Israël, le déclin d'un État colonial

La plupart des occupations coloniales ont fini par finir ; c'est une question de temps.

Tribune libre 2010

''Le colonialisme, c'est maintenir quelqu'un en vie, pour boire son
sang goutte à goutte.'' Massa Makan Diabaté.
***
Nul besoin du Hamas, de l'Iran, du Hezboallah ou d'une quelconque
"flotille de la liberté" pour envisager la disparition de l'État d'Israël.
Ce pays âgé de 62 ans, s'active tout seul à sa propre disparition. Son
comportement suicidaire répond à une logique de l'histoire bien démontrée.
Celle de toute puissance coloniale qui avance inexorablement vers sa fin.
Le compte à rebours est rythmé par chaque victime innocente, qu'elle soit
palestinienne ou israélienne. La machine coloniale est animée par la mort,
y compris par sa propre mort.
En 1948, l'ONU dominé alors par des puissances coloniales, a reconnu la
naissance d'Israël. Le colonialisme était encore à la mode. La plupart des
pays du sud étaient occupés par une puissance ou par une autre. Faut-il
rappeler que ce ne sont pas les juifs de Palestine qui ont créé Israël. Ce
sont des juifs sionistes des pays d'Europe qui ont installé par la force un
État religieux suite à une opération de nettoyage ethnique en Palestine.
Pour caricaturer le discours colonialiste des sionistes d'Israël Tom
Segev, historien israëlien écrivait le 29 décembre 2008 au journal Haaretz
: ''Nous sommes les représentants du progrès et des lumières, évolués aux
plans rationnel et moral, alors que les Arabes sont primitifs, foules
violentes et enfants ignorants qui doivent être éduqués et se voir
enseigner la sagesse. Bien entendu par la méthode de la carotte et du
bâton, comme le charretier le fait avec son âne''. Le propre d'une
occupation coloniale c'est de renier la dignité du peuple occupé. De le
traiter et le considérer comme inférieur, voire inexistant. Accorder aux
palestiniens de Gaza une attention humanitaire va à l'encontre de la
politique coloniale d'Israël. La terre de Palestine existe, mais pas les
palestiniens.
Ainsi la thèse de ''La terre sans peuple pour un peuple sans terre''
s'est inscrite au cœur du projet sioniste. Une forme de négationnisme
qu'aucune loi au monde ne punit encore. Un négationnisme soutenu par une
formidable machine médiatique pro-sioniste et par les déclarations des
dirigeants occidentaux justifiant les attaques d'Israël par son fameux
droit à se défendre (Sarkozy a déclaré que l'agression israëlienne est
disproportionnée comme si Israël était dans son droit d'attaquer dans les
eaux internationales).
Mais après 62 ans de résistance palestinienne, une évidence s'impose.
Tôt ou tard, les palestiniens auront leur pays. Un seul pays sur l'ensemble
du territoire de la Palestine historique où juifs, musulmans et chrétiens
seront des citoyens à part entière. Un pays démocratique et laïque, celui
que l'Organisation de Libération de la Palestine avait envisagé dès sa
création.
De nombreux juifs d'Israël, dont Abraham Burg (Fils d'un dirigeant
historique du Parti national religieux), arrivent à cette conclusion :
''Cela ne peut plus fonctionner. Définir l'État d'Israël comme un État juif
est le début de la fin. Un Etat juif, c'est explosif, c'est de la
dynamite''. Un État islamique en Palestine serait tout aussi explosif. La
seule solution pour mettre fin à l'islamisme du Hamas, c'est de mettre fin
au statut religieux de l'État d'Israël. Le sionisme est une forme
religieuse du colonialisme. Un cadeau empoisonné que les sionistes se sont
donné à eux-mêmes avec le support des grandes puissances.
Indépendamment qu'on soit pour ou contre l'existence d'Israël, une
lecture froide de l'histoire démontre que cet État ne constitue pas un fait
historique accompli. C'est plutôt une parenthèse parmi d'autres parenthèses
de l'histoire. La création d'Israël répond à une conjoncture particulière
dont les racines remontent au début de l'industrialisation et la découverte
du pétrole au Moyen Orient. Cela coïncidait avec la naissance du mouvement
sioniste de Theodore Herzl à la fin du 19e siècle.
Au cours de la Première guerre mondiale, le puissant lobby sioniste est
parvenu en 1917 à obtenir de l'Angleterre la déclaration de Balfour qui
promettait aux juifs d'Europe un État sur la terre de Palestine. Selon le
juif américain antisioniste Benjamin Harrisson Freedman, l'Allemagne a vu
dans les manœuvres sionistes une trahison qui lui a fait perdre la
première guerre. La revanche allemande est sans nom. Après la découverte de
l'horreur nazi, l'Europe devait soulager sa conscience. Israël s'est imposé
et l'indépendance de la Palestine, qui devait suivre celles des autres pays
arabes, a été retardée.
Après la reconquête de Jérusalem par Saladin en 1187, ce dernier,
contre l'avis de ses généraux, avait ordonné que les juifs puissent rester
chez-eux avec leurs biens et le droit d'accès à leurs lieux saints. Cela
explique le lien naturel de plusieurs juifs palestiniens, dont Ilan Halevi
(grand intellectuel et un des conseillers politiques de l'autorité
palestinienne), avec leur terre ainsi que leur participation active dans la
résistance contre l'occupation sioniste.
Aujourd'hui le comportement criminel d'Israël envers une population
démunie, notamment dans les trois dernière années, rappelle tous les
massacres qui ont précédé la libération des peuples occupés. Palestine,
Algérie, Maroc, Inde, même histoire, même combat, même parcours vers
l'indépendance.
La plupart des occupations coloniales ont fini par finir ; c'est une
question de temps.

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Mohamed Lotfi66 articles

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Journaliste et réalisateur de l'émission radiophonique Souverains anonymes avec les détenus de la prison de Bordeaux





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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    4 juin 2010


    Je vois que mon ami Charbonneau a de grands trous dans son éducation européenne....
    Norman Finkelstein, dont les deux parents ont survécu à l'holocauste, a décrit, de façon magistrale, toute l'industrie de l'holocauste. Une belle heure de lecture sur ce site.
    http://www.vho.org/aaargh/fran/div/racket/holindustry/nfhol/nfholind1fr.html

  • Serge Charbonneau Répondre

    3 juin 2010

    Il faut faire attention, Monsieur Tremblay, de ne pas réécrire l'Histoire.
    Je ne crois pas que le récit fut transformé en holocauste exclusivement juif suite à la guerre de six jours.
    La répression nazie contre les Juifs était bien réelle (ce qui ne veut pas dire que les nazis ne massacraient pas les Tsiganes, les "malades", les noirs et tous ceux qui pour eux nuisaient à la pureté de la race arienne). On n'a qu'à penser à la nuit de cristal ou à l'étoile de David devant être portée. Le peuple juif a été le plus ciblé et l'Holocauste est un génocide juif.
    Il m'apparaît bien vrai de dire « qu'à la découverte de l’horreur nazie, l’Europe devait soulager sa conscience. Israël s’est imposé ».
    L'horreur... L'horreur contre les Juifs a incité à instaurer Israël en se préoccupant fort peu de l'injustice faite aux Arabes.
    Le choc de l'horreur permet de justifier les "injustices" de certains gestes.
    Pensons à l'horreur du 11 septembre 2001 qui a fait que plusieurs pays ont dit oui à l'injustice de massacrer l'Afghanistan et même l'Irak. L'un était pour "soulager sa conscience", l'autre un peu pour "soulager son besoin de punir" l'horreur vécue.
    La création de l'État d'Israël se discutait avant la folie nazie, tout comme l'invasion de l'Afghanistan se discutait avant le 11 septembre.
    L'horreur permet de faire accepter des gestes qui en temps "normal" seraient difficiles à faire passer. Je crois qu'il n'est pas faux de dire que la création de l'État d'Israël a été permise grâce à l'horreur de la folie nazie.
    Serge Charbonneau
    Québec

  • Archives de Vigile Répondre

    3 juin 2010

    "Après la découverte de l’horreur nazi, l’Europe devait soulager sa conscience. Israël s’est imposé et l’indépendance de la Palestine, qui devait suivre celles des autres pays arabes, a été retardée."(Mohamed Lotfi)
    Pourquoi les pays d'Europe sentiraient-ils un besoin de soulager leurs consciences de ses supposées horreurs nazis qu'ils ont combattu ?
    Ça ne tient pas la route.
    Israel a été créé bien longtemps avant la popularisation de l'holocaust. Le récit des "horreurs des nazis" en 1948 n'avait pas cette exclusivité envers les victimes juives. C'est suite à la guerre de six jours que le récit fut transformé en holocaust juif exclusivement et en sigmatisation d'antisémitisme envers tout l'occident pour un supposé refus d'accueillir les juifs en fuite et pour collaboration.
    Ce mensonge a fait l'affaire des dirigeants des pays colonisateurs au détriment de la conscience de leurs populations. Israel pouvait alors servir leurs basses oeuvres de conquête du pétrole arabe.