L'aérospatiale québécoise dans la course aux retombées

Le contrat de 17 G$ du gouvernement fédéral pour renforcer l'armée fait saliver l'industrie québécoise

17. Actualité archives 2007



Stéphane Gagné - La grappe industrielle de l'aérospatiale au Québec est en train de s'organiser afin d'obtenir le maximum de retombées du plan d'investissement de 17 milliards de dollars (G$) du ministère de la Défense nationale visant à renforcer les forces militaires canadiennes.
Ce plan, annoncé l'été dernier par le gouvernement de Stephen Harper, prévoit l'achat de 17 aéronefs de transport tactique et de 16 hélicoptères de transport moyen à lourd, au coût de 13 G$.
Bien que les maîtres d'oeuvre de ces contrats seront américains, dont Boeing, le ministre de l'Industrie, Maxime Bernier, s'attend à ce que les entrepreneurs produisent au Canada un dollar d'activité économique pour chaque dollar de contrat qu'ils obtiendront.
" Nous ne nous attendons pas à obtenir beaucoup de contrats de la part des maîtres d'oeuvre, car ceux-ci ont déjà leurs sous-traitants, " affirme Suzanne Benoît, directrice générale d'Aéro Montréal, le nouveau secrétariat de la grappe industrielle du secteur aérospatial qui a pour mandat d'en accélérer la croissance et de coordonner la mise en place d'un environnement propice à la hausse de la productivité.
Mme Benoît donne toutefois deux exemples de retombées qui pourraient survenir. " Boeing pourrait décider d'établir un partenariat avec un centre de technologie québécois pour en faire un centre d'excellence en matériaux composites, dit-elle. L'entreprise pourrait aussi décider d'investir dans la création d'une chaire de recherche en aérospatiale. "
Des secteurs porteurs
Afin de diriger les investissements des maîtres d'oeuvre aux bons endroits, Industrie Canada a déjà déterminé les neuf secteurs stratégiques les plus porteurs. Il s'agit de la fabrication avancée et des nouveaux matériaux; l'avionique (le matériel électronique conçu pour les aéronefs); les systèmes de communication et de contrôle; les systèmes de propulsion; la sécurité et la protection; les capteurs; la simulation et la formation; les technologies spatiales; les avions sans pilote.
Partant de ce travail du fédéral, Aéro Montréal a mis sur pied un groupe de travail spécial qui aura pour objectif de maximiser les retombées industrielles des contrats militaires annoncés. Ce groupe est présidé par Jean-Pierre Montreux, président de CAE Électronique, un fabricant de simulateurs de vol mondialement reconnu, et il est formé de dirigeants d'entreprise, d'organismes de recherche et de syndicats. " Le comité évalue la capacité industrielle du secteur dans chacun des neuf secteurs identifiés par Industrie Canada, affirme Mme Benoît. Il travaille à préparer une liste de produits que l'industrie peut fournir à Boeing et aux autres maîtres d'oeuvre éventuels afin de les aider à remplir leurs obligations pour ce qui est des retombées. "
Le comité aura un bon travail de promotion à faire pour attirer le plus de retombées ici, car le gouvernement fédéral ne veut pas établir un pourcentage qui permettrait au Québec d'obtenir sa juste part. " La politique du gouvernement Harper dans ce domaine est de laisser les forces du marché jouer, affirme Mme Benoît. Aéro Montréal espère toutefois obtenir au moins 55 % des retombées, ce qui correspond au poids de l'industrie québécoise dans l'ensemble canadien pour ce qui est des ventes [11,4 G$ de ventes sur un total de 21 G$ en 2006]." Mme Benoît croit que le fait de ne pas atteindre cet objectif aurait pour effet d'entraîner l'effritement de la base industrielle de l'aérospatiale au Québec et nuirait à l'économie canadienne.
Une industrie militaire importante
Les chances que le comité atteigne son but sont toutefois très bonnes. Car parmi les 241 entreprises de la grappe industrielle de l'aérospatiale, certaines réalisent déjà une bonne part de leur chiffre d'affaires dans le domaine militaire. Qu'on pense à Héroux-Devtek, qui fabrique des composants de trains d'atterrissage pour l'armée de l'air américaine, à L-3 MAS (anciennement Bombardier Défense), qui effectue l'entretien des CF-18 canadiens, ou à CMC Électronique (anciennement Marconi) qui oeuvre dans le domaine de l'avionique. Cette entreprise a d'ailleurs obtenu récemment un important contrat de modernisation de l'avionique de poste de pilotage de 15 avions militaires de la Force aérienne de Finlande. À ces trois entreprises importantes, il faut ajouter plusieurs sous-traitants aussi présents dans le domaine militaire.
Certaines entreprises plus connues pour oeuvrer dans l'aérospatiale civile ont également d'importantes activités dans le secteur militaire. C'est le cas de Bombardier Aéronautique, qui fabrique notamment le Global Express. Cet avion existe également en une version militaire de surveillance aérienne utilisée, entre autres, par la Royal Air Force britannique, selon le site Internet français Aeroweb.
D'autres entreprises, comme CAE, vendent des simulateurs de vol d'avions de chasse à beaucoup de clients dans le monde entier, alors que Pratt et Whitney, à Longueuil, fabrique des composantes de moteurs d'hélicoptères de guerre.
D'autres entreprises bien placées
Par ailleurs, le programme du ministère de la Défense nationale prévoit investir plus de 4 G$ dans l'achat de trois navires ravitailleurs et de 2 300 camions. Dans le domaine des véhicules, le fabricant Oerlikon, de Saint-Jean-sur-Richelieu, semble bien placé pour obtenir le contrat ou une partie de celui-ci. Le journal Les Affaires du 7 octobre 2006 rapportait en effet qu'Oerlikon s'était associée au fabricant de camions militaires américain Stewart & Stevenson afin de remporter la mise. Elle espère ainsi fabriquer les cabines, procéder à l'assemblage final et peut-être même devenir un centre d'entretien pour ces véhicules. C'est à suivre.
dossiers@transcontinental.ca
Encadré(s) :
Secteurs où l'on retrouve des entreprises québécoises
Aérospatial 46 %
Techno. des comm. 13 %
Matériel roulant 8 %
Artillerie et munitions 21 %
Autres 12 %
Contrats octroyés par le ministère de la Défense en 2005-2006
Ontario 43 %
Manitoba et Saskatchewan 4,2 %
Alberta 9 %
C.-B. 7,4 %
Provinces de l'est 14,7 %
Québec 22 %
SOURCE : TECHNOPÔLE DÉFENSE ET SÉCURITÉ GRAPHIQUES : LES AFFAIRES
Source : Technopôle Défense et sécurité Graphiques : les affaires


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