L'opposition aux visées d'Ottawa grandit

À son tour, l'Industrielle Alliance rejette le projet d'agence unique des valeurs mobilières

AMF - Québec inc. VS Toronto inc.


François Desjardins - Au lieu de se consacrer au remplacement des 13 agences provinciales de valeurs mobilières par un organisme réglementaire pancanadien, Ottawa aurait intérêt à investir davantage d'énergie dans la lutte contre les crimes économiques, a estimé l'Industrielle Alliance.
L'Industrielle, quatrième compagnie d'assurances au Canada, ajoute ainsi son nom à une longue liste d'établissements et de sociétés du Québec, dont Power, le Conseil du patronat, la Caisse de dépôt et placement et Quebecor, qui ont exprimé leur opposition à ce projet du gouvernement conservateur au cours de la dernière semaine.
Ottawa, dont le projet de loi en préparation sera soumis à la Cour suprême pour un avis constitutionnel, a déjà mis sur pied un «bureau de transition» qui occupe des locaux à Toronto et à Vancouver. À l'exception du Québec, de l'Alberta et du Manitoba, les provinces et territoires ont tous commencé à y participer.
L'affaire prend de plus en plus des allures de confrontation politique puisque le gouvernement de Jean Charest, de son côté, a demandé l'avis de la Cour d'appel du Québec, plus haut tribunal de la province.
«L'Industrielle Alliance estime que le secteur canadien des services financiers est bien servi par l'encadrement réglementaire actuel, y compris par l'Autorité des marchés financiers [AMF] pour les institutions québécoises. La réglementation est rigoureuse et largement harmonisée entre les différentes provinces et les différents territoires», a fait savoir l'assureur dans un communiqué.
Son président, Yvon Charest, ne souhaite «pas de confrontation sur un sujet aussi crucial et aussi important pour l'avenir de nos économies». Selon lui, il faudrait plutôt miser sur «le dialogue et la concertation afin d'en arriver à un encadrement optimal et harmonisé».
Le ministre fédéral des Finances, comme d'autres acteurs politiques avant lui, croit que le Canada fait rire de lui car son système est décentralisé. Il estime qu'une agence centrale permettrait des gains d'efficacité pour les marchés financiers, ce que ses détracteurs disent être une fausseté car le système actuel n'a rien de coûteux pour les sociétés qui sollicitent l'épargne des investisseurs.
«Ce dont le secteur des services financiers a le plus besoin actuellement, c'est une meilleure application de la réglementation en ce qui a trait aux crimes économiques», a dit le président de l'Industrielle Alliance en évoquant le rôle que le gouvernement fédéral doit jouer dans le renforcement des procédures judiciaires.
À ce chapitre, le gouvernement conservateur vient de déposer à nouveau son projet de loi C-52, dont une des particularités consistait à introduire une peine minimale de deux ans pour les fraudes de plus d'un million.
La semaine dernière, une coalition de sociétés québécoises a fait connaître son opposition au projet fédéral d'agence réglementaire pancanadienne.
Absent de la liste, le Mouvement Desjardins a publié un communiqué quatre jours plus tard. Ce dernier «demeure convaincu que la formule "passeport", telle que mise en place par plusieurs autorités provinciales, reste encore le modèle à privilégier. Il reconnaît, par ailleurs, l'importance d'une coordination à l'échelle canadienne en matière de valeurs mobilières, et ce, comme à l'échelle internationale».
Par ailleurs, un ancien président de la Bourse de Montréal, Pierre Lortie, a récemment écrit une analyse selon laquelle les arguments utilisés pour mousser une prise de contrôle du fédéral comportent de sérieuses lacunes. De plus, dit cet ancien patron de Bombardier Transport aujourd'hui chez Fraser Milner Casgrain, «les questions concernant la protection des investisseurs et leur propriété sont de compétence provinciale».
Les provinces, ajoute M. Lortie, dont le texte a été transmis au Devoir, ont mis sur pied «un régime réglementaire qui est conforme aux normes internationales et se classe parmi les meilleurs».


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