PARTI CONSERVATEUR DU CANADA

Jean Charest est lancé dans la course à la chefferie du Parti conservateur

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Le retour de Jean Charest ne fait pas que des heureux


Il souhaitait faire le saut depuis des années. C’est maintenant chose faite. Jean Charest est officiellement candidat à la chefferie du Parti conservateur fédéral. L’ancien chef du Parti progressiste-conservateur et ex-premier ministre québécois compte vanter son expérience sur ces deux scènes politiques pour se présenter comme un rassembleur qui saurait gagner une élection générale. Mais bien conscient que ce ne sont pas tous les conservateurs qui le verront ainsi, M. Charest a amorcé sa tournée à Calgary pour tenter de les rassurer.


Le site Web a été lancé. Le compte Twitter, créé. Le slogan aussi a été dévoilé : « Bâti pour gagner ». L’argument de vente de Jean Charest est clair.


 
 



« Je veux unir ce parti », a-t-il martelé en soirée. « Et je peux vous garantir que s’il y a une chose que je connais et que j’ai apprise en politique, c’est comment gagner », a-t-il insisté lors de son discours d’une douzaine de minutes dans une brasserie de Calgary.


Ce premier événement de campagne ne réunissait qu’une centaine de personnes. Le camp Charest a prétexté que la salle ne permettait pas d’accueillir un plus grand nombre d’invités.


Pour leur tendre la main, l’aspirant chef leur a promis une place au sein d’un Parti conservateur sous sa gouverne et de se faire le défenseur d’une croissance économique comprenant la construction d’infrastructures énergétiques et d’oléoducs. M. Charest a en outre répété qu’il respecterait les champs de compétence des provinces. Deux promesses qui lui ont valu des applaudissements, chez les militants albertains qui s’étaient déplacés jeudi soir.


Jean Charest a en outre souligné le « fier héritage » de Stephen Harper, dans de passage dans le bastion de l’ancien premier ministre.


« Depuis sa fondation, le Parti conservateur a toujours été une grande coalition. À chaque fois que ses forces vives étaient réunies, il a formé le gouvernement et réalisé de grandes choses pour le Canada », a fait valoir par voie de communiqué l’homme de 63 ans, qui ressaute à pieds joints dans l’arène politique. Non seulement Jean Charest dit vouloir coaliser tous les conservateurs sous une même tente, mais il plaide aussi vouloir rallier les Canadiens alors que l’unité nationale « est mise à mal par de multiples divisions ».


Ses supporteurs tiennent le même discours. L’ancien ministre et lieutenant pour le Québec Christian Paradis joint sa voix à la leur. Dans une déclaration écrite, M. Paradis note que son ancien patron Stephen Harper avait le premier « su unifier [le] parti et gouverner le Canada ». M. Charest est à son avis « un politicien aguerri et rassembleur », qui « est la personne tout indiquée pour gouverner le Canada en cette période d’instabilité ». L’ex-sénateur André Pratte s’est aussi joint à son équipe à titre de conseiller.


Le lancement de campagne s’est fait au moyen d’entrevues médiatiques et d’une courte vidéo sur son tout nouveau compte Twitter. Signe du défi qui l’attend s’il veut convaincre suffisamment de membres conservateurs de l’appuyer, M. Charest ne comptait encore qu’un peu moins de 8000 abonnés en fin de soirée. Son principal rival, Pierre Poilievre, en a rejoint plus de 324 000 sur Twitter.


Jean Charest devra se faire connaître des conservateurs et recruter un très grand nombre de membres s’il veut se faire élire chef le 10 septembre prochain. Le député Poilievre — qui a lancé sa campagne il y a un mois — récoltait 41 % d’appuis auprès d’électeurs conservateurs et Jean Charest, 10 %, selon un sondage Léger mené cette fin de semaine avant qu’il confirme sa candidature. Un autre 33 % des répondants était toutefois indécis.


À la défense du pétrole


Après avoir quitté le Parti progressiste-conservateur en 1998 pour rejoindre le Parti libéral du Québec et tenir tête au Parti québécois, M. Charest martèle aujourd’hui avoir toujours défendu les « valeurs conservatrices » : un conservatisme fiscal, l’économie de marché, des politiques économiques pour aider les familles et un fédéralisme décentralisateur.


Son premier arrêt de campagne en Alberta visait à rassurer les conservateurs qui pourraient lui reprocher d’avoir créé la bourse du carbone du Québec ou d’avoir dirigé une province qui a rejeté des projets énergétiques.


M. Charest n’a pas abordé sa tarification du carbone, mais a affirmé qu’il serait plus que disposé à approuver de nouveaux oléoducs. Il a d’ailleurs pris le soin de rappeler que son gouvernement avait approuvé le dernier construit au Québec, entre Montréal et Lévis.


« Le Canada est un pays riche en ressources. Et nous pouvons avoir des débats sur le climat, car ce sont de vrais débats », a-t-il avancé. « Mais sachez que nous pouvons marcher et mâcher de la gomme en même temps », a-t-il argué.


Citant la guerre en Ukraine, il a fait valoir que le Canada pouvait aider l’Europe à cesser d’être dépendante de régimes comme celui de la Russie. Un argument brandi par plusieurs conservateurs, notamment M. Poilievre.


Il n’a toutefois pas précisé à quels endroits ces oléoducs pourraient traverser le Québec pour rejoindre la côte est. Et alors qu’en entrevue au réseau TVA en matinée il avait soutenu que tout nouveau projet d’oléoduc devrait néanmoins avoir « l’acceptabilité environnementale et sociale » — ce qui avait notamment freiné le projet Énergie Est —, il n’a pas évoqué de telles conditions devant les conservateurs de Calgary.


Jean Charest a dénoncé l’augmentation prévue de la taxe carbone du gouvernement libéral de Justin Trudeau le 1er avril. « Ça n’a aucun sens. » Il n’a pas détaillé ce qu’il en ferait. Pierre Poilievre a déjà promis de l’abolir. En point de presse après son discours, M. Charest a indiqué qu’il en aurait plus à dire au fil de sa campagne.


Il a cependant d’entrée de jeu scandé que les lois C-69 (resserrant le processus d’évaluation environnementale) et C-48 (interdisant le transport pétrolier dans les eaux au large de la Colombie-Britannique) devaient disparaître — deux lois auxquelles le premier ministre albertain Jason Kenney s’est toujours opposé.


De nouveaux reproches, sans répliques


Avant même que Jean Charest tienne ce premier rassemblement, le camp de Pierre Poilievre a répété ses attaques à son endroit, le qualifiant de « libéral » ayant créé une taxe carbone. « C’est un peu cynique qu’il s’habille en bleu pour essayer de dire qu’il est conservateur », a lâché le président de la campagne Poilievre au Québec, le sénateur Claude Carignan.


M. Charest a rappelé jeudi qu’il avait aussi toujours été en faveur de projets d’oléoducs au pays.


M. Carignan a fait un parallèle avec l’ancien chef Erin O’Toole, qui a été limogé par une partie de son caucus qui l’accusait d’avoir trop souvent changé de position pour se faire élire à la chefferie puis par l’électorat canadien.


M. Charest avait aussi plaidé au Globe and Mail, la semaine dernière, que pour rassembler une vaste coalition de conservateurs, il ne ferait pas campagne contre les conservateurs sociaux — qui s’opposent à l’avortement, à l’aide médicale à mourir et qui définissent le mariage comme l’union entre un homme et une femme. Il n’a pas détaillé, encore là, comment se traduirait cette main tendue à ces milliers de conservateurs très influents lors de courses à la chefferie.


Bien que les hostilités aient été déjà bien lancées contre lui, , Jean Charest a refusé d’y répliquer. « Cette campagne va être dure », a-t-il reconnu dans son discours en soirée. « J’ai des adversaires qui passent plus de temps sur ma campagne que sur la leur. C’est un compliment », a-t-il réagi, moqueur.


Après son passage en Alberta, Jean Charest ira à Vancouver ce vendredi avant de rentrer au Québec.




 

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