VALEURS MOBILIÈRES

L’offensive fédérale rencontre des difficultés

La publication des règles qui devait avoir lieu le 19 décembre est remise au printemps 2015

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Ça leur apprendra !

Le gouvernement fédéral reporte au printemps 2015 la publication des règlements qui encadreraient la future commission pancanadienne des valeurs mobilières, son projet qui vise au final à remplacer des bureaux comme l’Autorité des marchés financiers (AMF).

Sans révéler les détails de ce contretemps, le Régime coopératif de réglementation des marchés des capitaux a indiqué vendredi dernier dans un communiqué discret qu’il est devenu impossible de respecter la date du 19 décembre. Cela dit, « les provinces participantes ont réalisé des progrès considérables sur la préparation du projet de règlements initiaux ».

L’opération, un vieux rêve qui circule dans les coulisses d’Ottawa depuis des décennies, a été lancée il y a quelques années par l’ancien ministre Jim Flaherty. En 2011, sa première mouture avait été jugée inconstitutionnelle par la Cour suprême, qui avait toutefois laissé une porte ouverte en disant que le fédéral pourrait travailler, de façon coopérative avec les provinces, à la création d’une agence axée sur le risque systémique.

Le risque systémique fait référence au potentiel de contamination qui guette le secteur financier lorsqu’un grand établissement s’effondre.

Le Québec et l’Alberta, qui représentent 40 % de la capitalisation boursière du pays, s’opposent fermement aux efforts d’Ottawa, mais plusieurs provinces ont décidé d’embarquer : l’Ontario, la Colombie-Britannique, le Nouveau-Brunswick, la Saskatchewan et l’Île-du-Prince-Édouard. En septembre 2014, les cinq ont signé un protocole d’entente. Celui-ci est lié à un avant-projet de loi provincial et à un avant-projet de loi fédéral.

Réduire les bouleversements

Selon le communiqué diffusé vendredi dernier, les gouvernements semblent vouloir réduire au minimum les changements qui pourraient découler d’un nouveau régime.

« Afin de maintenir la continuité et de réduire au minimum l’interruption pour les participants des marchés, les provinces participantes envisagent de proposer des règlements initiaux qui maintiennent considérablement l’harmonisation obtenue en vertu de la structure actuelle », peut-on lire. « Cela simplifierait la transition au régime coopératif et formerait une base solide pour la coopération avec les provinces qui décident de ne pas participer au régime. »

Actuellement, la réglementation canadienne repose entre les mains des provinces, qui coordonnent leurs gestes par l’entremise d’un organisme nommé Autorités canadiennes de valeurs mobilières, dont la présidence est attribuée sur une base rotative. Ottawa estime que la création d’une seule agence simplifierait la vie aux entreprises qui font appel aux marchés de capitaux.

La décision de remettre à plus tard la publication des règles survient quelques semaines après une série d’articles très critiques publiés dans le Financial Post par Jeffrey MacIntosh, un professeur bien en vue à l’Université de Toronto, où il est titulaire de la Chaire du droit des marchés de capitaux de la Bourse de Toronto.

« C’est peut-être la conséquence d’un certain nombre de critiques », a dit mardi M. MacIntosh lors d’un entretien au Devoir. « Je ne suis pas le seul qui parle. Ils se sont embarqués, à l’origine, dans une refonte majeure des règles. Ils ont peut-être décidé de ne pas faire ça, ou peut-être conclu ensemble qu’il y avait trop de changements et que ça risquait d’aliéner trop de monde. »

Dans ses articles, M. MacIntosh a affirmé notamment que les nouvelles règles permettraient au régulateur en chef, sans audience ni préavis, de « dresser un procès-verbal qu’il fait signifier à l’auteur présumé de la violation » s’il a « des motifs raisonnables de croire qu’une violation a été commise ». Quiconque reçoit un tel avis se défend ensuite devant nul autre que le régulateur.

« Je ne comprends pas pourquoi plus de gens ne s’expriment pas ouvertement au sujet de ce projet. Où sont les bureaux d’avocats, où sont les entreprises ? Pourtant, je parle à des avocats ici, à Toronto, et ils sont inquiets. Un associé d’un grand cabinet m’a dit, par exemple, qu’il faudrait des semaines pour comprendre les nouvelles règles et toutes les conséquences », a dit M. MacIntosh.

Ottawa et les provinces participantes aimeraient que la nouvelle structure soit en place en 2015.

Au Québec, la surveillance du secteur financier relève de l’AMF, un organisme autofinancé qui compte environ 650 employés. La nouvelle structure pancanadienne prévoit des bureaux régionaux, mais le siège serait situé à Toronto.


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