La CSN propose une Charte de la laïcité

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Laïcité — débat québécois


Claudette Carbonneau (Photo Robert Mailloux, La Presse)

Presse Canadienne - Un peu plus de 30 ans après la Charte de la langue française, le Québec est mûr pour se doter d'une nouvelle loi fondementale pour proclamer, cette fois, son caractère laïque, estime la centrale syndicale CSN.

Dans son mémoire qui sera présenté le mois prochain à la commission Bouchard-Taylor sur les pratiques d'accommodement raisonnable, la CSN suggère la rédaction au Québec d'une Charte de la laïcité, pour affirmer la «nécessaire neutralité» de l'appareil d'État et de ses institutions.
Sans aller jusqu'à interdire le port du voile à l'école, la Charte de la laïcité imposerait, par contre, une neutralité complète aux enseignants et au personnel du réseau scolaire.
«Nous croyons que puisque le réseau de l'éducation est maintenant déconfessionnalisé et que la religion n'y sera plus enseignée à compter de septembre 2008, il faut faire le dernier pas vers la laïcité. La neutralité devra ainsi s'appliquer aux personnes qui y travaillent par l'interdiction de manifester ses convictions religieuses», mentionne le mémoire de 25 pages.
En vertu de la Charte, les étudiantes seraient autorisées à porter le hijab en classe. Cependant, le port du voile intégral - burka, niqab, tchador - serait banni des institutions d'enseignement.
«Malgré le fait que nous croyons que les élèves, étudiants et usagers des services publics ont le droit d'exprimer leurs croyances religieuses, nous considérons que ce vêtement qui n'est porté que par bien peu de personnes empêche et brise la communication. Il fait aussi partie de ces choix individuels qui ne sont basés sur aucun principe religieux généralement reconnu», précise le mémoire de la centrale.
Dans l'ensemble des services publics, les gestionnaires pourraient prendre appui sur la Charte pour décliner toute requête d'usager qui refuse, pour des motifs religieux, les services d'un employé en raison de son sexe.
Par exemple, un CLSC ne pourrait plus interdire aux hommes l'accès à des cours prénataux pour accommoder des musulmanes ou encore un religieux orthodoxe ne pourrait plus exiger qu'une agente de la Société de l'assurance automobile ne s'efface derrière son collègue masculin.
«Au plan des services publics, il ne doit pas y avoir de services séparés pour les hommes et pour les femmes. Nous croyons que la société québécoise est mûre pour ça. Ce serait salutaire et cela éviterait les dérapages des derniers mois», a dit la présidente de la centrale, Claudette Carbonneau, en entrevue à La Presse Canadienne.
Adoptée par une loi de l'Assemblée nationale, la Charte aurait aussi pour effet, croit la CSN, de court-circuiter des décisions comme celle, récente, du Directeur général des élections du Canada de permettre aux femmes portant le niqab ou la burka ü des voiles couvrant le visage ü de voter aux élections fédérales.
Peu importe la religion ou la culture, la Charte de la laïcité rendrait obligatoire l'identification des citoyens «lorsque c'est requis pour l'ensemble».
La Charte «présente l'avantage d'éviter le développement anarchique, inégal et à la pièce de réponses aux demandes d'accommodement ou d'ajustement pour motifs religieux en fixant d'entrée de jeu plusieurs balises», argue la CSN.
Par ailleurs, contrairement au Conseil du statut de la femme, la CSN s'oppose à la proposition d'amender la Charte québécoises des droits et libertés pour y subordonner la liberté de religion à l'égalité des sexes.
«Jamais nous ne songerions à remettre en cause la liberté d'opinion, d'expression et de conscience dont la liberté de religion fait partie, plaide la centrale syndicale. Ce ne sont pas les chartes qu'il faut remettre en cause, mais bien davantage, plusieurs jugements rendus par les divers tribunaux.»
De l'avis de Mme Carbonneau, l'adoption d'une Charte de la laïcité aurait justement pour effet d'extirper la question des accommodements raisonnables de la griffe des tribunaux au profit du pouvoir politique.


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