La nouvelle année ne commence pas au premier de l’an. Elle commence en septembre quand les citoyens – les sujets en monarchie – se mettent au travail. Je présume que ce travail, comme dans tous les pays du monde a pour objet la construction de la cité et l’établissement de rapports harmonieux entre les dites cités…
Alors pourquoi ne pas voir dès maintenant vers quels chantiers notre nation doit tourner les yeux en priorité si elle veut donner un sens à son action ?
Pour moi, la vision déterminante qu’il faut entretenir, c’est celle de l’aménagement du territoire, d’où découlent toutes les activités politiques principales, soient celles de l’architecture et de l’urbanisme. À commencer par la reconstruction du centre-ville de Lac-Mégantic. Car voilà un lieu qui pourra devenir un test de notre capacité nationale d’imaginer l’imagination ; d’imaginer, de dépasser la stricte gestion administrative pratico-pratique et de l’embourbement du conformisme par la bureaucratie indifférente ; Il faut un débat public en cette matière!
La semaine dernière (le 22 aout) le chef du parti libéral (d’opposition), M. Philippe Couillard, a proposé, dans cet ordre d’idées, que l’État organise un concours entre les facultés d’aménagement de nos universités pour bien déterminer comment réorganiser le territoire de Lac-Mégantic. Cette suggestion est d’une importance capitale.
C’est la première fois qu’un homme politique du Québec cherche ainsi à objectiver l’aménagement territorial et à se servir des experts formés par l’État pour y arriver. Cela est méritoire. Mais ce n’est pas tout à fait assez. Ce sera assez quand l’État se donnera un organisme permanent, responsable auprès du conseil des ministres, pour bien juger les résultats du susdit concours.
Espérons que le gouvernement actuel, qui n’est pas démuni en la matière, s’intéressera de près à la question et fera de cette politique une priorité. Ce sera une manière de court-circuiter la spéculation des promoteurs !
Il y a deux ou trois lunes j’abordais ici cette question ; je disais que l’État, celui de Québec, qui est responsable en la matière – en tout cas qui devrait l’être – ne jouait pas son rôle de chef d’orchestre en aménagement territorial, en architecture et en urbanisme. Surtout pas dans le cas de la ville de Lac-Mégantic qui doit renaitre de ses cendres.
L’État n’a pas d’organisme de contrôle en la matière et il ne semble pas vouloir s’en donner. Les paysages, disais-je, pourraient ainsi souffrir de la carence et les citoyens souffrir de ne pas vivre dans le meilleur environnement qui soit. Le débat, en la matière, en tout cas, ne démarre pas.
Comme cela se produit souvent, des détracteurs ont vite sauté sur l’occasion et ont monté le cheval de la critique. Ils ont laissé entendre que, tout compte fait, mieux valait laisser le conseil municipal, bien que simple organisme administratif, décider par lui-même de l’organisation de l’urbain, et de son architecture.
Pour cela il suffirait d’engager un expert-conseil, - lié à des promoteurs? - et le tour serait joué. La base aurait décidé. Et cela serait mieux que de voir l’État mettre le nef de ses «fonctionnaires» dans la marmite municipale. Cette critique est injuste et bien trop terre à terre.
Car en réfléchissant de cette manière on fait montre d’ignorance quant à la nature de l’État. C’est l’État qui est souverain en ce domaine et c’est lui qui a la responsabilité de voir comment développer la nation harmonieusement, comment servir celle-ci et comment tirer profit des engagements financiers qui sont les siens.
C’est l’État qui paye à grands frais, chaque année, la formation de centaines d’architectes et d’urbanistes ( dans trois facultés universitaires principales ). Et il ne s’intéresserait pas à ce que cela donne pour la collectivité ?
Un organisme de supervision du planning municipal en matière d’architecture et d’urbanisme, pour guider les municipalités, y compris celle de Montréal, s’impose. La médiocrité en l’instance n’est-elle pas criante ? La commission Charbonneau ne nous le dit pas clairement ? Faut-il rappeler que les États, dans tous les pays du monde assument cette responsabilité et créent parfois des «ministères de la Ville».
Il ne s’agit pas, pour l’État, de tout décider à la place des citoyens.
L’imagination doit être libérée à tous les niveaux. Mais une agence – un ministère peut-être – redevable directement au conseil des ministres, se mettrait au service des citoyens pour aider ceux-ci à mieux voir comment ils peuvent faire passer leur rêves à la réalité ; ceci sans que les intérêts particuliers des promoteurs-experts viennent bloquer la dite imagination populaire. Tous les organismes professionnels, du reste, ont des bureaux de contrôle qui révisent les gestes de leurs membres.
L’indépendance d’action des architectes est une affaire encore plus importante. C’est une affaire d’État. Le mauvais planning a des conséquences de longue durée et peut démoraliser la citoyenneté au lieu d’élever son âme.
Un professeur de philosophie politique, Étienne Tassin, parlait de tout ceci dans la revue Relations ce mois-ci. Après avoir traité de l’opposition qui existe entre les « pragmatistes » et les « utopistes » il concluait ceci : « On ne peut mieux servir les humains qu’en leur laissant imaginer leur monde, car c’est par l’imagination qu’advient un monde qui peut prétendre être un monde humain ».
Oui, en effet, et c’est pour cela que l’État doit bien choisir ses conseillers en architecture et en urbanisme ; et par la suite les laisser libres afin qu’ils viennent au secours des municipalités ; qu’ils aident celles-ci à bien laisser cours à leurs vrais désirs, à leurs vrais projets, ben à l’abri de la spéculation sur les sols et de la prébende sur le design.
Qui peut dire qu’en cette matière d’imagination créatrice, le Québec est allé au bout de ses capacités? Les maires et les chambres de commerce font des pieds et des mains pour «attirer les touristes» comme ils disent et les lois permettent aux tripots de prendre place sur les places publiques, parfois devant les églises ; pire, ils laissent n’importe quel promoteur immobilier inculte construire des immeubles conçus de manière repoussante. Et cela ne concernerait pas la collectivité?
Le responsable de ce dossier du mois d’août de Relations, justement, M. Jean-Claude Ravet, le dit mieux que moi. L’imagination, dit-il, « est avant tout la fidèle compagne de la liberté et de la joie de vivre. Elle célèbre la beauté de la vie et du monde sensible, et elle élève spontanément en son nom des barricades devant les assauts des forces conformistes et coercitives ».
Notre gouvernement, par conséquent, se mettra-t-il à notre service un bon jour de cette année, pour aider Lac-Mégantic à se reconstruire ; cela afin que tout le Québec puisse s’ inspirer de l’expérience et permette de libérer l’ imagination. L’indépendance c’est ça!
La rentrée
L'État s'intéresse-t-il à l'aménagement territorial ?
Place à l'imagination créatrice
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2 commentaires
Lise Pelletier Répondre
25 août 2013Le Parti Québécois doit se hâter dans ce dossier car lors de la dernière visite de Philippe Couillard dans la région, il a abordé ce sujet, ses petits amis doivent déjà se bousculer à la porte.
Archives de Vigile Répondre
25 août 2013Oui l'aménagement du territoire doit être planifié pour le bien commun, c'est notre résidence après tout. Qui laisserait passer un oléoduc près des sources d'eau, une route sur nos terres agricoles, un trains chargé de matières dangereuses dans nos parcs ? Des cambrioleurs dans la maison ? Des voleurs dans nos gouvernements ? Et bien , je crois bien que c'est NOUS qui dormons.
M Dubé