Investissements culturels: Charest réclame l'autonomie

Jean Charest veut que le Québec soit le maître d'oeuvre des investissements culturels sur son territoire.

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Parler pour ne rien dire..., surtout pour ne rien faire


Photo PC
Alexandre Robillard - Le premier ministre Jean Charest a brandi l'étendard de la souveraineté culturelle, vendredi, en réclamant une entente qui garantirait au Québec l'entière gestion des fonds fédéraux destinés à la culture et aux communications.

M. Charest a aussi demandé le rétablissement d'investissements fédéraux pour la culture et le développement économique abolis par les conservateurs au cours des derniers mois, ce qui a suscité un tollé notamment au Québec.
Lors d'un discours au congrès de l'Association de la construction du Québec, M. Charest a ainsi soumis ses priorités pour la campagne fédérale, ajoutant qu'il se réservait une autre intervention du même genre avant les débats des chefs à la télévision.
Devant son auditoire, M. Charest a demandé aux partis fédéraux de s'engager à négocier une entente Canada-Québec sur la culture et les communications qui, a-t-il dit, ne nécessiterait pas de rouvrir la constitution.
Le premier ministre, qui s'est permis de longs apartés humoristiques au début et à la fin de son discours, a affirmé que sa demande n'était pas nouvelle et s'apparentait à un «concept de souveraineté culturelle» qui a été beaucoup utilisé à l'époque de l'ancien premier ministre libéral Robert Bourassa.
«Ce que je veux c'est de la maîtrise d'oeuvre, je ne veux pas qu'on donne l'impression qu'on en vient à un débat constitutionnel, a-t-il dit ensuite lors d'un point de presse. Mais la maîtrise d'oeuvre en pratique ça veut dire que le Québec est celui qui décide des orientations et qu'on met en place des programmes qui reflètent ce que nous sommes.»
M. Charest n'a pas voulu avancer quelle somme une telle entente pourrait représenter, mais il a exclu d'emblée Radio-Canada, Téléfilm Canada et le Conseil des arts du Canada, qui resteraient dans le giron d'Ottawa.
«Elles continueraient de relever du fédéral, a-t-il dit. Mais en obtenant un accord, on pourrait disposer d'une représentation québécoise qui nous permettrait d'exprimer ce que nous sommes.»
Reconnaissant qu'Ottawa n'avait jamais cédé de tels pouvoirs malgré des demandes précédentes, M. Charest a soutenu qu'il fallait se montrer persistant.
«Il faut reconnaître les moments dans notre vie et dans la vie de la nation québécoise où un enjeu comme celui là doit être mis sur la table», a-t-il dit.
D'autre part, M. Charest souhaite le rétablissement de programmes fédéraux, notamment pour la diffusion d'oeuvres canadiennes à l'étranger, qui ont été abolis par les conservateurs, suscitant des manifestations à Québec et Montréal au cours des dernières semaines.
Le premier ministre demande aussi aux partis fédéraux de s'engager à annuler une décision des conservateurs retirant du financement à des organisations à but non lucratif qui font du développement économique.
Cette décision avait donné lieu à une levée de boucliers, notamment dans la région de Québec.
Lawrence Cannon, lieutenant québécois du Parti conservateur de Stephen Harper, a montré quelques signes d'ouverture à la demande de M. Charest concernant l'autonomie québécoise en matière de culture.
Il a cependant refusé d'engager son parti à négocier une entente, soutenant qu'il fallait attendre le résultat des élections.
«On ne ferme pas la porte, a-t-il dit, soulignant l'harmonie qui règne entre Québec et Ottawa. Je ne peux pas annoncer qu'on ouvre des négociations, mais on peut se parler.»
Pour le rétablissement des financements demandé par le premier ministre québécois, M. Cannon a soutenu que les fonds n'étaient pas disparus mais simplement affectés d'une manière différente. Il a cependant écarté tout retour des programmes abolis par son gouvernement.
Le chef libéral, Stéphane Dion, a profité des demandes de M. Charest pour critiquer son adversaire Stephen Harper. En campagne en Colombie-Britannique, il a affirmé que le chef conservateur «affaiblit la liberté des arts et de la culture. Il rétablit des formules de censures contre les arts et la culture. Comment voulez-vous que je ne me sente pas en accord avec M. Charest devant un tel gâchis auquel on va mettre fin?»
De son côté, le Parti québécois voit une idée «extrêmement intéressante» dans la demande de M. Charest, mais estime qu'elle est «insuffisante».
Le porte-parole péquiste en matière de langue, de culture et de communications, Pierre Curzi, veut franchir un pas de plus et tient mordicus à un amendement constitutionnel.
«Une entente administrative, ça sera toujours aléatoire et attaquable, alors qu'un amendement constitutionnel confirmerait cette juridiction-là, ce pouvoir que nous avons sur la culture. De façon définitive», a lancé M. Curzi.
Il entend même déposer une motion à ce sujet pour que les partis à l'Assemblée nationale parlent d'une seule voix.
Le PQ veut non seulement le rapatriement des pouvoirs du Québec en matière de langue et de culture, mais le plein espace fiscal, sous forme de points d'impôt. Cela représente plusieurs centaines de millions de dollars, a estimé M. Curzi.
Durant son discours, vendredi, M. Charest a évoqué les obstacles liés à sa position minoritaire à Québec, le contexte de ralentissement économique et les projets d'accord de libre-échange qu'il souhaite mettre en place.
Sur un ton humoristique, M. Charest a conclu en racontant qu'il avait réussi à trouver un chapeau de cowboy à sa taille lors de son passage, cet été, au festival western de Saint-Tite, en Mauricie, ce qu'il n'avait pas été capable de faire la fois précédente.
«Cette année, ils m'en ont trouvé un chapeau parce que l'électorat s'est chargé de rapetisser la taille de ma tête entre ma dernière visite et celle de cette année», a-t-il dit en faisant référence aux sièges perdus par son parti aux dernières élections.


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