Les coupures dans la culture

L’arbre qui cache la forêt

Une habile diversion pour gagner les élections

Chronique de Louis Lapointe

Ils sont plusieurs à dénoncer les conservateurs de Harper depuis le début de l’automne, surtout des artistes. Harper a commencé par s’attaquer à eux, un des groupes les moins nantis de la société, en leur coupant quelques petits programmes qui leur permettaient de survivre. Le revenu moyen d’un artiste au Québec est de 13, 000$ par année. Pendant que le gouvernement conservateur de Harper investit 20 milliards$ de nos impôts dans l’armement militaire, il se trouve plusieurs Québécois pour estimer que des coupes de 50 millions$ chez les gras dur de la culture vont permettre au Canada de sauver de l’argent aux contribuables. Un geste responsable diront les plus crédules. 50 millions$ c’est un peu plus de 1$ par personne, 4$ par famille moyenne, alors que les 20 milliards$ dans l’armement et la guerre représentent 500$ par personne et 2,000$ par famille moyenne, un investissement responsable diront encore les mêmes plus crédules.
Je sais bien que la présence militaire du Canada en Afghanistan n’est pas un enjeu de la présente campagne, la reconnaissance de la Nation québécoise non plus, pas plus que le déséquilibre fiscal et le financement de nos universités. Harper nous a promis de retirer les troupes en 2012, il a reconnu la Nation québécoise, le déséquilibre fiscal est chose du passé depuis que Jean Charest a baissé nos impôts en 2007 et le financement des universités est réglé depuis qu’il a autorisé le dégel des droits de scolarité des étudiants la même année. Voilà pourquoi nous ne parlons que de cet important enjeu sur toutes les tribunes, les 50 millions$ coupés aux artistes. Le sujet auquel les médias québécois ont probablement consacré le plus de temps d’antenne depuis le début de cette campagne, surtout la SRC. Les conservateurs ont trouvé le moyen de faire porter la campagne québécoise sur un enjeu qui n’en était pas un. 50 millions$, un montant ridicule, même pas le coût des études de faisabilité pour la construction du CHUM. C’est moins que les 900 millions$ perdus par les petits investisseurs de Norbourg, et beaucoup moins que les 13 milliards$ perdus par la Caisse de dépôt et de placement du Québec dans les PCAA. On appelle ça la diversion.
Le financement de la culture n’est pas un véritable enjeu de la présente campagne, pas plus que la stérilisation des personnes handicapées en fût un en Allemagne en 1933. Il s’agit juste d’un petit dossier qui ne coûtera pas cher à régler, juste quelques dollars, mais qui rapportera beaucoup en votes. Les Allemands s’étaient offusqués qu’Hitler veule stériliser les personnes handicapées. Devant ce tollé, il avait cédé. Il prouva alors qu’il n’était pas l’effroyable nazi que les gauchistes dénonçaient alors, cet homme pouvait reculer, il pouvait faire preuve de souplesse. On pouvait donc avoir confiance en son jugement. Un homme qui fit des jeux de Berlin un si grand succès, mis à part l’épisode Jesse Owen.
Je pressens déjà les éditoriaux de Pratte et Dubuc dans la Presse à quelques jours de la fin de la présente campagne : « Harper n’est pas cet exécrable homme d’extrême droite que dénoncent le Bloc, les Libéraux et le NPD, il a su reculer sur un enjeu important comme la culture…». Lorsqu'il reculera sur la question de la culture et qu’il reconnaîtra le pouvoir administratif du Québec en cette matière, comme il a reconnu la Nation québécoise, les conservateurs auront fait un grand pas pour les artistes de notre nation, un gain de quelques millions de dollars. Nous pourrons alors voter pour lui en toute quiétude. Le sort de notre langue, de notre culture, de notre nation, de notre économie et de nos jeunes soldats québécois seront entre de bonnes mains, celle d’un homme de jugement. Un homme qui a permis que les fêtes du 400e de Québec soient un grand succès, malgré l’opposition de quelques artistes et séparatistes qui auraient aimé profiter de l’occasion pour fêter Félix.
Dans le fond, nous savons tous que si Harper peut s’attaquer impunément aux artistes comme il le fait présentement, même s’il recule stratégiquement sur cette question avant la fin de la présente campagne, il pourrait bien, un jour ou l’autre, définitivement régler le sort des derniers méchants séparatistes qui habitent encore la tour de Radio-Canada à Montréal, on parlera de centaines de millions de dollars. Il n’y aura alors plus personne pour s’en offusquer, ni à Ottawa, ni à Québec. Ils l’auront bien mérité, car, après tout, tous ces méchants séparatistes ont voulu briser le Canada. Ils ont même profité de la soirée des Gémeaux pour cracher sur le gouvernement conservateur de Harper.
Dans le fond, Harper pourrait bien être l’homme qu’il faut au Canada pour débarrasser définitivement le Québec de la vermine séparatiste qui pourrit sa vie artistique.
Louis Lapointe

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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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