement d'approuver le principe d'une négociation de bonne foi, sans présumer du montant qui pourrait éventuellement être versé.
Bien entendu, M. Ignatieff a dit comprendre la déception du Québec, qui perdra un milliard en raison des modifications arbitraires qui ont été apportées à la formule de péréquation, mais il n'a offert rien de plus que sa sympathie.
Cette semaine, le chef du PLC s'est engagé à rétablir l'équilibre budgétaire sans augmentation d'impôt ou de taxe. Avec un déficit qui dépasse les 50 milliards, toute demande à incidence financière significative risque donc d'être accueillie assez froidement.
À défaut d'assurances explicites, on peut même craindre le pire. Dans le passé, les gouvernements libéraux ont eu la fâcheuse habitude de pelleter leur déficit dans la cour des provinces en leur coupant les vivres.
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Satisfaire certaines demandes du Québec n'entraînerait cependant aucuns frais. Par exemple, il ne coûterait rien de le laisser parler de sa propre voix à la conférence de Copenhague sur les changements climatiques.
Dans une entrevue accordée au Devoir en juin dernier, M. Ignatieff avait cependant été catégorique. Dans son esprit, le Québec a déjà suffisamment de moyens d'exprimer sa différence. Il n'avait aucune intention de traduire plus concrètement sa reconnaissance de la nation québécoise.
Le chef libéral entend demander l'avis de la Cour suprême avant de statuer sur la création d'une commission des valeurs mobilières pancanadienne. Autrement dit, si la Cour en reconnaît la légalité, il serait prêt à aller de l'avant, peu importent les objections du Québec.
La réforme du Sénat n'intéresse pas beaucoup M. Ignatieff, mais la perspective de voir diminuer le poids relatif du Québec à la Chambre des communes ne semble pas l'émouvoir. Dire que l'encadrement du pouvoir fédéral de dépenser ne fait pas partie de ses priorités serait un autre euphémisme. Sans parler du transfert au Québec de la maîtrise d'oeuvre en matière de culture et de communications.
Il existe certainement d'excellentes raisons ne de pas voter conservateur, mais M. Ignatieff a eu une vision du Canada qui est aux antipodes du programme constitutionnel du PLQ. Pourquoi ceux qui souhaitent un renouvellement du fédéralisme appuieraient-ils un parti qui propose le maintien du statu quo?


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