Contre les magouilleurs

La dictature de la productivité

Tribune libre

Nous avons donc des banquiers aux commandes du développement économique de l’État, de l’arbitrage des dépenses et des revenus et du cordon de la bourse. Nul doute que ceux qui évoluaient normalement dans un quasi-monopole n’auront aucun état d’âme à mettre en place des politiques d’austérité afin de maximiser le retour à l’investisseur – le contribuable.. Si la fin justifie amplement, les moyens, eux, laissent une large place au débat, à la discussion, à la confrontation d’idées.

Soit dit en passant, il aurait été judicieux d’adjoindre à nos experts de la cupidité et de l’usure, un représentant des banques alimentaires : nous aurions eu un carré d’as. Surtout que le prix du bœuf haché, aux dernières nouvelles, avait augmenté de 30 %, ce qui n’augure pas très bien pour la consommation de notre mets national – le pâté chinois – dans nos chaumières.

Trêve de digression! Il semble donc que Martin Coiteux, celui-là même qui officie au Conseil du Trésor québécois, se soit inspiré de Marx, en remettant la théorie à l’endroit, pour nous concocter des politiques économiques qui s’enlignent sur la dictature de la productivité. Les travailleurs et les travailleuses de la fonction publique pourront, dorénavant, bénéficier d’une augmentation de leurs revenus salariaux, liée essentiellement à l’indice de productivité de ces fonctionnaires.

La philosophie du «Travaillez! Bande de paresseux», développé assez brillamment par notre héros des Belles histoires du pays du schiste, Lucien Bouchard, a finalement rejoint les hautes sphères des décideurs qui veillent au bon déroulement de notre vie économique. Cette même philosophie qui devrait s’appliquer aux hausses salariales de nos médecins, eux qui gagnent toujours plus en travaillant toujours moins.

Il ne faut pas se le cacher, les trois banquiers et les trois médecins qui occupent des portefeuilles ministériels possèdent leur point aveugle, caractéristique de leur profession d’origine : la taxation des profits outranciers – notamment bancaires et financiers – et l’organisation du travail.

Pour ce qui est de la ponction équitable de l’État sur le fruit de notre labeur et de notre ingéniosité, nos syndicalistes ont déjà élaboré des pistes de solution alternatives qui ressortissent du gros bon sens. Quant à l’organisation du travail, il serait avantageux, pour la collectivité québécoise, que ces importantes personnes aillent faire un stage en milieu hospitalier : ils verraient, de leurs yeux vus, l’état d’extrême tension qui existe dans les départements, étant donné la surcharge de travail. Ils constateraient, de visu, que l’élastique est étiré à son maximum pour tous ceux et pour toutes celles qui ne jouissent pas de la force de frappe d’une corporation puissante et vénale.

J’entendais, tout récemment, un mauvais plaisantin nous faire la morale, sous prétexte qu’on n’est pas ici pour faire du roman. Je dis, plutôt, à vos plumes, mesdames et messieurs! La situation mérite toute notre attention. Exprimons-nous! Il en restera toujours quelque chose. C’est toujours à une prise de conscience à laquelle nous sommes conviés lorsque le débat se fait dans la Cité. Qu’on soit en présence d’une dictature qui ne veut pas dire son nom ou qu’on soit en présence des oukases d’un servile laquais au service des oligarques, cela ne passera pas.

Qu’on se rappelle la magnifique observation suivante : « Le langage est aussi vieux que la conscience, – le langage est la conscience réelle, pratique, existant aussi pour d’autres hommes [et d’autres femmes, il va s’en dire], existant donc alors seulement pour moi-même aussi.»

Ce Québec, comme pays que nous voulons, ne sera pas une terre hospitalière pour tous les magouilleurs, les arnaqueurs, les exploiteurs de ce monde. Qu’on se le dise!


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