Parmi les quelques défauts de la Charte des valeurs québécoises, l'un d’entre eux, pour des raisons que je ne peux m'expliquer (peut-être à cause de mon éducation catholique), a particulièrement retenu mon attention : le maintien du crucifix à l'Assemblée nationale.
La disparition de notre histoire ?
Un des arguments avancés par ceux et celles qui veulent maintenir le crucifix à l'Assemblée nationale est que celui-ci symbolise une grande partie de l'apport de la religion catholique à notre histoire et que ce serait de se couper, en partie, de celle-ci, si nous l'enlevions. Vraiment ?
Comment un peuple qui a plus de 2750 édifices cultuels (Source : Inventaire des lieux de culte du Québec[[1]]) appartenant à différentes traditions ou communautés religieuses sur son territoire, qui a des milliers de noms de rues, de villes, de villages, de lacs et de rivières ayant une connotation religieuse et qui, à travers le « patrimoine parlé », nommément le sacre, se rappelle au quotidien de son histoire avec le catholicisme au Québec, comment un peuple qui a tout ça pourrait oublier l'apport historique (positif ou négatif) de l'Église catholique au Québec ?
Et avec tout ce que je viens d'énoncer, comment pourrions-nous croire que le retrait du crucifix serait un pas de plus vers l'oubli, vers l'automutilation et le reniement de notre histoire ? N'est-il pas complètement exagéré de le prétendre ? Les traces de notre histoire avec la religion catholique sont bien vivantes autour de nous et ce n'est pas en retirant le crucifix de l'Assemblée nationale que celles-ci risquent de disparaître de sitôt. Aux dernières nouvelles, le son des clochers résonne encore partout au Québec.
Le contexte « Duplessien »
Il faut aussi prendre en considération le contexte historique derrière l'arrivée du crucifix à l'Assemblée nationale. C'est Maurice Duplessis qui l’y a introduit durant les années 30.
Et pour bien comprendre toute la complexité du débat entourant le maintien du crucifix, on ne peut faire fi du contexte historique et des raisons qui ont mené à sa position actuelle. Malheureusement, certains chroniqueurs semblent banaliser ce contexte dans leur analyse.
L'excellent texte de Jacques Rouillard (Professeur au département d'histoire de l'Université de Montréal), intitulé Le crucifix de l'Assemblée nationale[[2]] et publié le 27 janvier 2007, résume très bien ce contexte. En voici quelques extraits :
« […] L'Hôtel du Parlement, dont la construction date du milieu des années 1880, contient très peu de symboles religieux même si sa décoration est destinée à rappeler l'histoire et l'identité du Québec. L'architecte responsable de sa construction et de sa décoration, Eugène-Étienne Taché, n'en a pas prévu, si on excepte trois statues de missionnaires parmi les 30 statues qui devaient orner la façade du Parlement.
Au début du siècle, les gouvernements libéraux se limitent à la réalisation des statues des missionnaires Marquette et Brébeuf, privilégiant plutôt celles des militaires, des explorateurs et des hommes politiques responsables de l'avènement de la démocratie. L'ensemble de l'ornementation intérieure et extérieure du Parlement vise à mettre en évidence les origines françaises du Québec, les conquêtes démocratiques de 1791 et 1848 et l'attachement au système politique britannique de monarchie constitutionnelle.
À notre connaissance, il n'a jamais été question pour les gouvernements dirigés par les libéraux, élus sans interruption de 1897 à 1936, d'ajouter des éléments religieux à la décoration du Parlement. Ces gouvernements entretenaient des relations souvent tendues avec le pouvoir clérical, et une aile radicale à l'intérieur du Parti libéral se faisait fort de rappeler la séparation des rôles de l'Église et de l'État.
Pendant les 19 ans où elle a dirigé les destinées de la province, l'Union nationale de Duplessis a été à l'écoute de l'enseignement de l'Église, notamment dans les domaines importants de compétence partagée que sont l'éducation, la santé et les services sociaux. Contrairement aux gouvernements libéraux qui avaient légiféré depuis le début du siècle pour étendre le rôle de l'État dans ces secteurs, celui de l'Union nationale se charge au contraire d'élargir l'emprise cléricale. Pendant les années 50, il résiste à toute réforme du système d'éducation et de santé.
Pour Duplessis, donc, le crucifix placé au-dessus du siège du président de l'Assemblée représentait bien davantage qu'un symbole du passé religieux du Québec: il était le symbole de la nouvelle alliance qui unissait l'Église et l'État. […] »
Cette lecture des événements peut nous amener à tirer les conclusions suivantes :
1. En utilisant l'argument historique pour justifier la présence du crucifix, nous oublions une bonne partie de notre propre histoire, partie où il n'y avait pratiquement aucun symbole religieux à l'Assemblée nationale et aucun crucifix au-dessus du siège du président;
2. Le mariage entre l'État et l'Église ne fût pas un mariage de raison, mais un mariage forcé. Celui-ci ne fût pas l'objet d'un choix éclairé de la population, ni même, à la limite, d'un décret gouvernemental (comme ce fût le cas pour le drapeau du Québec);
3. Le seul but derrière ce geste n'était pas de teinter d'amour et de bonté les décisions du gouvernement, mais bien d'utiliser le clergé à des fins politiques.
À mon avis, le contexte dans lequel le crucifix a été placé à cet endroit est aussi important que la symbolique de l'objet, puisqu'il vient complètement dénaturer « l'esprit » du geste qui aurait dû accompagner une telle décision. Ce n'est pas l'amour ou la bonté qui ont guidé ce geste, mais le goût du pouvoir politique. N'est-ce pas contraire aux valeurs et aux enseignements de Jésus qui, justement, à son époque, avait une dent contre la mauvaise utilisation et l'abus du pouvoir politique et religieux ?
Et à mes collègues indépendantistes qui plaident encore en faveur du maintien du crucifix, j'aimerais vous rappeler un extrait de la Déclaration d'indépendance du Bas-Canada, écrite en 1838, quelques mois après les rébellions patriotes :
« Que toute union entre l'Église et l'État est par la présente déclarée être dissoute, et toute personne aura le droit d'exercer librement telle religion ou croyance qui lui sera dictée par sa conscience. »
Pour terminer cette portion, je vous invite à lire un extrait d'un texte intitulé Vos paupières sont lourdes[[3]] de Josée Legault :
« Disons-le crûment: la confusion et les écrans de fumée règnent en maîtres sur ces questions. Un autre exemple: le fameux crucifix de l'Assemblée nationale.
Pour certains, considérant que l'État est tout sauf neutre et laïque, le retirer serait un affront. Pour d'autres, ce serait éliminer un symbole important de notre histoire, de notre identité et notre culture. D'accord pour le premier argument. Mais pas pour le second.
Car on oublie ceci: l'installation d'un premier crucifix au-dessus du siège du président de l'Assemblée nationale ne date en fait que de 1936. Contexte: nous étions sous le régime de Maurice Duplessis, l'homme qui gouvernait main dans la main avec le haut-clergé catholique. Au point d'ailleurs où ils se fondaient politiquement l'un dans l'autre. La croix et le crucifix furent ainsi mis au service de la puissante armada propagandiste de l'Union nationale.
Ce crucifix est donc avant tout le rappel de son instrumentalisation par Duplessis et de l'influence de l'Église dans les plus hautes sphères du pouvoir. Il symbolise la relation incestueuse qui existait entre l'Union nationale – le politique – et le clergé – le religieux. Pas vraiment de quoi verser dans la nostalgie.
Mais lorsque nous verrons enfin l'instauration au Québec d'une laïcité et d'une neutralité véritables de l'État, le jour sera venu d'exposer ce crucifix dans un musée sous la rubrique "histoire de l'Union nationale"! » - Josée Legault, 1 avril 2010.
Le crucifix, objet patrimonial?
Au Québec, nous avons une Loi sur le patrimoine culturel du Québec. Cette loi a été adoptée à l'unanimité, le 19 octobre 2011. La Loi est entrée en vigueur le 19 octobre 2012.
Adoptée en 1972, la Loi sur les biens culturels a permis de protéger des éléments importants de notre patrimoine, qu'il s’agisse de bâtiments, de sites, d'objets d’art ou d’ethnologie, de collections archéologiques, d'archives ou de documents imprimés. Graduellement, la tendance internationale a été de délaisser la notion de bien culturel au profit de celle, plus large, de patrimoine culturel. Pour doter le Québec d’un cadre législatif ayant une portée plus large, le gouvernement devait donc remplacer la Loi sur les biens culturels.
Deux articles de cette nouvelle Loi ont retenu mon attention :
Loi sur le patrimoine culturel du Québec[[4]] (extraits choisis)
« Article 5. Il est tenu au ministère de la Culture et des Communications un registre dans lequel doivent être inscrits tous les éléments du patrimoine culturel désignés, classés, déclarés, identifiés ou cités conformément à la présente loi.
Ce registre contient une description suffisante de ces éléments du patrimoine culturel.
En ce qui concerne les documents et les objets patrimoniaux classés, le registre contient également le nom de leur propriétaire de même que la mention des aliénations dont le ministre est avisé en vertu de l'article 27.
Article 6. Le registraire du patrimoine culturel, désigné par le ministre parmi les membres du personnel de son ministère, est chargé:
1° de tenir le registre du patrimoine culturel;
2° d'y inscrire les éléments du patrimoine culturel visés à l'article 5 ainsi que les autres mentions prévues par la présente loi; »
Questions :
Si le crucifix à l'Assemblée nationale est véritablement considéré comme un bien ou comme un objet patrimonial, ne devrait-il pas être inscrit au répertoire du patrimoine culturel du ministère de la Culture et des Communications ?
Si, selon nos propres lois concernant le patrimoine culturel, le crucifix de l'Assemblée nationale ne figure pas au rang des biens et objets patrimoniaux et n'est pas inscrit au Répertoire du patrimoine culturel du Québec[[5]], n'est-ce pas là un indice révélateur du fait que cet objet n'a rien de patrimonial ?
De plus, si l'argument patrimonial sert à justifier le maintien d'un symbole religieux dans une institution démocratique, ne devrait-il pas aussi justifier la mise en place de symboles politiques « patrimoniaux » dans les institutions religieuses ? Pourquoi n'y-a-t-il pas de réciprocité « patrimoniale » entre le religieux et le politique ? Serait-ce qu'il y a des symboles qui ne se mélangent pas ?
Le mélange des symboles
Dans un lieu comme l’Assemblée nationale, lieu dont la fonction première est le débat d'idées, la remise en question et la prise de décision objective et collective (en principe, je sais...), ne serait-il pas plus cohérent de mettre de côté tous symboles qui prônent une foi et une certitude absolue comme les symboles religieux ? Peut-on faire fi de la fonction d'un lieu et y apposer un symbole qui ne va pas dans le même sens que celle-ci ou qui a un autre but?
Il me vient à l'esprit un épisode de la vie de Jésus décrit dans la Bible. Lorsque Jésus, lors de son retour à Jérusalem, découvrit les marchands dans le temple, il piqua, et c'est le cas de le dire, une sainte colère. Je crois sincèrement que sa colère ne se dirigeait pas vers les marchands, mais plutôt vers l'activité qui s'y déroulait. Activité qui allait radicalement à l'encontre de la fonction du lieu, celle d'un lieu de prière, de communion avec Dieu. La fonction de l'Assemblée nationale n'a rien à voir avec la fonction d'une église, et ce, même si les deux ont des « élus ».
À mon avis, la fonction première d'un lieu doit être respectée, ce qui sous-entend que certains symboles, de par leur nature, ne peuvent s'y retrouver. Enlever le crucifix à l'Assemblée nationale n'est pas un geste contre la religion catholique et ses croyants. Je crois, au contraire, qu'il s'agit d'un geste de respect. Le même respect qui force les politiciens à ne pas envahir les lieux saints avec des symboles politiques.
Les valeurs « catholiques » et le message véhiculé par son Église
L'Église catholique rejette la sexualité hors mariage, la contraception par des méthodes artificielles et les rapports homosexuels. Et que dire de l'égalité homme-femme.
Peut-on se permettre, dans une institution censée représenter les valeurs démocratiques et égalitaires de notre société (l'Assemblée nationale), d'avoir un symbole associé à ces positions ?
Parce qu'il ne faut pas se leurrer, le crucifix ne fait pas que représenter la mort de Jésus, son sacrifice ou les valeurs d'amour universel prônées par celui-ci; il représente aussi les prises de positions de son « institution ».
En refusant d'enlever le crucifix à l'Assemblée nationale, ne ratons-nous pas une occasion historique d'entrer pleinement dans la modernité et d'affirmer haut et fort les valeurs démocratiques et égalitaires de notre société ?
De plus, faut-il le rappeler, le projet social du Québec n'est plus porté par l'Église catholique.
Comme disent les Anglais « What would Jesus do? »
La meilleure analyse que j'ai eu l'occasion de lire sur la question de la laïcité a été publiée le 25 août 2012 et a été rédigée par Hélios d'Alexandrie : Le Crucifix à l’Assemblée nationale, ou comment la laïcité est inscrite dans le christianisme.[[6]]
À mon humble avis, cette analyse devrait faire sérieusement réfléchir n'importe quels croyants ou pratiquants, puisqu'elle puise ses fondements dans les paroles de Jésus et dans la Bible. J'ai donc choisi de diffuser la presque totalité du texte, tant cette partie est, à mes yeux, la plus significative.
« […] C’est par nécessité et non par choix idéologique que Jésus a conçu la laïcité. La relation avec Dieu, l’amour du prochain et l’élévation sur le plan spirituel procèdent d’une démarche intime et non d’un choix de la collectivité. Il s’ensuit que les manifestations publiques de piété, de charité et d’observance religieuse (vestimentaires et culinaires) relèvent davantage de l’ostentation que de la quête de Dieu. Pour illustrer mon propos je cite les passages suivants de l’Évangile selon Saint Matthieu :
Gardez-vous de faire les bonnes œuvres devant les hommes, pour vous faire remarquer d’eux; sinon, vous n’aurez pas de récompense auprès de votre Père qui est dans les cieux. Quand donc tu fais l’aumône, ne va pas le claironner devant toi; ainsi font les hypocrites dans les synagogues et les rues, afin d’être loués par les hommes; en vérité je vous le dis, ils tiennent déjà leur récompense. Pour toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite, afin que ton aumône soit secrète; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. (Matthieu 6 2–4)
Et quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites : ils aiment, pour faire leurs prières, à se camper dans les synagogues et les carrefours, afin qu’on les voie. En vérité je vous le dis, ils tiennent déjà leur récompense. Pour toi quand tu pries, retire-toi dans ta chambre, ferme sur toi la porte, et prie ton Père qui est là, dans le secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. (Matthieu 6 5–6)
Quand vous jeûnez, ne vous donnez pas un air sombre comme font les hypocrites : ils prennent une mine défaite, pour que les hommes voient bien qu’ils jeûnent. En vérité je vous le dis, ils tiennent déjà leur récompense. Pour toi, quand tu jeûnes, parfume ta tête et lave ton visage, pour que ton jeûne soit connu, non des hommes, mais de ton Père qui est là, dans le secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. (Matthieu 6 16–18)
De cet extrait tiré du « Sermon sur la montagne », on comprend que pour Jésus, la spiritualité authentique se vit dans l’intimité et non à la vue de tout le monde; il en découle que pour les croyants sincères, l’espace public doit nécessairement exempt de religion. Seule une laïcité pleine et entière est en mesure de mettre un frein à l’exhibitionnisme religieux. […]
[…]L’esprit d’humilité, indissociable de l’amour, est l’antidote par excellence contre l’esprit de domination. Pour celui qui « s’élève » au-dessus des autres, la jouissance qu’accorde l’exercice du pouvoir s’accompagne invariablement d’un abaissement sur le plan spirituel. C’est ainsi que Jésus a dissocié et par la même occasion affranchi la religion du pouvoir temporel ; ce faisant il a également affranchi le pouvoir temporel de la religion.
Les pharisiens pour qui le pouvoir temporel et la domination revenaient à Dieu, c'est-à-dire à ses représentants sur terre, n’étaient pas du même avis que Jésus. Ils croyaient lui tendre un piège et l’obliger à se discréditer ou à se contredire en lui posant une question au sujet de la taxe imposée par l’autorité romaine : « Devons-nous payer, oui ou non? » S’il répondait par l’affirmative il serait jugé comme un collaborateur impie. S’il disait non, il reconnaîtrait implicitement que religion et politique sont indissociables. On connaît la réponse de Jésus :
« Pourquoi me tendez-vous un piège? Apportez-moi un denier, que je le voie.» Ils en apportèrent un et il leur dit : « De qui est l’effigie que voici? Et l’inscription? » Ils lui dirent : «De César. » Alors Jésus leur dit : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. » (Marc 12 15-17)
D’aucuns ont jugé la réponse de Jésus comme une « pirouette » ou une non-réponse, il n’en est rien et d’ailleurs l’évangéliste rapporte que les pharisiens : « … étaient fort surpris à son sujet. » En montrant à Jésus un denier à l’effigie de l’empereur romain, les pharisiens reconnaissaient implicitement leur participation à la vie économique de l’empire, les avantages qu’ils en retiraient s’accompagnaient naturellement d’obligations dont le paiement d’impôt. C’est le sens du : « Rendez à César ce qui est à César ». Et pour bien indiquer qu’il faut séparer la religion de l’économie et de la politique Jésus a aussitôt ajouté : « Et à Dieu ce qui est à Dieu », traçant ainsi une ligne de démarcation nette entre les devoirs du citoyen et ses obligations religieuses.
En plaçant l’être humain et la conscience humaine au-dessus de la loi religieuse, Jésus a établi les fondements de la laïcité ; aux pharisiens qui lui reprochaient de transgresser la loi religieuse et de guérir un malade le jour du Sabbat, il a dit:
« Est-il permis, le jour du Sabbat, de faire du bien plutôt que de faire du mal, de sauver une vie plutôt que de la tuer? » (Marc 3 4)
Plus tôt il s’était adressé aux mêmes pharisiens en ces termes :
«Le Sabbat a été fait pour l’homme et non l’homme pour le Sabbat. » (Marc 2 27)
L’épisode de la femme adultère est aussi explicite. Elle est amenée devant Jésus par les scribes et les pharisiens qui l’établissent juge de l’affaire afin de le mettre à l’épreuve et avoir matière à l’accuser :
« Maître cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère. Or, dans la loi, Moïse nous a prescrit de lapider ces femmes-là. Toi donc, que dis-tu? »… Comme ils persistaient à l’interroger, il se redressa et leur dit : « Que celui d’entre vous qui est sans péché lui jette le premier une pierre! »… Eux entendant cela, s’en allèrent un à un, à commencer par les plus vieux; et il fut laissé seul, avec la femme toujours là au milieu. Alors, se redressant, Jésus lui dit : « Femme, où sont-ils? Personne ne t’a condamnée? » Elle dit : « Personne, Seigneur. » Alors Jésus dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, désormais ne pèche plus. » (Jean 8 4-11)
Ce passage est intéressant en ce sens que Jésus n’a pas édicté de nouvelle règle ni abrogé une loi religieuse, il s’est contenté de placer les gens devant leur conscience. Du coup la loi religieuse perd son caractère divin, elle est désormais assujettie à la conscience humaine. Partout où elle s’invitait dans les affaires des hommes, Jésus a pris le parti de l’être humain en le libérant de l’observance aveugle ou obsessionnelle de la loi.
En plus d'affirmer la laïcité dans le champ légal, Jésus a établi les fondements de l'humanisme.
[…]Il s’agit de toute évidence d’une image religieuse, plusieurs le tiennent pour un héritage culturel. Mais il est bien plus que cela, car le crucifix représente Jésus-Christ, celui qui, par sa parole, cette parole adressée à des gens simples, a changé la face du monde et le cours de l’histoire. Une lecture attentive des Évangiles nous amène à conclure que la modernité tire son origine de l’enseignement de Jésus.
Jésus a été condamné à mourir sur la croix à cause de ce qu’il a dit et enseigné. Son message était à ce point en avance sur son époque qu’il a profondément insécurisé les autorités religieuses et politiques de son temps. Mais on ne tue pas les idées ni les paroles, pas celles qui sont porteuses d’amour, de don de soi, de pardon, de paix, de respect, d'authenticité, de liberté, d’égalité, de non-violence ; et pas celles qui dissipent toute confusion entre le sacré et le politique, entre la religion et la loi, entre la foi et son exhibition. […] »
Chers ami(e)s croyant(e)s, posez-vous sincèrement la question : Jésus aurait-il permis un tel mélange des symboles ? Aurait-il tout simplement permis une représentation physique (idole) qui enferme dans un objet l'essence même de son message ou de son sacrifice?
Comme mon collègue Vladimir de Thézier me l'indiquait lors d'une discussion sur le sujet : « L'ironie est que non seulement la croix et surtout le crucifix est un symbole macabre qui nous concentre sur la mort de Jésus au lieu de sa philosophie de vie mais qu'un Judéo-christianisme vraiment intègre devrait interdire ce type d'idole selon les commandements de la Bible (Exode 20:3-6, Isaïe 44:9-20). »
N'y a-t-il pas, dans cette volonté de maintenir le crucifix à l'Assemblée nationale, un double discours flagrant sur la laïcité de nos institutions démocratiques? La dernière tentation de Bernard Drainville est-elle de ne pas vouloir froisser les Québécois de souche dans son projet de Charte des valeurs québécoises afin de préserver sa base électorale potentielle en vue de faire des gains aux prochaines élections et de se doter d'un gouvernement majoritaire?
P.S. Note à mes collègues indépendantistes, je n'apprécie guère plus les symboles de la monarchie à l'Assemblée nationale.
1 http://www.lieuxdeculte.qc.ca/
2 http://www.ledevoir.com/non-classe/128878/le-crucifix-de-l-assemblee-nationale
3 http://bit.ly/PoWDM6
4 http://www.mcc.gouv.qc.ca/index.php?id=5121
5 http://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/accueil.do?methode=afficher
6 http://www.postedeveille.ca/2012/08/le-crucifix-a-lassemblee-nationale-ou-comment-la-laicite-est-inscrite-dans-le-christianisme.html
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10 commentaires
Serge Jean Répondre
1 octobre 2013Vos arguments monsieur Croteau, sont très convainquants; peut-être pourrions-nous attendre que l'indépendance du Québec soit réalisée avant de jauger cette décision.
Serge Jean
Archives de Vigile Répondre
30 septembre 2013@ M. Croteau
La richesse d'un symbole et sa force ce sont toutes les valeurs qu'il exprime et qu'on peut y voir. Le commentaire d'Hélios d'Alexandrie ci-dessus en est un bel exemple. On a la liberté d'alimenter un symbole et de s'en nourrir. Maurice Duplessis n'était pas seulement un politicien, c'était aussi une personne qui croyait sincèrement en des valeurs éternelles. Si on admet que le peuple s'est approprié le crucifix de l'Assemblée nationale comme un symbole de son identité ( consultez tous les sondages à cet effet ), l'endroit où il se trouve, au-dessus de la chaise du président, pourrait aussi rappeler, de manière silencieuse, son bon droit aux politiciens ainsi que leur devoir de servir. Pourquoi pas?
Jean-Claude Pomerleau Répondre
30 septembre 2013@ Sébastien Croteau
Notre État existe dans une continuité organique depuis l'Habitation de Québec, qui en fut la cellule embryonnaire, jusqu'à nos jours.
L'Église de Rome a joué un rôle politique déterminant dans notre histoire. Il s'agit donc d'une institution politique qui a porté notre nation durant des siècles. On lui doit notre existence.
La présence du crucifix à l'Assemblée nationale témoigne donc du passage d'une institution politique (Église) à une autre institution politique(l'État du Québec).
Maurice Duplessis a été l'acteur politique qui a fait ce lien qui préfigure la Révolution tranquille, moment où les Habitants (*) ont quitté l'Église pour s'investir dans un État à structurer.
JCPomerleau
(*) Les Habitant, une entité politique reconnue après l'annexion de 1763 par L'Acte de Québec de 1774. Et Guy Carleton et Georges Washington, dépendaient de l'adhésions des Habitants pour la suite de l'histoire.
JCPomerleau
Archives de Vigile Répondre
30 septembre 2013À Sébastien Croteau,
Vous avez cité de larges extraits de ma chronique en appui à votre prise de position concernant le maintien du crucifix à l'Assemblée nationale. Je ne conteste pas votre droit de le faire, ni celui d'utiliser ma démonstration pour en arriver à des conclusions diamétralement opposées aux miennes. Mais vous auriez dû, par souci d'objectivité, le mentionner franchement aux lecteurs, ou à tout le moins citer les passages que vous avez choisi d'occulter.
Pour le bénéfice des lecteurs je me permets de citer deux passages de l'introduction; le troisième constitue le dernier paragraphe de ma chronique, il fait partie intégrante de ma conclusion.
"le débat se situe, non sur la place de la religion dans le champ politique (aucune place ne lui est reconnue), mais sur la signification d’une représentation à caractère religieux au sein de l’institution politique..."
"la question qui se pose est de savoir si religion chrétienne et laïcité sont antinomiques au point de devoir occulter toute référence au christianisme dans l’espace public."
"Le crucifix à l’Assemblée Nationale nous rappelle simplement la place centrale qu’occupe Jésus-Christ dans notre civilisation. Cela nous ne devons jamais l’oublier."
Et pour qu'on ne l'oublie pas il faut constamment le rappeler: la laïcité, la séparation de la religion et de la politique, les droits de l'homme, l'égalité de tous les êtres humains, l'amour et la compassion, etc. sont des valeurs que Jésus-Christ nous a données et pour lesquelles il est mort sur la croix.
Il est temps que les peuples d'occident prennent conscience de leurs racines et se réconcilient avec eux-mêmes.
Hélios d'Alexandrie
Archives de Vigile Répondre
30 septembre 2013@ M. Perron et à M. Pomerleau.
Comme il semble qu'on puisse '' contextualisé '' l'apport de la religion catholique à l'histoire du Québec, je me permets humblement de vous rappeler qu'on peut aussi '' contextualisé '' la façon dont a été mise le crucifix à l'Assemblée nationale. Et le contexte de la mise en place du crucifix n'a rien à voir avec la primauté du droit du peuple dans l'enceinte du parlement ou de son identité. Elle est simplement l'instrumentalisation du clergé par Duplessis, ce qui, en soi, enlève toute la grandeur que vous semblez lui donner.
De plus, faut-il le rappeler, ce symbole est un symbole d'abord et avant tout religieux. Lui enlever sa connotation religieuse revient au même que de lui enlever sa connotation '' historique ''. Et quoi de mieux qu'un musée pour célébrer la valeur historique d'un objet soi-disant patrimonial.
Si ce symbole exprime la primauté du droit du peuple, comme vous le dites, est-ce le peuple qui a choisi de le mettre là où il est? Je cherche encore les traces d'une décision du peuple qui valide ce geste et je n'en trouve pas.
@ M. Perron : afin d'apporter de la crédibilité à vos arguments, il serait peut-être judicieux d'élaborer davantage et de répondre concrètement aux arguments que j'avance plutôt que de les définir bêtement comme étant des interprétations à la va-comme-je-te-pousse. Dans un débat d'idées, on appelle ça argumenter.
Archives de Vigile Répondre
29 septembre 2013En refusant d’enlever le crucifix à l’Assemblée nationale, ne ratons-nous pas une occasion historique d’entrer pleinement dans la modernité.
On vas entrer pleinement dans la modernité en se débarassant du crucifix..pas fort votre affaire .
Désolé pour vous au cas ou vous ne seriez pas encore au parfum de la modernité ... le Québec est déja pleinement dans la modernité et en plus avec la présence du crucifix sur un mur de l'Assemblée Nationale .
L'argument de la modernité en est un particulièrement vicieux et il est celui utiliser par la plupart de ceux qui demandent aux québécois de se débarswer de tout leur héritage historique et surtout de leur traditions aux motifs d'être moderne ..vide et moderne lol .
Par contre ceux qui veulent nous faire retourner en arriere ce sont des gens qui prétentent que de remplacer les symboles religieux qui ont été ceux de la religion majoritaire des québécois par ceux des immigrants venus du Magrheb et des pays musulmans est un grand signe de progres ,d'ouverture et de modernité.
Quand les québécois rechignent a acheter ce discours gnagna ,on les culpabilisent en leur disants qu'il ne sont pas entrer dans la modernité a cause d'un crucifix a l'Assemblé Nationale
Vous cacher mal votre jeu monsieur en utilisant la modernité.
J'ai entendu aussi ce genre d'arguments face a ceux qui demandent que le francais soit protégrer
Le francais c'est inutile,ça sert a rien ,il faut être moderne et aller vers l'anglais car c'est la langue universelle et patati et patata
Si accepter les signes religieux et le voile islamiste des musulmanes dans la fonction publique au lieu des signes religieux chrétiens c'est enter dans la modernité ..vous en avez manquer des bouts mon ami .
Si votre modernité tiens seulement a un crucifix a l'Assemblée Nationale qui représente un symbole auquel les québécois disent tenir dans tout les sondages et qui de surcroit ne fait aucun prosélytisme accrocher sur son mur
Les valeurs « catholiques » et le message véhiculé par son Église
L’Église catholique rejette la sexualité hors mariage, la contraception par des méthodes artificielles et les rapports homosexuels. Et que dire de l’égalité homme-femme.
Et que prévoit l'islam : la mort pour les homosexuels et les apostats ,la lapidation pour la femme infidèle et bien plus encore .
Puis dans la fonction publique il faudrais enduré et avoir a tout les jours dans la face les tenants de cette religion qui affiche haut et fort les symboles de leur religion l'islam qui en réalité est une idéologie politico religieuse des ténèbres qui prone l'intolérance envers toute les autres croyances n'en déplaise a l'imbuvable troll islamophile Sylvain Racine
Le crucifix a l'Assemblé Nationale ne demande pas que les lois religieuses soient appliquer au Québec contrairement àux des musulmans venus ici pour faire pression pour que la charia soit appliquer avec des islamistes comme Charkaoui et leur idiots utiles comme Charles Taylor qui était en faveur de leur demande pour la charia en Ontario.
Martin Perron Répondre
29 septembre 2013Vraiment "pus capab" d'entendre ces esbrouffes contre le symbole du crucifix à l'Assemblée nationale. Un conseil, prenez simplement note qu'un peuple, en majorité, voit dans cette croix un symbole de son identité et aussi de la primauté de son droit dans l'enceinte du parlement. Il est clair pour tous que le symbole de cette croix est identitaire et n'exprime aucun lien d'aucune sorte avec une autorité religieuse. Comme M. Pomerleau l'exprime si bien, cette croix appartient au peuple et elle lui permet de faire le pont entre son Histoire et le présent en plus d'entrevoir l'avenir. Je me réjouis de la force d'un tel symbole et utiliser la petite histoire et des interprétations à la va-comme-je-te-pousse pour discréditer la valeur de ce symbole m'exaspère vraiment. Les politiciens font de la politique ? Vraiment, je ne savais pas!
@ Sylvain Racine
Êtes-vous un troll?
Ah! puis je regrette ma question, ne répondez pas svp.
Archives de Vigile Répondre
29 septembre 2013Monsieur Croteau
Excellent texte! Je pense exactement comme vous dans votre dernier paragraphe lorsque vous affirmez que cette Charte (catholique pour moi) qui conserve le crucifix à l'Assemblée Nationale, a été créée de toute pièce pour ne pas froisser les Québécois de souche à la prochaine élection qui, apparemment, aura lieu le 9 décembre prochain afin de permettre au gouvernement PQ de pouvoir gouverner majoritairement.
En plus, cette élection est planifiée pour nuire à l'Option Nationale qui est en pleine course à la chefferie. Rien ne change au Québec en politique; c'est encore semblable, à certains égards, au temps de Duplessis. La corruption est toujours là et le Québec continue à se faire exploiter (je me retiens pour les mots...) dans le régime fédéral "canadian". Plus ça change, plus c'est pareil! D'accord avec vous sur toute la ligne!
André Gignac 29/9/13
Archives de Vigile Répondre
29 septembre 2013"Comment un peuple qui a plus de 2750 édifices cultuels (Source : Inventaire des lieux de culte du Québec [1]) appartenant à différentes traditions ou communautés religieuses sur son territoire, qui a des milliers de noms de rues, de villes, de villages, de lacs et de rivières ayant une connotation religieuse et qui, à travers le « patrimoine parlé », nommément le sacre, se rappelle au quotidien de son histoire avec le catholicisme au Québec, comment un peuple qui a tout ça pourrait oublier l’apport historique (positif ou négatif) de l’Église catholique au Québec ?"
Voilà, et le peuple en a rien à foutre du crucifix de l'Assnat M. Pomerleau. De fait, avant toute cette histoire de Charte, 99% de la population ne savait même pas qu'il y avait un crucifix à l'Assnat.
Ce serait si simple de l'enlever pour éviter tout ce débat. Personne ne va voter Québec solidaire ou Caq parce que le PQ enlèverait le crucifix de l'Assnat. Si c'est le cas, franchement, les Québécois ne sont pas encore dûs pour avoir un pays. C'est tellement pathétique toute cette histoire!
De plus, il faut cesser de voir la Charte comme un moyen d'aller vers l'indépendance, voyons!!! Les électeurs libéraux et caquistes ne vont pas voter PQ simplement parce qu'ils sont en faveur de la Charte.
Parce que vous insistez pour garder le crucifix à l'Assnat, c'est Québec solidaire qui va faire le plein de votes aux prochaines élections.
Le PQ, au moment des prochaines élections, devrait aussi faire un référendum sur la Charte et le crucifix: Voulez vous oui ou non notre charte? Voulez-vous oui ou non garder le crucifix à l'Assnat?
Jean-Claude Pomerleau Répondre
28 septembre 2013Le lien organique entre l'Église de Rome (ses institutions) date du tout début, sous Champlain. Sans cette contribution, surtout suite à l'annexion (1763), où pendant 2 siècles l'Église de Rome va devenir l'armature de notre État qui nous a permis de conserver notre cohésion nationale,la nation que nous sommes n'existerait tout simplement pas.
Ce crucifix n'appartient pas à l'Église ou au intellos, mais bien au peuple qui sait ce qu'il lui doit.
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Le crucifix : le passage du témoin
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Le débat sur le crucifix ne porte qu’accessoirement sur la croyance. Bien plus fondamentalement, il s’agit du rôle qu’a pu jouer l’Église de Rome comme institution politique dans la genèse de notre nation.
Ce débat offre l’occasion de refaire corps avec notre histoire. Et cela commence par une question simple : Qu’est-ce qui fut nécessaire pour qu’apparaisse, se développe, et survive jusqu’à aujourd’hui, une nation française en Amérique ? Et la réponse est : les assises d’un État. C’est exactement à cela qu’ont contribué l’Église de Rome et ses institutions.
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http://www.vigile.net/Le-crucifix-le-passage-du-temoin
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JCPomerleau